Règlement, procédure et droits du Parlement
Motion tendant à modifier le Règlement du Sénat--Débat
30 avril 2024
Honorables sénateurs, c’est avec un mélange de tristesse et d’espoir que je prends la parole aujourd’hui pour parler de la motion no 165 du gouvernement Trudeau visant à modifier le Règlement du Sénat.
Je suis triste parce que je pense que certains des changements proposés par cette motion sont préjudiciables au Sénat et au système démocratique canadien. Je suis triste parce que le précédent créé par le sénateur Gold avec sa motion marque la fin d’un Sénat qui fonctionnait d’une certaine façon en dehors de la partisanerie que nous voyons maintenant à la Chambre. Je reviendrai sur ce point dans un instant.
Comme je l’ai dit, j’ai aussi de l’espoir parce que je pense que c’est le dernier acte de ce mauvais drame qu’est la tentative de Justin Trudeau de réformer le Sénat. Soyons clairs : cette tentative émane de Justin Trudeau. La fin est proche pour le gouvernement actuel, et Pierre Poilievre recevra bientôt le mandat de réparer ce qui ne va plus au pays. Une des choses qui ne va plus à cause de Justin Trudeau et que Pierre Poilievre devra réparer, c’est le Sénat.
Contrairement à ce que le sénateur Gold et les libéraux voudraient nous faire croire, en 2014, Justin Trudeau n’a pas conçu un plan élaboré pour faire entrer le Sénat canadien dans le XXIe siècle. Son plan a plutôt été élaboré sur une serviette de table, par opportunisme politique et sous la pression de trouver un stratagème qui lui éviterait d’être rejeté par la moitié de son caucus.
La grande majorité d’entre vous n’était pas présente en 2013 lorsque le Sénat a dû faire face aux dépenses douteuses de certains sénateurs. Permettez-moi de vous expliquer brièvement ce qui s’est passé. Pour les sénateurs qui étaient présents, cela vous rafraîchira la mémoire.
Quatre sénateurs ont été cités dans les médias pour leurs dépenses douteuses. L’un d’entre eux était un libéral qui a rapidement décidé de prendre sa retraite. Lorsque le gouvernement conservateur a décidé d’agir et de suspendre les trois autres sénateurs, Justin Trudeau a demandé à ses sénateurs libéraux de s’abstenir lors du vote. La moitié du caucus n’a pas suivi ses ordres.
Trudeau était furieux. Il a envoyé Dominic LeBlanc, son homme de main préféré, pour organiser un coup d’État au sein du caucus libéral du Sénat. George Furey devait remplacer Jim Cowan en tant que leader. Ce coup d’État a échoué.
Cela a rendu Trudeau encore plus furieux. Il savait que l’enquête du vérificateur général montrerait que d’autres sénateurs libéraux avaient des dépenses douteuses. Il a donc décidé de les expulser du caucus, de les exiler. Cette décision a été prise sans cérémonie. Les sénateurs Jaffer, Cordy, Ringuette, Downe ou Massicotte pourraient tous vous en dire plus sur cette réunion, un froid mercredi matin de janvier 2014, au cours de laquelle les sénateurs libéraux ont découvert le vrai visage de Justin Trudeau. Ces sénateurs qui avaient travaillé sans relâche pour le Parti libéral ont été écartés comme des moins que rien, abandonnés par Justin Trudeau en route vers le pouvoir.
C’est après avoir décidé d’exclure leurs sénateurs du caucus que les libéraux ont élaboré un plan visant à transformer le Sénat sans vraiment le changer. L’idée selon laquelle les sénateurs libéraux étaient moins indépendants du fait de leur appartenance à un caucus national était une imposture. Les sénateurs libéraux qui étaient ici lorsque je suis arrivé, comme ceux que j’ai mentionnés et d’autres, comme les sénateurs Cowan, Joyal, Baker et Fraser, étaient tous de grands penseurs indépendants. En fait, comme je viens de le dire, c’est parce qu’ils n’ont pas suivi Justin Trudeau et parce qu’ils étaient des esprits indépendants qu’ils ont été écartés.
Le plan élaboré par Trudeau en 2014 avait deux objectifs.
Premièrement, il fallait couper les liens avec les sénateurs qui pouvaient devenir gênants à tout moment. Les libéraux considéraient leurs collègues sénateurs comme des bombes à retardement toxiques qu’ils devaient fuir. Pour Trudeau, son image est sacro-sainte. Il était hors de question qu’un sénateur, aussi bon et loyal soit-il, vienne ternir sa réputation.
Deuxièmement, les libéraux, qui étaient en troisième place, devaient proposer quelque chose concernant la réforme du Sénat. Le projet de Harper de limiter la durée des mandats et d’organiser des élections sénatoriales était toujours d’actualité, même s’il était freiné par les tribunaux. Le plan du NPD, en deuxième position, était plus simple : il s’agissait d’abolir l’institution.
Pour se distinguer, les libéraux ont eu l’idée d’un comité de libéraux — souvenez-vous, un comité de libéraux — qui nommerait au Sénat des libéraux qui se diraient alors indépendants. Les libéraux demanderaient également au leader du gouvernement de se présenter comme un représentant, même s’il est le leader du gouvernement.
Il y a lieu d’admirer les libéraux pour cela. Ils ont réussi à faire passer l’immobilisme pour un progrès. La réforme du Sénat est soudain devenue simple : il suffisait de changer les titres, d’appeler un leader un représentant, un whip un agent de liaison et un libéral un indépendant, et le tour est joué. Vous avez un nouveau Sénat.
Chers collègues, avançons rapidement jusqu’en 2024. Sentant que le règne de Trudeau tire à sa fin, le gouvernement a décidé de présenter à la hâte cette motion visant à modifier le Règlement. Les libéraux, qui sont dans leur neuvième année au pouvoir, ont décidé de préparer leur sortie et de changer le Sénat pour de bon, du moins l’espèrent-ils. Elle est bien bonne.
Qu’est-ce qui leur a pris autant de temps? Je sais que le sénateur Gold accusera les conservateurs d’avoir bloqué tous les magnifiques changements que Justin Trudeau était censé apporter au Sénat. Je suis désolé, chers collègues, mais ce serait une mauvaise réponse.
Comme je l’ai déjà dit, le problème, c’est que ces changements n’ont pas été mûrement réfléchis. Au départ, il s’agissait seulement de quelques slogans pour la campagne électorale de 2015, une campagne que Trudeau n’était pas censé remporter.
Le gouvernement ne savait pas quoi faire du Sénat. Il lui a fallu cinq mois pour décider qu’il avait besoin d’un leader au Sénat. Oui, mesdames et messieurs les sénateurs, le Sénat a siégé pendant cinq mois sans que le gouvernement soit représenté. Les nouveaux sénateurs libéraux nommés en 2016 ne savaient pas quoi faire : devaient-ils siéger seuls ou créer des groupes? Mais alors, comment peut-on faire partie d’un groupe et être indépendant? Quelqu’un a trouvé une solution.
Nous avons vu naître des notions étranges, comme des dirigeants qui ne dirigent pas, des agents de liaison qui assurent la liaison avec on ne sait qui et des facilitateurs qui facilitent on ne sait quoi. Bien sûr, tout cela n’est qu’une mascarade. Vous avez beau appeler votre chat un félin, cela ne fait pas de vous un dompteur de lions.
Pendant ce temps, les sénateurs conservateurs et libéraux attendaient patiemment que le gouvernement et les nouveaux sénateurs présentent leurs projets. Sans surprise, les sénateurs indépendants ont décidé de reproduire le modèle qui existe dans tous les Parlements inspirés du modèle de Westminster et ont formé des groupes. La prédiction de John A. Macdonald, selon laquelle cet endroit ne pourrait pas fonctionner avec 105 sénateurs indépendants, s’est une fois de plus vérifiée. La majorité des sénateurs, toujours affiliés à un parti politique, a accepté les demandes de ces nouveaux sénateurs et a apporté les modifications nécessaires au Règlement, sans aucune résistance d’ailleurs. Comme l’a souligné le sénateur Gold dans son discours :
[...] le Règlement du Sénat a été modifié pour permettre la participation de ces groupes ou des ordres sessionnels ont été adoptés pour permettre l’inclusion de nouveaux sénateurs.
À entendre le sénateur Gold, on pourrait croire que les sénateurs de Trudeau ont dû se battre bec et ongles avec les conservateurs et les libéraux. Chers collègues, rien ne saurait être plus faux.
L’opposition conservatrice ne s’est pas opposée à la grande majorité des changements apportés au Règlement, à la Loi sur le Parlement du Canada ou à la façon dont nous menons nos travaux. Nous savons que les élections ont des conséquences. Nous savons qu’en nommant 81 sénateurs, soit autant que Wilfrid Laurier, Justin Trudeau a marqué le Sénat de son empreinte.
Toutefois, nous avons été très clairs : nous n’accepterons pas qu’on réduise les pouvoirs de l’opposition. Nous n’accepterons pas non plus de changements qui empêcheront un nouveau gouvernement conservateur, qui sera bientôt au pouvoir, de mener correctement ses affaires au Sénat. Il s’agit encore et toujours de notre limite.
Encore une fois, je reviendrai plus tard sur l’incidence des changements préconisés par le sénateur Gold sur l’opposition et sur un futur gouvernement conservateur. Cependant, je tiens d’abord à parler de ce qui me semble être l’aspect le plus scandaleux de cette initiative du gouvernement.
Pour autant que je sache, utiliser une motion d’initiative ministérielle pour modifier le Règlement sans conclure d’accord ni discuter sérieusement avec l’opposition est sans précédent. Quand j’ai interrogé le sénateur Gold à ce sujet, il n’a pas pu me citer un seul cas où le gouvernement a modifié unilatéralement le Règlement du Sénat.
S’il vous plaît, sénateur Gold, épargnez-nous votre argument selon lequel le fait que vous présentiez une motion n’est pas une action unilatérale du gouvernement. Justin Trudeau a nommé 81 sénateurs, et l’opposition ne compte que 13 sénateurs sur 96. Certes, utiliser les pouvoirs du gouvernement pour faire avaler de force une telle motion à l’opposition est sans précédent, et je dirais même antidémocratique, surtout lorsque l’on brandit la menace d’une motion de fixation de délai imminente, qui plane maintenant au-dessus de nos têtes.
Les sénateurs savent que la procédure habituelle pour modifier le Règlement du Sénat est la suivante : le Comité du Règlement, où le consensus a toujours été la politique à suivre, mène une étude, puis il rédige un rapport. Il a toujours été admis que, pour modifier les règles du jeu, il fallait en discuter avec tous les joueurs, recueillir leur avis et parvenir à un consensus. C’est tout. Le sénateur Gold passera à l’histoire en tant que leader du gouvernement qui a brisé ce modèle en vigueur depuis 1867. Il est le premier à faire ce qui se fait maintenant couramment à la Chambre des communes : utiliser la majorité gouvernementale pour changer les règles. Vous remarquerez le cynisme du gouvernement. Il utilise la tactique la plus partisane jamais utilisée pour changer les règles afin de rendre cet endroit moins partisan. Du moins, c’est ce qu’il prétend.
Le sénateur Gold a ouvert une boîte de Pandore. Une page a été tournée. Je vais faire une prédiction : maintenant que le génie est sorti de la bouteille, les futurs leaders du gouvernement utiliseront ce précédent pour justifier l’utilisation des pouvoirs du gouvernement afin de changer les règles. Dans quelques années, lorsque les conservateurs reprendront la majorité au Sénat, ils pourront changer les règles comme bon leur semble. À peu près 50 % d’entre vous — et moi — ne seront plus ici. Environ 50 % des sénateurs ne seront plus ici, et 50 % le seront toujours. Je pense que ceux d’entre vous qui siégeront sur les banquettes de l’opposition se souviendront de notre débat actuel et se diront : « Plett nous a mis en garde. » Croyez-moi : le gouvernement conservateur fera ce que vous lui dites, à l’avance, qu’il peut faire.
Franchement, je ne comprends pas pourquoi le gouvernement n’a pas utilisé la méthode en vigueur depuis la Confédération pour changer le Règlement. Une méthode acceptable sous Wilfrid Laurier, sous Lester B. Pearson et sous Brian Mulroney ne l’est plus sous Justin Trudeau.
L’opposition conservatrice occupe 4 des 15 sièges au sein du Comité du Règlement — 4 des 15 sièges. Les quatre autres groupes qui appuient les politiques générales du gouvernement, y compris le budget, se partagent 11 sièges. Pourquoi le gouvernement doit-il utiliser une motion du gouvernement pour imposer ces changements au Sénat? Pourquoi le sénateur Gold n’a-t-il pas d’abord présenté ses changements au Comité du Règlement? Peut-être ne fait-il pas confiance à ses 11 alliés au sein du Comité du Règlement. Je ne sais pas. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un affront pour le Comité du Règlement et sa présidente, et j’espère que la présidente en prendra note.
En proposant une motion, le gouvernement saute l’étude en comité. Nous n’entendrons pas de témoins experts qui pourraient nous dire ce qu’ils pensent de ces changements. Nous ne serons pas en mesure de débattre de chaque changement, d’examiner attentivement le texte et de peaufiner chaque nouvelle règle. Le Sénat est très fier de son travail en comité et de sa capacité à examiner les choses en profondeur et c’est quelque chose pour lequel il est connu depuis bien des années. Le gouvernement a décidé que nous n’avions pas besoin de cela pour notre propre Règlement.
Il sait mieux que quiconque ce qu’il faut faire.
C’est la raison pour laquelle le gouvernement a recours à une motion du gouvernement. C’est pour que les sénateurs ne puissent pas entendre des experts qui seraient contre la proposition, étudier attentivement les changements et y apporter des modifications au besoin. Le gouvernement, comme vient de le souligner le sénateur Housakos, croit savoir mieux que quiconque ce qu’il faut faire. Il a déjà toutes les solutions, alors que lui importe l’avis des autres sénateurs?
Il est vrai qu’on a déjà discuté de certaines idées qui se trouvent dans la motion, et il y a eu consensus sur plusieurs d’entre elles. Cependant, les sénateurs du gouvernement nous présentent cela comme un tout qui est à prendre ou à laisser. Le sénateur Quinn a demandé aujourd’hui au sénateur Gold s’il serait prêt à considérer un simple amendement. Il a refusé de répondre. C’est sa motion. Il n’a pas demandé l’avis des autres sénateurs. Il a demandé au sénateur Gold s’il serait prêt à accepter un simple amendement. Le sénateur Gold a refusé de répondre à la question.
Il doit demander au gouvernement.
Comme je l’ai dit, on a effectivement discuté de certaines des idées contenues dans la motion, mais les sénateurs ministériels ont présenté cette motion comme un programme à prendre tel quel ou à laisser. C’est à ce moment-là que la sénatrice Bellemare et le Comité du règlement ont décidé de ne pas présenter de rapport. C’était leur décision, pas celle des conservateurs.
Comme l’a admis le sénateur Gold dans son discours, le gouvernement a décidé d’agir unilatéralement, par frustration. Au lieu de faire son travail pour atteindre un consensus, comme il devrait le faire, il utilise la sénatrice Bellemare comme bouc émissaire et intimide l’opposition. Ne nous faisons pas d’illusions : ces changements sont un fait accompli.
Le sénateur Gold a admis dans son discours qu’il n’y avait pas de place pour des discussions. Justin Trudeau veut ces changements et ce que Justin Trudeau veut, ses sénateurs doivent l’obtenir. L’objectif de cette motion est de créer un deuxième caucus du gouvernement, ou un deuxième caucus d’opposition, selon le parti au pouvoir, et le sénateur Gold a admis que cela faisait partie de l’ADN de cette motion. Si l’objectif ultime est de transformer le Sénat en une chambre d’écho libérale et que le gouvernement utilisera n’importe quel moyen pour y parvenir, y compris le recours à la clôture, que reste-t-il à négocier pour les conservateurs?
Maintenant que le Parti libéral a perdu 20 points dans les sondages, maintenant que les sénateurs de Trudeau entrevoient la perspective de siéger dans l’opposition pendant très longtemps, ils changent les règles et ils utiliseront la fixation de délai pour s’assurer que le débat soit écourté. Après tout, il faut agir vite pour se débarrasser de ces procédures qui font perdre du temps, comme l’a dit la sénatrice Lankin, n’est-ce pas?
Enfin, en ce qui concerne l’utilisation sans précédent d’une motion du gouvernement pour modifier les règles, je ne sais pas trop quoi penser des tergiversations du sénateur Gold sur la question de savoir qui est à l’origine de ces modifications. La question lui a été posée. Il n’a pas voulu répondre à la question de savoir si le premier ministre soutenait ces changements. Il a déclaré dans son discours :
[I]l s’agit d’une initiative du bureau du représentant du gouvernement au Sénat. Ce n’est pas une initiative du Cabinet du premier ministre, point final.
Ce sont les paroles du sénateur Gold.
Eh bien, dans ce cas, à quoi renvoient les affaires du gouvernement dans le Règlement du Sénat? La question s’impose. Il ne s’agit pas d’une idée personnelle d’un membre du gouvernement. Il ne s’agit pas d’une initiative émanant d’un bureau quelque part dans ce bâtiment. Il s’agit des affaires du gouvernement. Si le sénateur Gold veut nous faire croire que cette motion n’est pas une motion du gouvernement libéral de Justin Trudeau, alors il ne devrait pas utiliser une motion du gouvernement pour la présenter.
Exactement.
Je vais tenir pour acquis que le sénateur Gold n’essaie pas de nous en passer une petite vite, qu’il ne se sert pas des outils du gouvernement pour avancer son propre programme. Il faut arrêter de tourner autour du pot : cette motion du gouvernement est appuyée à 100 % par le gouvernement, par Justin Trudeau, par les libéraux et probablement aussi par Jagmeet Singh.
Il veut abolir le Sénat.
Le Parti libéral et ceux qui le supportent ici et à la Chambre auront un prix politique à payer, dans l’immédiat et dans le futur, pour ces changements et pour la façon dont ils sont imposés.
L’autre chose qui me dérange est le moment choisi pour présenter cette motion. Comme je l’ai dit, on dirait qu’il s’agit d’une tentative désespérée du sénateur Gold. Le gouvernement Trudeau est majoritaire au Sénat depuis environ sept ans. Pendant toutes ces années, et même avant d’obtenir la majorité, le gouvernement est parvenu à faire adopter ses projets de loi. D’ailleurs, comme il y avait 23 postes vacants au Sénat au moment de son élection, Justin Trudeau a pu obtenir la majorité très rapidement. Si on compare avec les Laurier, Borden et Mulroney, qui ont dû se battre contre leurs opposants qui étaient majoritaires au Sénat pendant des années, Justin Trudeau est chanceux.
Qu’est-ce qui fait que ces changements sont si urgents? Nous connaissons tous la réponse. La modification du Règlement du Sénat est devenue urgente le jour où Pierre Poilievre a pris une avance de 20 points dans les sondages. Le sénateur Gold essaie désespérément de pérenniser, avant les élections, la structure ridicule que Justin Trudeau a créée au Sénat, parce qu’il sait que le Parti libéral sera rayé de la carte et qu’il est probable qu’il redevienne un tiers parti.
Comme je l’expliquerai plus tard, cette motion met le Groupe des sénateurs indépendants, ou son successeur, en position de servir de lest au Sénat, en penchant du côté des libéraux, quel qu’il soit; aujourd’hui alors qu’ils sont au pouvoir et demain quand ils seront dans l’opposition. De cette manière, les libéraux s’assurent que, pour quelques années au moins, le Sénat penchera en leur faveur. Ils disent vouloir se débarrasser du duopole au Sénat. Ils le remplacent par un triumvirat où ils contrôlent deux des trois acteurs.
Parlons du rôle de l’opposition. Permettez-moi maintenant d’aborder une question importante dans ce débat.
Il est évident que certains sénateurs de Trudeau ont du mal à accepter la présence d’une opposition solide au Sénat. Ils nous reprochent d’utiliser des mots comme « menteur », « incompétent » ou « corrompu » pour décrire avec véracité leur premier ministre préféré. Ils nous reprochent d’utiliser des tactiques procédurales, de perdre du temps ou de poser trop de questions, dont certaines sur des sujets qui les mettent très mal à l’aise. Cela démontre non seulement une mauvaise compréhension du processus démocratique de la part de ces sénateurs, mais aussi un manque de connaissance de l’histoire du Sénat. Il n’est pas nécessaire de remonter très loin dans l’histoire pour trouver des oppositions au Sénat qui étaient bien plus obstructionnistes que nous avons pu l’être au cours des neuf dernières années.
Chers collègues, je suis désolé d’être à l’origine de toute cette agitation, mais nous ne faisons que notre travail. Nous jouons un rôle aussi important que celui du gouvernement et de ses partisans.
Je ne cesserai de le répéter : le Sénat a besoin d’une opposition organisée qui dispose des outils nécessaires pour faire son travail.
Permettez-moi de citer l’ancien premier ministre Wilfrid Laurier :
[...] il est réellement essentiel au pays que nous placions autant que possible sur un pied d’égalité les différences d’opinions qui sont représentées des deux côtés de la Chambre; nous admettons que nous devons avoir une forte opposition pour exprimer les vues de ceux qui ne pensent pas comme la majorité.
Vous noterez que le premier ministre Laurier a insisté sur le fait que le gouvernement et l’opposition devaient être aussi égaux que possible.
Et quel est le rôle de l’opposition? C’est évidemment de faire pression sur le gouvernement et de lui demander des comptes au nom des Canadiens.
Permettez-moi de citer un autre ancien premier ministre, soit John G. Diefenbaker :
Pour que le Parlement demeure une institution viable, l’opposition loyale de Sa Majesté doit remplir ses fonctions résolument. Lorsqu’elle agit comme il se doit, la liberté est protégée. D’ailleurs, l’histoire nous prouve que la liberté s’évanouit toujours lorsqu’il n’y a plus de critique. L’opposition fait respecter et soutient les droits des minorités. Elle doit faire preuve de vigilance pour combattre l’oppression et l’empiétement injuste, par le Cabinet, sur les droits du peuple. Elle doit surveiller toutes les dépenses et s’opposer aux extravagances, en informant le public de tout gaspillage ou méfait encore pire. Elle décèle les erreurs, suggère des modifications, pose des questions et tire les choses au clair; elle éveille, informe et façonne l’opinion du public en lui permettant de s’exprimer et de voter. Elle doit suivre de près le moindre geste du gouvernement pour l’empêcher de court-circuiter la procédure démocratique comme les gouvernements se plaisent à le faire.
Bien sûr, lorsqu’elle fait son travail, l’opposition irrite les députés ministériels. C’est au cœur du processus démocratique. On peut penser que l’opposition va trop loin, qu’elle utilise un langage acerbe et qu’elle perd du temps. Dans ce cas, il existe des règles pour y mettre fin. Tant que l’opposition respecte les règles, le gouvernement et ses partisans devraient et même doivent accepter le fait que cela fait partie de notre processus démocratique.
Je vais citer un troisième ancien premier ministre, M. Lester B. Pearson :
En matière de politique nationale, lorsque j’étais membre du gouvernement, je regardais les membres de l’opposition jouer leur rôle avec zèle et vigueur, courage et détermination. Ils insistaient, à juste titre, sur leur droit de s’opposer, d’attaquer, de critiquer et de s’engager dans les estocades du débat, comme leur recommandaient si souvent et si ardemment ceux à qui tenaient à cœur la vigueur du Parlement et la santé de la démocratie. Je ne peux m’abstenir d’ajouter toutefois que l’application de cette procédure a parfois déplu à ceux qui en étaient la cible.
Quant à l’accusation selon laquelle l’opposition perd du temps et ralentit les choses, elle est vraie, je l’admets. C’est l’un des éléments de notre arsenal et même l’outil le plus efficace dont nous disposons. Lorsqu’il présente une mesure au Sénat, le gouvernement n’a qu’un seul objectif, et ce, avant même qu’elle soit présentée : qu’elle ressorte d’ici le plus rapidement possible. C’est déjà l’objectif du sénateur Gold, et c’est même devenu son obsession. Voilà pourquoi on nous presse d’adopter des projets de loi qui restent ensuite à la Chambre pendant des mois, voire des années.
Le temps a de l’importance pour l’opposition. Il lui permet de garder le débat dans la sphère publique et d’alerter les parties prenantes. Il lui permet de montrer qu’il pourrait y avoir une meilleure façon de faire les choses et de se présenter comme le futur gouvernement.
Cela ne signifie pas que l’opposition doit se traîner les pieds et transformer le Sénat en champ de bataille sur toutes les questions. L’opposition doit faire preuve de prudence dans l’utilisation de ses outils procéduraux. Elle doit maintenir un équilibre entre le compromis et l’obstruction, la cooptation et l’opposition par réflexe. Toutefois, l’opposition a le droit, comme elle le devrait, d’utiliser tous les moyens nécessaires — dans les limites du Règlement — pour mettre fin à ce qu’elle considère comme des mesures préjudiciables au Canada.
Au bout du compte, le gouvernement, surtout lorsqu’il dispose d’une majorité, comme c’est le cas en ce moment au Sénat, pourra aller de l’avant. Comme le dit le dicton, « l’opposition s’oppose, le gouvernement dispose ».
Les sénateurs devraient savoir que depuis 2015, avant même qu’il y ait un leader du gouvernement au Sénat, l’opposition conservatrice a été en mesure de négocier des échéanciers raisonnables pour faire avancer les projets de loi du gouvernement. Nous comprenons très bien notre rôle au Parlement. Lorsque le sénateur Gold nous accuse de bloquer, de retarder ou de faire de l’obstruction, il recycle au Sénat les discours que le Cabinet du premier ministre a préparés pour ses collègues de la Chambre. Si certains sénateurs souhaitent apprendre ce qu’est une opposition obstructionniste, ils peuvent consulter le hansard de l’époque où les conservateurs formaient le gouvernement et où les libéraux étaient majoritaires au Sénat. Le débat sur la TPS me vient à l’esprit.
Je ne peux passer sous silence le fait que lorsque le gouvernement et ses sénateurs affirment vouloir rendre le Sénat plus efficace, ils ne parlent pas d’améliorer le fonctionnement de l’institution à moindre coût. Ils parlent de réduire le temps dont dispose l’opposition pour le débat. Ils veulent limiter le débat et mettre fin aux procédures qui font perdre du temps, comme l’a dit la sénatrice Lankin. Cependant, ce n’est pas l’efficacité que le gouvernement recherche, mais l’opportunisme. Le gouvernement — tout gouvernement, en réalité — veut agir rapidement. Il veut se mettre au travail. Toutefois, le Sénat n’est pas fait pour légiférer à la hâte.
L’auteur Gerald Schmitz a dit :
La raison d’être du Parlement n’est pas seulement d’assurer la gestion des affaires de l’État, mais aussi de permettre l’expression de tous les points de vue légitimes. Le gouvernement a le droit et le devoir de gouverner. Quant à l’opposition, si elle croit que l’intérêt public est en jeu, elle a le droit et le devoir de contrecarrer l’action et la politique gouvernementales, en se servant de tous les mécanismes parlementaires légitimes dont elle dispose.
J’invite les sénateurs qui ont du mal à accepter une opposition conservatrice au Sénat à réfléchir à l’autre possibilité. Si le point de vue des Canadiens qui ne soutiennent pas les libéraux de Trudeau et qui représentent près de 80 % de la population n’est pas exprimé ici, à quoi sert donc le Sénat? Ces huit électeurs sur dix poseront la question suivante : pourquoi payons-nous 130 millions de dollars par année pour une institution qui ne fait que reprendre les discours du gouvernement Trudeau? Pourquoi ne pas simplement l’abolir? Je n’ai pas de réponse à cette question. Parfois, je me demande si le plan secret de Justin Trudeau n’était pas de se débarrasser du Sénat, de le rendre si peu pertinent que son abolition ne serait qu’une mesure d’économie que pratiquement personne ne remarquerait.
Pour l’instant, du moins, on peut compter sur les sénateurs conservateurs pour relever le niveau du débat, mais imaginons ce que ce serait de n’avoir que des partisans de Trudeau ici pour débattre de la qualité de ses politiques. Cette facture de 130 millions de dollars paraîtrait horrible, n’est-ce pas?
Enfin, je tiens à souligner un autre fait au sujet de l’opposition au Sénat. Le caucus de l’opposition doit avoir des liens avec un parti politique, tout comme le caucus du gouvernement doit avoir des liens avec le parti au pouvoir. Ces liens peuvent être libres. Il peut simplement s’agir d’une adhésion au parti en tant que sénateur — comme c’était le cas des libéraux en 2014-2015 —, mais il doit y avoir des liens, et ce, pour deux raisons.
Premièrement, pour s’appeler l’opposition du gouvernement, il faut non seulement s’y opposer de temps à autre sur des questions précises, mais aussi vouloir prendre la place du gouvernement. Chaque jour, l’opposition tente de convaincre l’électorat qu’elle doit former le gouvernement. Ce rôle est fondamental dans notre système.
Le distingué parlementaire canadien Stanley Knowles disait ceci :
Au Parlement, l’opposition devrait se comporter de façon à convaincre la population qu’elle pourrait faire mieux que le parti au pouvoir. [...]
Seul un groupe lié à un parti qui veut remplacer le gouvernement peut jouer le rôle de l’opposition au Sénat. C’est pourquoi notre Règlement est ainsi rédigé. Le fait d’être lié à un parti politique confère également au gouvernement et à l’opposition une légitimité supplémentaire. Je cite le sénateur Gold dans son discours :
L’argument de l’opposition mérite d’être pris au sérieux. Si l’on prétend parler au nom du gouvernement, il devrait y avoir un lien avec le gouvernement, car je représente un gouvernement qui a été élu et qui représente la population.
Les sénateurs conservateurs prennent la parole et déclarent : « Nous parlons au nom de 6 millions », peu importe le nombre de Canadiens qui ont voté pour eux, et ils ont raison de le dire parce qu’il y a un lien entre les deux. Lorsqu’ils disent « Je parle au nom des Canadiens », ils représentent un parti qui le fait.
C’est une autre raison pour laquelle il est erroné de mettre le Groupe des sénateurs indépendants sur le même pied que l’opposition, soit aujourd’hui les conservateurs, demain les libéraux ou le NPD.
Permettez-moi de revenir à la motion qui nous est soumise. Elle contient trois types de modifications du Règlement.
Le premier type de modification du Règlement, c’est l’introduction de tous ces nouveaux termes bidons dont le gouvernement est si friand. Ma réaction à ces changements est la suivante : pourquoi? Si le sénateur Gold veut se qualifier de représentant, d’agent spécial, d’exécuteur, de négociateur, de mendiant en chef ou de grand Pooh-Bah, c’est son privilège.
Le maître du Sénat.
Peu importe comment il choisit de se présenter ou de se nommer, selon les règles, il est et demeurera tout simplement le leader du gouvernement au Sénat. Bien franchement, il est ridicule de changer les règles pour répondre à ce besoin étrange de trouver un nouveau terme pour désigner la même réalité.
Deuxièmement, il y a des modifications à certaines dispositions en particulier, notamment en ce qui concerne la suspension du soir ou les questions inscrites au Feuilleton. Bien que je n’appuie pas ces changements, je reconnais qu’ils peuvent avoir du bon. Ils méritent certainement une étude et un débat approfondis. Je suis navré que le gouvernement ait refusé de donner la possibilité au Comité du Règlement de se pencher sur ces changements et, surtout, qu’on ne nous permette pas de réfléchir aux conséquences imprévues.
D’ailleurs, je suis presque tombé en bas de ma chaise quand j’ai vu que le Comité du Règlement a une réunion prévue le 7 mai pour se pencher — je vous le donne en mille — sur les réponses différées et les réponses aux questions écrites. C’est ahurissant. Je ne sais pas trop quoi en penser. Allons-nous tenir deux débats de façon concurrente? Quoi qu’il en soit, je crois que cela montre clairement que le sénateur Gold veut précipiter les choses et qu’on veut aller de l’avant sans savoir ce qu’on fait.
Enfin, le gouvernement a décidé de mettre le Groupe des sénateurs indépendants au même niveau que le gouvernement et l’opposition et d’accorder certains pouvoirs symboliques au Groupe des sénateurs canadiens et au Groupe progressiste du Sénat. Ils font tout pour que ces changements soient adoptés — c’est du moins le cas de leurs leaders — même s’ils n’en tirent rien.
Je cite le sénateur Gold dans son discours :
Il s’agit de l’élément central de cette initiative, de sa raison d’être, de son ADN. C’est comme l’objet d’un projet de loi. On ne peut pas renoncer à certaines choses, si je peux me permettre cette analogie, sans détruire le projet de loi. Si c’était une mesure législative, ce serait irrecevable dans cette situation.
C’est là que cette motion me pose un gros problème. En mettant le groupe des sénateurs indépendants sur le même pied que le gouvernement et l’opposition, cette motion crée un déséquilibre au Sénat. N’oubliez pas que le modèle de Westminster est basé sur le fait qu’il y a un équilibre entre les droits et privilèges du gouvernement et les droits et privilèges de l’opposition. Ainsi, en accordant une partie des privilèges de l’opposition à d’autres groupes, la motion dilue les pouvoirs de l’opposition. Un droit détenu par quelques-uns est un privilège. Un droit détenu par tous n’est rien d’autre qu’un droit.
Cependant, la manœuvre du gouvernement est plus sournoise qu’une simple attaque contre l’opposition. En créant une troisième force dotée des mêmes pouvoirs et privilèges, cette motion crée soit un deuxième caucus du gouvernement, soit un deuxième caucus de l’opposition. Le troisième groupe soutiendra ou non les objectifs de politique générale du gouvernement. S’il les soutient, il fera partie du gouvernement. S’il s’y oppose, il fera partie de l’opposition.
Avec la modification au Règlement, le gouvernement Trudeau peut compter sur deux groupes pour l’aider à orienter le Sénat : le bureau du représentant du gouvernement au Sénat, et le Groupe des sénateurs indépendants, qui compte 41 sénateurs, dont 38 ont été nommés par Justin Trudeau et 3 par Jean Chrétien. Nous savons tous qu’ils continueront à appuyer fidèlement les libéraux jusqu’à la fin de leur mandat, comme ils l’ont fait jusqu’à maintenant.
Comme le sénateur Gold l’a déclaré lors d’une réunion du Groupe des sénateurs indépendants : « N’oubliez pas qui vous a nommé. » C’est ce qu’a dit le sénateur Gold lors d’une réunion du Groupe des sénateurs indépendants. Jusqu’aux prochaines élections, la sénatrice Saint-Germain sera de facto la deuxième leader du gouvernement sans avoir l’obligation de répondre pendant la période des questions. Il est étonnant de constater que nous savons des choses que vous avez dites et qui n’étaient pas censées être publiques.
Mon intuition me dit qu’une grande majorité des sénateurs nommés par Trudeau se souviendront de qui les a nommés longtemps après qu’il aura démissionné ou qu’il aura été chassé par les Canadiens. Ils défendront son héritage contre les changements qu’apportera Pierre Poilievre. Nous assisterons au retour du caucus libéral au Sénat, qui constituera l’opposition officielle. Ils pourraient même être invités à se joindre au caucus libéral national, dont la taille sera sans doute alors bien modeste.
Ils pourraient avoir besoin de tous les sénateurs.
Je pense qu’ils pourraient mettre les autres à la porte. Et je suis certain que le Groupe des sénateurs indépendants restera debout, peut-être sous un nouveau nom. Qui sait? Les noms changent ici. Ils ne soutiendront pas les politiques de Pierre Poilievre. Ils constitueront une deuxième opposition au sein du Sénat du Canada. Les modifications apportées au Règlement par la motion no 165 leur donnent les moyens de le devenir.
Cette deuxième opposition pourra manœuvrer sans aucune rigueur politique concrète. Le nouveau chef libéral n’aura pas à répondre des actes de ce groupe. Aucun député libéral ne paiera un prix politique si ce groupe bloque ou rejette un projet de loi. Il pourra prendre des positions impopulaires, défendre les idées de Trudeau, même contre le nouveau chef libéral, et n’aura aucun compte à rendre. Ce groupe demeurera en embuscade au Sénat, prêt à s’opposer au programme législatif de Pierre Poilievre.
Chers collègues, je suis sûr que la plupart d’entre vous pensent que j’exagère. Pour être franc, j’espère que c’est le cas. J’espère me tromper. En outre, j’espère que, après les élections, vous accepterez la volonté du peuple canadien et que vous ne retarderez l’adoption d’aucun projet de loi renvoyé ici par la Chambre élue, soit le Parti conservateur du Canada. Or, je crains que l’histoire ne se répète et que les sénateurs nommés par Justin Trudeau n’agissent comme les sénateurs nommés par Pierre Elliott Trudeau l’ont fait entre 1984 et 1991 : ils vont semer autant d’embûches sur le parcours de Pierre Poilievre que leurs prédécesseurs en ont semées sur celui de Brian Mulroney.
Permettez-moi à présent de passer en revue la motion et d’expliquer ce que ces changements signifient pour le Sénat.
Comme je l’ai dit tout à l’heure, en contournant le processus normal d’étude des nouvelles règles une à une en comité, le sénateur Gold nous prive de la possibilité d’examiner attentivement l’incidence des changements. C’est triste parce que ces nouvelles règles auront des conséquences imprévues. Ceux d’entre vous qui seront encore ici dans trois ou cinq ans se rendront compte qu’ils ont été dupés.
Tout d’abord, le sénateur Gold a décidé de réduire la suspension du soir d’une heure et de la faire passer de 19 à 20 heures. Nous ne saurons jamais pourquoi il a choisi cette plage horaire au lieu de celle de 18 à 19 heures ou de 18 h 30 à 19 h 30, étant donné qu’il a décidé de faire fi de la procédure normale.
On lui a dit de le faire.
Comme les sénateurs le savent, la suspension du soir est très souvent utilisée pour organiser des réunions de caucus afin de discuter de la stratégie pour la soirée. En fait, le sénateur Gold a fait circuler en mars un « argumentaire » sur les modifications du Règlement qui permettraient aux whips de demander une prolongation de la suspension du soir pour tenir les réunions de caucus. Cela ne figure pas dans la motion. Pourquoi? Nous ne le savons pas. Peut-être que le gouvernement ne veut pas que les sénateurs puissent se réunir et discuter de la manière dont ils pourraient s’opposer à ses mesures législatives. Cela lui faciliterait la tâche.
De plus, pour les sénateurs, la suspension du soir est un bon moment pour rencontrer les parties prenantes. Il y a souvent des intervenants qui me demandent : « Monsieur le sénateur, à quelle date pouvons-nous nous rencontrer? » Maintenant, je peux presque toujours dire : « Je peux vous rencontrer le mardi, de 18 heures à 20 heures, ou peut-être le jeudi, de 18 heures à 20 heures. » Je sais que ce sont les périodes où il y aura de la disponibilité. Pour ceux d’entre nous qui travaillent fort ici, c’est souvent le seul temps libre que nous avons dans une journée remplie de réunions de comité et de séances à la Chambre haute. Le gouvernement aimerait peut-être que les sénateurs aient moins de temps pour rencontrer les parties prenantes. Encore une fois, cela lui faciliterait la tâche.
Ils peuvent rentrer à la maison plus tôt.
Je sais que je suis de la vieille école sur cette question, mais, pour moi, la suspension du soir fait partie intégrante du rôle de « second examen objectif » du Sénat. Tous les sénateurs sont tenus d’assister à toutes les séances et de rester pendant toute la durée des débats. Or, nous ne le faisons pas. Chers collègues, la situation les jeudis, l’après-midi et le soir, est honteuse. Le jeudi, à 18 heures, je vois les gens se précipiter à l’aéroport pour prendre leur avion qui décolle une demi-heure plus tard.
Nous avons été nommés au Sénat pour travailler. Nous sommes généreusement rémunérés par les contribuables canadiens pour être ici et faire notre travail. Je vois cette disposition comme une façon de nous permettre de quitter le Sénat au plus tard à 19 heures. Tous les sénateurs sont tenus d’assister à toutes les séances et de rester pendant toute la durée des débats. C’est pour cette raison que nous n’avons pas de circonstances exceptionnelles; c’est pourquoi nous ne tenons pas de réunion de comité pendant que le Sénat siège. Pourtant, on nous demande de le faire constamment. Non. C’est un moment où nous sommes censés être ici.
Faire une pause après une longue journée pour permettre aux sénateurs de se préparer en vue d’une soirée de débat ne me semble pas une perte de temps, pour reprendre encore une fois les mots de la sénatrice Lankin. Le gouvernement ne veut peut-être pas que les sénateurs soient préparés. Le gouvernement n’a peut-être pas toutes ces mauvaises intentions, mais, à part permettre aux sénateurs de se coucher plus tôt, à quoi cela servira-t-il?
Combien de fois au cours des cinq dernières années, chers collègues, le Sénat n’a-t-il pas réussi à épuiser l’ordre du jour avant minuit en raison de la suspension du soir? Ce pourrait être le cas ce soir.
Avec cette mesure, le Sénat n’accomplira pas plus de choses, il siégera simplement moins longtemps. Réduire la suspension du soir d’une heure ne réduit pas les pertes de temps, comme l’a dit la sénatrice Lankin, mais simplement le temps consacré aux travaux du Sénat par les sénateurs. Soyons au moins honnêtes sur ce point.
La deuxième question que la motion cherche à aborder est celle des réponses différées et des questions inscrites au Feuilleton.
Vous remarquerez que les libéraux proposent ces changements après plus de 8 ans au pouvoir. Ils se contentaient de ne pas répondre aux questions lorsqu’ils étaient au pouvoir, mais à la veille de leur retour sur les banquettes de l’opposition, ils veulent maintenant qu’on oblige le gouvernement à répondre aux questions. Jusqu’à présent, il n’y a eu aucune volonté de le faire. Je n’ai pas reçu de réponse du sénateur Gold depuis je ne sais combien de temps. Devinez quoi : les libéraux n’avaient pas besoin de modifier le Règlement pour répondre aux questions. Tout ce dont ils avaient besoin, c’était de la volonté de le faire.
Le gouvernement se donne huit mois de plus pour répondre à des questions qui figurent déjà au Feuilleton. Manifestement, le sénateur Gold pense que le gouvernement Trudeau est un cas désespéré en ce qui concerne la transparence et qu’il appartiendra à un gouvernement Poilievre de respecter correctement le Sénat et de fournir des réponses en temps voulu.
À l’article 5 de la motion, le sénateur Gold donne le droit au gouvernement de se soustraire à l’obligation de fournir une réponse en déposant simplement une explication de la raison pour laquelle une réponse ne peut être fournie. Pourquoi le Sénat devrait-il permettre cela? Le gouvernement n’a pas ce droit à la Chambre des communes ni dans la Loi sur l’accès à l’information. Pourquoi les sénateurs devraient-ils être traités différemment des députés? Comment se fait-il qu’au Sénat de Justin Trudeau, un « je ne peux pas répondre » soit considéré comme une réponse en vertu de ces nouvelles règles?
En parlant de traiter les sénateurs différemment des députés, le gouvernement dispose de 45 jours pour répondre à leurs questions, mais aurait 60 jours pour répondre aux nôtres. Comment cela se fait-il, sénateur Gold? Nos questions sont-elles plus difficiles à traiter?
Évidemment.
Ce doit être la raison. Sont-elles moins importantes?
Le sénateur Gold a tenté d’expliquer que c’est parce que le gouvernement doit fournir des réponses différées au Sénat. J’ai deux objections à cela. Premièrement, le gouvernement n’a pas l’obligation de promettre des réponses différées. C’est son choix, et en faire une excuse pour un délai de réponse plus long ne tient pas la route. Deuxièmement, pourquoi le fait de devoir fournir des réponses différées justifierait-il de prendre plus de temps pour répondre à une question écrite? N’y a-t-il pas assez de fonctionnaires pour répondre à nos questions? Dans quelle proportion avons-nous élargi la fonction publique au cours des huit dernières années?
D’environ 40 %.
Le gouvernement réalise-t-il qu’il sera submergé de questions?
Soyons sérieux. Rien ne justifie qu’il y ait ici un plus long délai qu’à la Chambre des communes. Encore une fois, le sénateur Quinn a posé la question, mais le sénateur Gold a refusé d’y répondre. Accepteriez-vous un amendement? Vous en aurez l’occasion.
En outre, la motion du sénateur Gold limite les sénateurs à quatre questions. Pourquoi quatre? Pourquoi pas cinq ou six?
Pour conclure à ce sujet, j’ai présentement 92 questions inscrites au Feuilleton — eh bien, le chiffre vient de changer, parce qu’on m’a donné quelques réponses aujourd’hui. Pour simplifier les choses, disons que j’ai presque 92 questions inscrites au Feuilleton présentement. Certaines de ces questions y sont inscrites depuis novembre 2021.
C’est incroyable.
La motion du sénateur Gold comprend une mesure provisoire pour ces questions. Comme je l’ai dit, le gouvernement se donne six mois supplémentaires avant le début du délai de 60 jours. J’attends certaines réponses depuis 30 mois, et le gouvernement veut maintenant ajouter huit mois, après quoi il répondra probablement quelque chose comme : « Nous ne pouvons pas répondre à cela. » Ce n’est pas sérieux. C’est une blague, sénateur Gold, une vraie farce.
Encore une fois, le sénateur Gold affirme vouloir faire une chose, mais il fait plutôt le contraire. Il laisse entendre que sa motion aiderait les sénateurs à obtenir plus de réponses à leurs questions en temps opportun. C’est faux. Cela permettra plutôt au gouvernement de donner une réponse évasive pour se soustraire à ses obligations. Le gouvernement se donne huit mois pour répondre à des questions qui, dans certains cas, ont été posées il y a plus de 30 mois.
Enfin, la motion impose une limite ferme quant au nombre de questions qu’un sénateur peut poser. C’est une honte! C’est cela, la démocratie?
Le Sénat indépendant.
Honorables collègues, ce que le sénateur Gold propose aux sénateurs n’est pas aussi avantageux qu’il veut nous le faire croire. Je suis certain que, dans quelques années, certains d’entre vous regretteront profondément ces changements.
Passons à une autre question : la limitation du temps de parole. À la partie 7 de sa motion, le sénateur Gold accorde au leader du Groupe des sénateurs indépendants un temps de parole illimité. Pourquoi est-il nécessaire d’accorder un temps de parole illimité à un troisième leader?
À la Chambre des communes, le chef du Bloc québécois, le troisième parti, ne dispose pas d’un temps illimité. Je soupçonne que cela permettra au leader du Groupe des sénateurs indépendants de jouer le rôle de leader suppléant du gouvernement ou de leader suppléant de l’opposition, comme je l’ai déjà souligné. Tant que les libéraux seront au pouvoir, deux leaders soutenant le gouvernement auront ce privilège.
Dès que les conservateurs arriveront au pouvoir, deux leaders opposés au gouvernement disposeront d’un temps de parole illimité. Bien que le sénateur Gold ait expliqué qu’il s’agissait d’une mesure d’équité, nous ne sommes pas naïfs, sénateur Gold. Ce changement vise à donner aux libéraux un fusil à double canon pour tirer sur les conservateurs — au sens figuré, bien sûr. Voilà pourquoi ce privilège n’est pas étendu aux autres leaders.
Le sénateur Gold était heureux de noter dans son discours que « [p]our les autres leaders et facilitateurs, le temps de parole serait porté à 45 minutes ».
Le problème, c’est qu’aux termes de l’article 6-3(1)a) du Règlement, ils disposent déjà d’un temps de parole de 45 minutes. Merci, sénateur Gold. Il vous l’a accordé deux fois. À cet égard, la motion du sénateur Gold avantage le leader du Groupe des sénateurs indépendants et personne d’autre. Aux membres du Groupe progressiste du Sénat et du Groupe des sénateurs canadiens, tenez-vous-le pour dit : vous êtes en train d’être sacrifiés, tout comme nous.
À la partie 9 de la motion, le sénateur Gold réduit du tiers le temps de parole accordé au leader de l’opposition pour discuter de la fixation d’un délai. Il nous prive du droit de parler de la fixation d’un délai. Une telle motion est probablement la manœuvre procédurale la plus radicale que le gouvernement puisse faire au Sénat.
Il s’agit, bien entendu, d’imposer une camisole de force à l’opposition lorsqu’elle ralentit un débat sur une question de politique ministérielle, alors que, comme je l’ai dit, c’est l’un des privilèges les plus importants de l’opposition. Pourquoi le gouvernement veut-il réduire le temps accordé à l’opposition pour débattre d’une motion qui vise à couper court au débat? La clôture n’est-elle pas suffisante?
L’opposition compte actuellement 13 sénateurs sur 96. Pourquoi le gouvernement estime-t-il nécessaire de réduire le temps de parole du leader de l’opposition?
Par ailleurs, la motion du sénateur Gold accorde à 5 leaders 20 minutes chacun. Je vous rappelle que quatre d’entre eux ont voté en faveur du dernier budget du gouvernement.
Cela ne laisse que 50 minutes aux autres sénateurs pour s’exprimer sur une motion de fixation de délai, comparativement à 90 minutes actuellement. Une fois qu’un sénateur de chaque groupe est intervenu, il ne reste plus qu’un sénateur de l’opposition qui peut s’exprimer sur une motion de clôture.
Dans ce contexte, l’égalité entre les groupes n’a aucun sens. Dans une situation où quatre groupes appuient la politique du gouvernement et sont prêts à soutenir la fixation de délai pour mettre fin aux débats parce qu’ils estiment que ceux-ci leur font perdre un temps précieux, les nouvelles règles donneraient à l’opposition un cinquième du temps de parole au cours du débat. J’en profite pour rappeler clairement, chers collègues, que quatre des cinq leaders sont d’accord pour que le sénateur Gold fixe un délai pour la motion dont nous débattons en ce moment.
En quoi serait-il juste d’accorder 2 heures pour soutenir le gouvernement, mais 30 minutes pour s’y opposer? Je vous rappelle, chers collègues, que dans un tel scénario, il ne reste à l’opposition qu’un temps limité pour exprimer son point de vue avant que la volonté du gouvernement ne se concrétise. Comble d’insulte, la motion du sénateur Gold réduirait davantage la capacité qu’a l’opposition de s’exprimer.
Le point suivant de la motion du sénateur Gold porte sur la durée de la sonnerie et la possibilité de reporter les votes. L’article 13 de la motion remplace la règle actuelle sur la durée de la sonnerie : selon cette nouvelle version, le Président devra demander aux représentants de 5 groupes s’ils se sont mis d’accord sur la durée de la sonnerie. Je ne sais pas pourquoi le gouvernement a choisi d’inclure 5 groupes plutôt que tous les groupes reconnus. Pourquoi faudrait-il demander à 5 représentants différents s’ils se sont mis d’accord, au lieu de le demander au whip du gouvernement?
Je vous rappelle que, de toute façon, il faut le consentement du Sénat pour accepter cet accord. Même selon le Règlement actuel, un groupe qui n’a pas été consulté ou qui n’est pas d’accord sur la durée de la sonnerie pourrait contrecarrer tout accord.
Je ne sais pas ce que cette modification du Règlement ajoute, si ce n’est qu’elle prolonge les débats avant que la présidence puisse convoquer les sénateurs. Le gouvernement Trudeau est un expert de renommée mondiale en matière d’étalage de vertu. Ce n’en est qu’un exemple de plus.
Il prétend donner à certains groupes parlementaires de nouveaux pouvoirs qu’ils ont déjà. Dans son discours, le sénateur Gold a déclaré :
Il faudra obtenir l’accord des whips et des agents de liaison des trois principaux groupes, ainsi que du gouvernement et de l’opposition, pour modifier la durée par défaut de la sonnerie lors des votes par appel nominal. Actuellement, cette procédure est réservée au gouvernement et à l’opposition. La majorité n’est pas représentée.
Comme je l’ai dit, ce n’est pas vrai. Pour modifier la durée de la sonnerie, il faut l’accord de facto de tous les sénateurs. Le sénateur Brazeau et la sénatrice McCallum, qui siègent en tant que sénateurs non affiliés, ont le droit de le faire, de se lever pour exprimer leur désaccord, et il y a une sonnerie d’une heure. Lorsque la présidence demande si on s’est entendu sur la durée de la sonnerie, tous les sénateurs doivent être d’accord.
Ensuite, à l’article 14 de sa motion, le sénateur Gold donne à cinq groupes le droit de reporter le vote. Je ne sais pas pourquoi il pense que des entités autres que le gouvernement et l’opposition auraient besoin de ce droit, si ce n’est que pour allonger la liste des prétendus pouvoirs qui seraient accordés au Groupe des sénateurs indépendants, au Groupe des sénateurs canadiens et au Groupe progressiste du Sénat. Puisque ces modifications portent supposément sur les procédures qui font perdre du temps, je ne suis pas convaincu que le fait d’accorder le droit de reporter le vote à un plus grand nombre de personnes nous fera vraiment gagner du temps.
Puis, il y a les modifications apportées à l’article 17 de la motion qui confèrent le statut de membre d’office des comités à trois autres leaders. Tous les sénateurs peuvent assister aux réunions des comités énoncés à l’article 17. Les trois leaders ont déjà ce droit.
Cette modification porte sur le droit de recevoir des documents et de présenter des motions. Ne serait-il pas plus simple d’avoir une règle permettant aux leaders d’obtenir les documents des comités? En ce qui concerne le droit de proposer des motions, tous les groupes reconnus ont des représentants au sein des comités. Un leader peut être remplacé à tout moment au cours d’une réunion. Cette modification du Règlement est-elle vraiment nécessaire ou vise-t-elle uniquement à tromper les apparences en nous faisant croire que le gouvernement accorde réellement des pouvoirs à des tiers?
Ce changement a des conséquences bien réelles pour le Parti conservateur. Comme je l’ai dit précédemment, nous avons un groupe qui s’oppose au gouvernement libéral et quatre groupes dont une majorité de membres a voté en faveur du gouvernement dans le cadre du vote le plus important, celui portant sur le budget. On peut donc dire que nous sommes à quatre contre un.
Avec ce changement, un comité composé de 12 membres réguliers pourrait voir son nombre de membres augmenter avec 5 membres d’office pour atteindre 17 membres. À l’heure actuelle, les conservateurs disposent de deux sièges au sein de ces comités. La modification au Règlement permettra d’ajouter 3 leaders de groupes soutenant le gouvernement, ce qui fait que le clivage passera de 11 contre 3 à 14 contre 3. Je crois comprendre que les leaders ne voteront pas, mais le temps de parole et la capacité des sénateurs de l’opposition à poser des questions seront réduits.
Plus inquiétant encore pour les conservateurs, les membres d’office sont pris en compte dans le calcul du quorum. Selon le nouveau système du sénateur Gold, il pourrait y avoir une réunion de comité à laquelle seuls le leader du gouvernement et les leaders du Groupe des sénateurs indépendants, du Groupe des sénateurs canadiens et du Groupe progressiste du Sénat participeraient et il y aurait quorum. Il n’y aurait aucun membre du comité, aucune membre de l’opposition, et le sénateur Gold détiendrait le seul vote.
Chers collègues, est-ce quelque chose que nous souhaitons appuyer? Est-ce quelque chose que le gouvernement a l’audace de nous présenter en pensant que nous ne lirons pas le document? Est‑ce l’idée que le gouvernement se fait d’un processus démocratique? C’est un nouveau concept : l’examen article par article des projets de loi du gouvernement, avec seulement le leader du gouvernement qui vote. Wow!
J’aimerais être ici après les prochaines élections, être le leader du gouvernement et être le seul à voter. Je remporterais tous les votes. Ou du moins, ce serait proche.
Ce n’est peut-être pas l’intention du gouvernement, mais c’est l’une des conséquences de cette mesure. Je suis désolé de marteler ce point, mais sauter l’étape de l’étude en comité signifie que nous ne pouvons pas discuter longuement de la façon dont nous pouvons accorder des pouvoirs supplémentaires, comme la réception de documents, à des groupes autres que le gouvernement et l’opposition sans ouvrir la porte à des scénarios où des voix dissidentes pourraient être exclues des délibérations du comité.
Viennent ensuite les réunions de comité. L’article 19 de la motion permettrait aux comités de se réunir un lundi où le Sénat ne siège pas avant un mardi où le Sénat siège. Il pourrait s’agir de jours fériés comme l’Action de grâces ou la fête de la Reine. Est-ce un oubli, ou est-ce que c’est ce que le sénateur Gold a en tête : la capacité de la majorité non conservatrice de forcer un comité à siéger pendant un congé?
De plus, selon le libellé de la motion, n’importe quel comité peut siéger un lundi. Cette mesure ne devrait-elle pas se limiter aux comités qui siègent régulièrement le lundi et à leurs plages horaires habituelles? Autrement, le vendredi, un président pourrait convoquer une réunion le lundi suivant, — ce que les sénateurs n’auraient pas prévu — et ce qui les obligerait à se précipiter pour se rendre à Ottawa.
En quoi est-ce juste, chers collègues?
N’oubliez pas que si vous votez en faveur de cette motion, vous pourriez être la personne qui devra prendre des dispositions un vendredi alors que vous avez prévu quelque chose pour la fin de semaine et vous devrez être ici le lundi.
La motion du sénateur Gold met en place un mécanisme qui permettra aux sénateurs nommés par Trudeau de tenir des réunions du comité en l’absence des conservateurs, et ce mécanisme sera en vigueur non seulement pendant la période d’un an environ où Trudeau restera au pouvoir, mais aussi bien longtemps après les élections.
À l’article 20 de la motion, le sénateur Gold ajoute le Groupe des sénateurs indépendants en tant que comotionnaire de la motion portant création du Comité permanent sur l’éthique et les conflits d’intérêts des sénateurs. En pratique, qu’est-ce que cela change? Il s’agit simplement d’une réduction symbolique du rôle de l’opposition.
Enfin, à l’article 23 de la motion, le sénateur Gold modifie la définition de l’expression « leader du gouvernement ». C’est assez intéressant.
Dans sa décision du 25 avril 2023, le Président Furey a déclaré que le sénateur Gold est le leader du gouvernement. Il est le chef du parti du gouvernement. C’est pourquoi il pouvait recourir aux dispositions du Règlement du Sénat qui portent sur la fixation des délais.
Soit ce changement est purement pour les apparences — un changement symbolique qui n’a aucun effet en réalité puisque la situation du sénateur Gold correspond à la définition actuelle de « leader du gouvernement » —, soit il y a un réel besoin de changer la définition, et alors c’est un aveu que la décision du Président Furey était sans fondement.
Chaque fois que le sénateur Gold essaie de défendre l’idée d’un chef qui ne fait pas partie du groupe qu’il dirige, ou d’un représentant qui ne soutient pas nécessairement ce qu’il représente, cela me fait penser qu’au fond, il a honte de représenter ce gouvernement inepte, et je ne l’en blâmerais pas. Il essaie de nous faire croire qu’il est une sorte de membre non partisan d’un groupe partisan, qu’il fait partie d’un gouvernement dirigé par un parti politique qu’il soutient plus ou moins. Il assiste aux réunions du Cabinet, mais ne participe pas à ses décisions. C’est un touriste. Le sénateur Gold voudrait nous faire croire qu’il n’est qu’un spectateur, un témoin de l’accident de voiture de Trudeau, comme le reste d’entre nous.
Je suis désolé, mais je n’y crois pas.
En parlant du sénateur Gold, j’aimerais saisir l’occasion pour corriger certaines des inexactitudes de son discours.
Le sénateur Gold a fait référence à plusieurs reprises aux modifications de la Loi sur le Parlement du Canada qui ont été adoptées dans le cadre du projet de loi C-19, Loi no 1 d’exécution du budget de 2022. Dans son discours, il a déclaré :
Pour mettre en œuvre ces changements, l’organisme de réglementation doit adopter des règlements d’application. En d’autres termes, le Sénat doit adopter un ensemble révisé de règles. Autrement, les modifications à la Loi sur le Parlement du Canada demeureront un tigre de papier et une vaine promesse.
Le problème est que ce n’est pas ce que le gouvernement dit depuis trois ans.
Sénateurs, vous vous souviendrez que les modifications incluses dans la loi d’exécution du budget de 2022 ont affecté des crédits supplémentaires à certains des postes de leader du Groupe des sénateurs indépendants, du Groupe des sénateurs canadiens et du Groupe progressiste du Sénat. Les sénateurs conservateurs n’étaient pas opposés à ces modifications. Elles reflétaient le fait qu’il y a trois groupes organisés dirigés par des sénateurs pour lesquels cela représente des responsabilités supplémentaires. Il est juste qu’ils soient rémunérés comme le sont les leaders des partis qui ne forment ni le gouvernement ni l’opposition à la Chambre des communes.
Le projet de loi C-19 était la troisième tentative de modifier la Loi sur le Parlement du Canada au cours de la présente législature, après que le projet de loi S-2 a été rejeté par le Président de la Chambre des communes et que le projet de loi C-7 n’a jamais abouti. En outre, le gouvernement avait déposé ce projet de loi, alors appelé S-4, au cours de la dernière législature. C’est aujourd’hui le troisième anniversaire du dépôt du projet de loi S-4.
Le gouvernement a donc déposé quatre projets de loi pour apporter ces changements. Ces projets de loi n’ont jamais eu pour conséquence de modifier le Règlement. En fait, il n’a jamais été question de modifications spécifiques au Règlement au cours des délibérations sur ces quatre projets de loi.
Si, comme le dit le sénateur Gold, ces modifications à la Loi sur le Parlement du Canada nécessitaient des changements au Règlement, pourquoi le gouvernement a-t-il attendu trois ans avant de les proposer? Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas fait circuler les changements proposés lorsque ces projets de loi ont été débattus?
C’est parce qu’il n’y a aucun lien entre l’augmentation des salaires de certains sénateurs et le contenu de la motion no 165.
Le ministre Dominic LeBlanc a témoigné en mai 2021 devant notre comité plénier dans le cadre du débat sur le projet de loi S-4. Il n’a jamais fait allusion à des changements au Règlement pour donner plus de pouvoirs au Groupe des sénateurs indépendants ou pour diluer les pouvoirs de l’opposition. Permettez-moi donc d’être clair : le sénateur Gold a tort lorsqu’il affirme que ces changements sont liés à la Loi sur le Parlement du Canada. Il a inventé cela de toutes pièces.
Une autre inexactitude que l’on trouve dans le discours du sénateur Gold du 18 avril 2024 est l’idée que certains sénateurs ne peuvent pas participer pleinement aux débats. Il a déclaré que « […] le Règlement tel qu’il existe actuellement rend de plus en plus difficile la participation pleine et entière de tous les sénateurs ».
Il a dit que notre système « […] exclut une majorité absolue de sénateurs ».
Je suppose qu’au fond de lui-même, il savait qu’il était allé trop loin, car il s’est ensuite corrigé, reconnaissant que tous les sénateurs sont égaux, et que notre Règlement le reflète. Permettez-moi de faire quelques remarques à ce sujet.
Premièrement, il est faux de dire qu’il y a un frein à la participation des sénateurs et que ceux-ci sont en quelque sorte exclus. Depuis 2016, nous avons toujours trouvé des moyens d’inclure tous les sénateurs. Tout le monde peut siéger à un comité. Tous les sénateurs peuvent intervenir dans le débat sur n’importe quel sujet. Tous les sénateurs peuvent voter comme ils le souhaitent. Tout le monde peut se joindre, ou non, à un groupe, à l’exception des sénateurs nommés par Trudeau qui ne peuvent pas se joindre au caucus conservateur du Sénat. Ce n’est pas en raison du Règlement. Cela a toujours été le cas.
Dans l’édition de juin 2015 de La procédure du Sénat en pratique, on peut lire que :
Les sénateurs qui ne sont pas membres du gouvernement ou de l’opposition peuvent participer à part entière aux travaux du Sénat et être nommés au sein des comités.
C’était en juin 2015, avant que Justin Trudeau soit élu premier ministre et avant que le sénateur Harder devienne le premier représentant de Justin Trudeau au Sénat. C’est un autre exemple de cette manœuvre des libéraux, qui consiste à présenter comme nouvelle une chose qui existe déjà.
Deuxièmement, le fait que votre leader ait un temps de parole illimité — ou pas —, qu’il reçoive plus d’argent — ou pas — et que votre whip puisse faire reporter un vote — ou pas — n’a rien à avoir avec votre capacité à participer pleinement aux travaux du Sénat. La motion no 165 ne vise pas à donner des pouvoirs aux leaders du Groupe des sénateurs indépendants, du Groupe des sénateurs canadiens ou du Groupe progressiste du Sénat et elle ne vise pas à donner plus de pouvoirs aux sénateurs non affiliés.
Les sénateurs non affiliés ne doivent pas oublier qu’ils n’obtiennent rien au moyen de cette motion et c’est normal, car ils sont déjà égaux aux autres sénateurs, comme l’a souligné le sénateur Gold lui-même.
Je veux le répéter clairement une fois de plus : le sénateur Gold a tort de prétendre que ces changements donneront à certains sénateurs l’occasion de participer plus pleinement aux travaux du Sénat, parce que tous les sénateurs peuvent déjà participer à toutes les activités et les changements proposés ne changeront rien à la capacité des sénateurs non affiliés de participer aux travaux du Sénat.
Le sénateur Gold a dit dans son discours que l’un des objectifs de cette règle est de rendre le Sénat moins partisan. Comme je l’ai expliqué plus tôt, rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité.
La modification unilatérale du Règlement par le sénateur Gold est une manœuvre partisane, et c’est une première dans l’histoire du Canada. Je suis certain que ça lui démange d’en rajouter et d’imposer la fixation de délai pour s’assurer que ses désirs deviennent des réalités. Ce n’est pas vraiment un bon départ pour ce nouveau Sénat moins partisan que vous voulez.
Vous verrez que le Groupe des sénateurs indépendants se transformera en un nouveau caucus libéral au Sénat, comme je l’ai déjà dit. Il n’y aura pas moins de discours partisans; c’est simplement que le point de vue des libéraux sera exprimé deux fois.
Lorsque le gouvernement de Pierre Poilievre tentera de faire adopter ses projets de loi, ces deux caucus libéraux travailleront sans aucun doute à l’unisson contre lui. Ce sera le retour à la nature excessivement partisane du Sénat, quand le gouvernement en place est confronté à une opposition majoritaire et déterminée au Sénat, comme en 1896, en 1911 et en 1984, pour ne citer que quelques exemples. Rien dans les changements proposés ne réduira la partisanerie à ce moment-là. Au contraire, les nouvelles règles ne feront que l’exacerber.
Je tiens encore une fois à être bien clair : le sénateur Gold a tort de prétendre que ces changements réduiront la partisanerie au Sénat.
Toujours sur l’analyse de son discours du 18 avril, j’ai été surpris d’entendre le sénateur Gold prétendre que l’opposition est un concept relativement nouveau au Sénat.
Le fait que la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1867 contenait les noms de conservateurs et de libéraux devant être nommés sénateurs est la preuve qu’il n’y a jamais eu d’intention d’avoir un Sénat non partisan. La reine Victoria aurait pu nommer des hommes non affiliés à des partis politiques, ou du moins faire comme Justin Trudeau et prétendre le faire. Elle a fait le contraire. Les libéraux ont siégé dans l’opposition pendant les deux premiers mandats. Quand Alexander Mackenzie et les libéraux sont arrivés au pouvoir en 1874, les sénateurs libéraux ont fait partie du gouvernement.
Je tiens à rassurer le sénateur Gold en lui disant que le poste de leader de l’opposition au Sénat remonte à 1867. Luc Letellier de Saint-Just — un bon libéral — a été le premier à occuper ce poste. Le poste que j’occupe existe depuis aussi longtemps que celui du sénateur Gold.
Là encore, je veux être bien clair : le sénateur Gold a tort de prétendre que l’opposition au Sénat est un nouveau concept; ses attaques contre l’opposition ne sont qu’un retour aux sources du Sénat.
En ce qui concerne le premier leader de l’opposition, qui est devenu leader du gouvernement au Sénat quelques années plus tard, il était réputé pour avoir la langue bien pendue. Je ne pense pas que le sénateur Gold avait raison lorsqu’il a déclaré que le Sénat n’avait pas été créé dans l’intention de reproduire simplement les arguments très partisans de l’autre endroit. Bien que le hansard ait été rédigé de manière très aseptisée à l’époque, mon équipe m’a montré un extrait de l’une des interventions du sénateur Saint-Just, où il disait de l’un de ses collègues qu’il n’avait « ni l’énergie ni les aptitudes nécessaires », qu’il avait « ruiné la Compagnie de chemin de fer du Grand Tronc », qu’il était « démoniaque » et qu’il était « coupable d’un égoïsme formidable ». Tout cela en un seul discours. Aujourd’hui, des conservateurs ont été priés de quitter la Chambre des communes parce qu’ils ont qualifié le premier ministre de ce qu’il est vraiment : un raciste. Le mythe de l’ancien Sénat rempli de gentlemen débattant courtoisement au-delà de tout esprit partisan n’est rien d’autre que cela : un mythe.
En conclusion — je sais que vous attendiez ces mots —, une chose qui a changé au Sénat sous Justin Trudeau, c’est l’idée que le Règlement doit être modifié par consensus.
Le gouvernement a dit clairement que son programme ne changera pas et qu’il faut limiter le débat. À en croire le gouvernement Trudeau et ses partisans au Sénat, rien n’est plus urgent que de changer le Règlement du Sénat. Les Canadiens attendent avec impatience qu’on change le Règlement. Peu importe si j’ai mille et une choses à dire à ce sujet, les gens attendent ces changements avec impatience. À en croire le gouvernement Trudeau et ses partisans, il n’y a rien de plus urgent. Les Canadiens attendent avec impatience de voir si le sénateur Gold sera en mesure de donner à Justin Trudeau son cadeau de départ : un Sénat contrôlé par ses sénateurs.
Les gens de partout au pays qui doivent attendre des heures aux urgences doivent aussi attendre avec impatience de savoir si la sénatrice Saint-Germain aura plus de 45 minutes de temps de parole. C’est un enjeu important pour les gens de partout au pays. Les gens qui font la file à la banque alimentaire se demandent sûrement si le Groupe progressiste du Sénat et le Groupe des sénateurs canadiens ont le droit de reporter un vote. Les gens qui produisent leur déclaration de revenus aujourd’hui doivent se dire qu’ils sont très heureux de payer autant d’impôt sur le revenu et que, bientôt, au Sénat, plus de sénateurs auront plus de temps pour faire l’éloge de Justin Trudeau.
Au deuxième jour du débat, avant même qu’un deuxième sénateur n’ait eu la possibilité de s’exprimer, le gouvernement menace de recourir à la fixation de délai. Au lieu de nous permettre de présenter des amendements, le sénateur Gold utilisera la méthode forte pour clore le débat. Son idée est faite : il fera adopter cette motion coûte que coûte.
La seule bonne nouvelle, comme je l’ai dit, c’est qu’on peut espérer qu’il s’agit de la dernière attaque du gouvernement Trudeau contre le Sénat. Les Canadiens attendent ce changement avec impatience, ces mêmes personnes aux urgences, qui font la file à la banque alimentaire ou qui sont en train de remplir leur déclaration de revenus à la maison n’en peuvent plus d’attendre. En fait, ils attendent tout autre chose : les Canadiens donneront bientôt un mandat écrasant à Pierre Poilievre et aux conservateurs pleins de bon sens, qui pourront alors nommer des sénateurs chargés de réparer ce Sénat brisé et fracturé. La tâche qui les attend est colossale, mais je suis convaincu que les sénateurs qui seront toujours en poste comprendront le bon sens et décideront qu’il nous faut un Sénat plus efficace, indépendant et responsable, au service de tous les Canadiens.
Je vous remercie, chers collègues.
Je me demande si le sénateur Plett accepterait de répondre à une question.
Le sénateur Plett répondra volontiers à une question.
Sénateur, je partage votre point de vue sur les impacts à long terme que ces changements auraient sur le Sénat, mais j’aborde la question sous un angle différent. À la lumière de l’histoire récente du Canada, je crains qu’en cas de changement de gouvernement — comme vous le savez, un gouvernement est élu et réélu… Les gens sont à l’aise maintenant que le Sénat compte un si grand nombre de sénateurs nommés par le gouvernement actuel, mais cela changerait. D’après mon expérience, et probablement d’après la vôtre aussi, les choses changent avec une rapidité surprenante. Les gens partent pour toutes sortes de raisons : une situation personnelle, un membre de la famille qui a besoin d’eux à la maison, voire le désenchantement par rapport aux décisions du gouvernement au pouvoir, soit parce qu’ils ont un point de vue différent, soit parce qu’ils sont d’un autre parti. Le taux de roulement au Sénat est élevé; personne ne peut prédire l’avenir, mais si les conservateurs remportent les élections, il y aura des changements.
Des changements deviennent possibles. Comme je ne vois pas l’équation sous le même angle que vous, je pense aux changements que votre parti pourrait apporter, puis je les multiplie par deux, et c’est mon pire cauchemar. Cependant, cela est fait parce que nous changeons ce qui, comme vous l’avez bien noté, a toujours été une formule de consensus depuis 1867.
Ma question est la suivante : compte tenu de l’intérêt de la majorité des sénateurs pour certaines modifications au Règlement, et compte tenu de la frustration que de nombreux sénateurs ressentent parce que ce Règlement n’a pas été modifié, pouvez-vous et voulez-vous entamer des négociations au cours des prochaines semaines afin de déterminer quels changements seraient acceptables pour votre groupe parlementaire alors que nous orientons le Sénat dans une autre direction?
Je vous remercie, sénateur Downe. La réponse courte est oui. Toutefois, permettez-moi d’apporter quelques précisions. Premièrement, votre pire cauchemar est mon rêve le plus fou. Au moins, nos subconscients seront occupés par le même problème.
Oui, je serais tout à fait disposé à le faire, et nous l’étions. Je suis convaincu que certains membres du Comité du Règlement vous diront dans le cadre du débat que des concessions ont été faites pendant les travaux du comité. Toutefois, pour le sénateur Gold, c’est tout ou rien, comme il l’a clairement exprimé. Il y a un certain nombre de points sur lesquels nous sommes prêts à négocier. Lors d’une réunion de Comité du Règlement à laquelle j’ai participé il y a quelques semaines, j’ai clairement dit que je suis tout à fait favorable à certaines des modifications proposées. Toutefois, ce n’est pas la façon de faire. C’est tout ou rien. Aujourd’hui encore, je l’ai entendu à d’autres réunions auxquelles j’ai assisté : c’est une question de vie ou de mort. C’est aujourd’hui ou jamais. Tout ce qui est proposé doit être adopté dès maintenant. Ce n’est pas ainsi qu’on procède, sénateur Downe. Je pense que vous en conviendrez à tout le moins. Merci.
Honorables sénateurs, il est 18 heures. Conformément à l’article 3-3(1) du Règlement, je suis obligée de quitter le fauteuil jusqu’à 20 heures, moment où nous reprendrons nos travaux, à moins que vous souhaitiez ne pas tenir compte de l’heure.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, de ne pas tenir compte de l’heure?
Des voix : D’accord.
Des voix : Non.
Son Honneur la Présidente : J’ai entendu un « non ».
Honorables sénateurs, le consentement n’a pas été accordé. Par conséquent, la séance est suspendue, et je quitterai le fauteuil jusqu’à 20 heures.