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ILLE - Comité spécial

Drogues illicites (spécial)

 

COMMUNIQUÉ

Le comité spécial du Sénat sur les drogues illicites


LE COMITÉ SÉNATORIAL RECOMMANDE LA LÉGALISATION DU CANNABIS

OTTAWA, le 4 septembre 2002 – Le Comité sénatorial spécial sur les drogues illicites a rendu public aujourd’hui son rapport final sur le cannabis. Au terme d’une étude approfondie de deux ans de la politique gouvernementale relative à la marijuana, le Comité spécial en est arrivé à la conclusion que la drogue devrait être légalisée. Le rapport sénatorial de plus de 600 pages est le fruit de recherches rigoureuses, d’une analyse en profondeur et de nombreuses audiences publiques avec des experts et des citoyens à Ottawa et dans des collectivités de toutes les régions du Canada. 

« Les preuves scientifiques recueillies nous donnent toutes les raisons de croire que le cannabis est beaucoup moins nocif que l’alcool et qu’il devrait être traité non pas comme une question criminelle, mais comme une question sociale et de santé publique », a indiqué le sénateur Pierre Claude Nolin, président du Comité spécial, lors d’une conférence de presse aujourd’hui à Ottawa. « En fait, des experts nationaux et internationaux et des Canadiens de toutes les couches sociales nous ont dit clairement que nous ne devrions pas imposer de dossier criminel aux utilisateurs ni interdire indûment l’usage personnel du cannabis. Mais ne vous y trompez pas, nous n’approuvons pas l’usage du cannabis à des fins récréatives. Il s’agit d’un choix personnel qui ne devrait pas faire l’objet de sanctions criminelles. Nous en sommes cependant arrivés à la conclusion que la marijuana devrait être, en tant que drogue, réglementée par l’État tout comme la bière et le vin, d’où notre préférence pour la légalisation plutôt que pour la décriminalisation. » 

Le rapport du Sénat renferme de nombreuses observations, dont celles‑ci :

·         Le gouvernement du Canada devrait adopter une politique intégrée sur les risques et les méfaits des substances psychoactives portant sur l’ensemble des substances, y compris le cannabis, les médicaments, l’alcool, le tabac et les drogues illégales, et axée sur l’éducation des consommateurs, la détection et la prévention des usages à risque et le traitement des usages excessifs.

·         En matière de cannabis, il faudrait proscrire uniquement les comportements qui causent un tort démontrable à autrui : trafic illégal, vente à des jeunes de moins de seize ans et conduite avec facultés affaiblies.

·         Il y aurait lieu d’adopter une loi prévoyant un régime d’exemption du cannabis qui prévoirait les conditions d’obtention des licences ainsi que de production et de vente, des sanctions pénales pour trafic illégal et exportation, et le maintien des sanctions criminelles pour toute activité qui ne serait pas conforme au régime d’exemption.

·         Les dispositions actuelles se rapportant à l’usage de la marijuana à des fins médicales sont inefficaces et il faudrait les réviser pour faciliter l’accès à la drogue à ceux qui en ont besoin.

·         Il faudrait offrir l’amnistie à toute personne condamnée pour possession simple de cannabis en vertu de la loi actuelle ou des lois antérieures. 

Le Comité spécial propose dans son rapport différentes initiatives pour la mise en œuvre de ses recommandations, dont celles‑ci :

·         la création, au sein du Bureau du Conseil privé, d’un poste de conseiller national sur les substances psychoactives et les dépendances;

·         une conférence de haut niveau en 2003 regroupant les acteurs clés des provinces, territoires, municipalités et associations pour fixer des objectifs et des priorités d’action;

·         la création d’un Centre canadien sur les drogues et les dépendances qui aurait un mandat clair, disposerait de fonds adéquats et ferait rapport au Parlement et qui inclurait un Observatoire canadien sur les substances psychoactives et les dépendances chargé de mener des études en collaboration avec les provinces et les territoires et de déposer un rapport bisannuel sur les tendances d’usage et les problématiques émergentes;

·         l’apport de modifications au Règlement sur l’accès à la marijuana à des fins médicales pour qu’il prévoie de nouvelles règles concernant l’admissibilité, la disponibilité, la production et la distribution de cannabis à des fins thérapeutiques;

·         la modification du Code criminel pour abaisser le seuil d’alcoolémie à 40 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang lorsqu’il y a présence de drogues, notamment mais pas exclusivement de cannabis;

·         la demande par le Canada de modifications aux conventions et traités des Nations Unies réglementant les drogues illicites et l’appui à la création d’un Observatoire des drogues et des dépendances pour les Amériques. 

Le Comité a également examiné les obligations internationales du Canada et les répercussions de ses politiques en matière de cannabis, de même que l’approche adoptée par d’autres pays. Il a étudié l’incidence de politiques plus libérales concernant le cannabis dans des pays comme les Pays-Bas, la Suisse et l’Espagne, ainsi que de politiques plus restrictives comme celles de la Suède, de la France ou des États-Unis. Une tendance à la réévaluation de la politique nationale en matière de drogues se dessine clairement, comme en font foi les récentes initiatives en faveur de la décriminalisation au Royaume-Uni Selon le sénateur Colin Kenny, vice-président du Comité, « ce que nous recommandons pour notre pays aura un impact sur nos amis et voisins, mais le Canada doit prendre ses propres décisions en fonction de l’intérêt de ses citoyens ». 

Le Comité sénatorial spécial sur les drogues illicites est présidé par le sénateur Pierre Claude Nolin et le sénateur Colin Kenny en est le vice-président. Les sénateurs Tommy Bands, Shirley Maheu et Eileen Rossiter en font également partie. Le Comité a un site Web à l’adresse /illegal-drugs.asp. où il est possible de consulter les délibérations, les témoignages, les travaux de recherche, des informations générales et son rapport.


Pour de plus amples renseignements, contacter:

David Newman Jean-Guy Desgagné
Téléphone : (613) 836-6039 No télépnone : (613) 791-7936
Téléphone cellulaire : (613) 795-1739
Télécopieur : (613) 836-5370
Courrier électronique : dnewman@sympatico.ca

RECOMMANDATIONS

Recommandation 1
Le Comité recommande que soit créé, au sein du Bureau du Conseil privé, un poste de Conseiller national sur les substances psychoactives et les dépendances ; que ce conseiller soit appuyé d’un petit secrétariat ; et que chaque ministère et organisme fédéral concerné par les substances psychoactives détachent auprès de ce secrétariat et à sa demande, le personnel nécessaire.
Recommandation 2

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada mandate le Conseiller national sur les substances psychoactives et les dépendances  à convoquer pour 2003 une conférence nationale de haut niveau regroupant les acteurs clés des provinces, territoires, municipalités et associations, pour fixer des objectifs et des priorités d’action en matière de substances psychoactives sur un horizon de cinq ans.

Recommandation 3

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada modifie la législation habilitante du Centre canadien de lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies pour en changer l’appellation pour Centre canadien sur les substances psychoactives et les dépendances ; en faire un organisme relevant du Parlement du Canada ; doter cet organisme d’un budget de fonctionnement annuel de base de 15 millions $ sujet à révision annuelle à la hausse ; exiger de cet organisme qu’il dépose au Parlement fédéral et aux Assemblées et Parlements des provinces et territoires un rapport annuel sur les actions menées, les enjeux soulevés par la pratique, la recherche et les tendances ; mandater cet organisme à assurer la coordination nationale de la recherche sur les substances psychoactives et les dépendances, et à mener certaines études sur des questions spécifiques ; et mandater le Centre à réaliser à tous les cinq ans une évaluation de la stratégie nationale en matière de substances psychoactives et de dépendances.

Recommandation 4

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada inclue spécifiquement dans la législation constituant le Centre canadien sur les drogues et les dépendances la création, au sein du Centre, d’un Observatoire canadien sur les substances psychoactives et les dépendances ; prévoit que cet Observatoire soit mandaté pour mener, à chaque deux ans, en collaboration avec les organismes pertinents, des enquêtes sur les tendances d’usage des drogues et problématiques de dépendances dans la population adulte ; assure avec les provinces et les territoires l’harmonisation des études en population étudiante et leur régularité aux deux ans ; mène des études ponctuelles sur des sujets spécifiques ; et dépose un rapport bisannuel sur les tendances d’usage et les problématiques émergentes.

Recommandation 5

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada adopte une politique intégrée sur les risques et les méfaits des substances psychoactives portant sur l’ensemble des substances (médicaments, alcool, tabac et drogues illicites).  En matière de cannabis, cette politique sera axée sur l’éducation des consommateurs, la détection et la prévention des usages à risque et le traitement des usages excessifs. 

Recommandation 6

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada modifie la Loi réglementant certaines substances et autres drogues dans le but de créer un régime d’exemption criminelle.  Cette loi prévoira : les conditions d’obtention des licences ainsi que de production et de vente ; des sanctions pénales pour le trafic illégal et l’exportation ; et le maintien des sanctions criminelles pour toute activité ne se conformant pas au régime d’exemption. 

Recommandation 7

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada adopte une loi d’amnistie pour toute personne condamnée pour possession simple de cannabis en vertu de la Loi actuelle et des lois précédentes. 

Recommandation 8

Le Comité recommande que le Règlement sur l’accès à la marihuana à des fins médicales soit modifié afin de prévoir des nouvelles règles concernant l’admissibilité, la production et la distribution de cannabis aux fins thérapeutiques.  De plus, la poursuite de la recherche sur le cannabis thérapeutique est essentielle. 

Recommandation 9

Le Comité recommande que le Code criminel soit modifié pour abaisser le seuil d’alcoolémie à quarante milligrammes d'alcool par cent millilitres de sang lorsqu’il y a présence de drogues, notamment mais pas exclusivement de cannabis ; et pour admettre en preuve le témoignage de policiers experts formés à la reconnaissance de conduite sous l’influence de drogues.

Recommandation 10

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada constitue un fonds national de la recherche sur les substances psychoactives et les dépendances qui permettra de financer la recherche sur des questions clés et notamment sur les diverses formes d’usages, sur les applications thérapeutiques du cannabis, sur les outils de détection de la conduite sous influence, sur les programmes de prévention et de traitement efficaces ; et que le Gouvernement du Canada mandate le Centre canadien sur les substances psychoactives et les dépendances pour coordonner l’effort national de recherche et agir comme centre de ressources.

Recommandation 11

Le Comité recommande que le Gouvernement du Canada instruise le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international d’informer les autorités compétentes des Nations Unies qu’il demande la modification des Conventions et Traités réglementant les drogues illicites relativement au cannabis ; et qu’il soutienne le développement d’un Observatoire des drogues et des dépendances pour les Amériques.


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