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Le Budget des dépenses de 2020-2021

Étude du Budget principal des dépenses et du Budget supplémentaire des dépenses (A) en comité plénier

23 juin 2020


La présidente [ + ]

Honorables sénateurs, le Sénat s’est formé en comité plénier afin d’étudier les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2021 et dans le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2021.

Honorables sénateurs, durant un comité plénier, les sénateurs s’adressent à la présidente, mais ne sont pas obligés de se lever. Conformément au Règlement, le temps de parole est de 10 minutes — questions et réponses y comprises. Cependant, tel qu’ordonné plus tôt aujourd’hui, si un sénateur n’utilise pas tout son temps de parole, il peut céder le temps qu’il lui reste à un autre sénateur. Comme l’a ordonné le Sénat, le comité accueillera le ministre des Finances et le président du Conseil du Trésor. Je les invite maintenant à entrer, accompagnés de leurs fonctionnaires.

(Conformément à l’ordre adopté par le Sénat, l’honorable Bill Morneau et l’honorable Jean-Yves Duclos et les fonctionnaires qui les accompagnent prennent place dans la salle du Sénat.)

La présidente [ + ]

Messieurs les ministres, j’ai le plaisir de vous accueillir au Sénat. Je vous invite à présenter vos fonctionnaires et à faire vos observations préliminaires d’au plus cinq minutes.

L’honorable Jean-Yves Duclos, c.p., député, président du Conseil du Trésor [ + ]

Merci beaucoup. Bonjour, j’espère que vous m’entendez bien.

Je suis heureux de comparaître devant le Sénat pour parler du Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2020-2021 et du deuxième projet de loi de crédits provisoires.

Nous traversons une période hors de l’ordinaire marquée non seulement par une pandémie mondiale, mais aussi par des manifestations et des conversations contre le racisme qui ont lieu partout sur la planète. Il s’agit de conversations essentielles que nous devons poursuivre pour arriver à régler des problèmes qui durent depuis trop longtemps.

Le gouvernement est résolu à continuer de bâtir une fonction publique diversifiée qui est le reflet de la population qu’elle sert. Nous sommes résolus non seulement à écouter, mais aussi à agir.

Comme vous le savez, honorables sénateurs, chaque année, le gouvernement dépose le Budget supplémentaire des dépenses, qui décrit ses plans de dépenses.

Le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l’exercice 2020-2021 présente de l’information sur les dépenses nécessaires des institutions fédérales, qui n’étaient pas suffisamment étoffées au moment du dépôt du Budget principal des dépenses ou qui ont été peaufinées par la suite pour prendre en compte les derniers changements.

Le Budget supplémentaire des dépenses propose 6 milliards de dollars en frais de fonctionnement et d’immobilisations, de même qu’en subventions et en contributions, pour 42 institutions fédérales.

Il montre clairement que le gouvernement continue d’investir dans les gens, l’économie, les travailleurs et les entreprises en vue d’assurer le succès et la reprise économique au pays.

Les sénateurs auront l’occasion de voter sur ces crédits après les avoir examinés. Ces crédits visent, entre autres choses, à fournir des services importants aux communautés autochtones, à assurer la sécurité du transport des voyageurs et à soutenir les Forces armées canadiennes. Ils s’ajoutent aux dépenses liées à la COVID-19.

Je tiens à assurer aux sénateurs que le Budget supplémentaire des dépenses contient de l’information sur les dépenses législatives pour que l’on puisse disposer des renseignements les plus complets possible sur les dépenses prévues du gouvernement.

En fait, nous savons que les Canadiens souhaitent que le Parlement soit le plus transparent possible. Par souci de transparence, le document budgétaire renferme des renseignements sur les dépenses autorisées dans le cadre de la Loi sur les mesures d’urgence visant la COVID-19, qui a déjà fait l’objet de négociations, de discussions et de débats et été approuvée à l’unanimité par les parlementaires. En outre, le Budget supplémentaire des dépenses demande également de nouvelles dépenses votées à hauteur de 1,3 milliard de dollars pour répondre aux répercussions de la COVID-19 sur les Canadiens.

Ces nouveaux plans de dépenses comprennent 405,2 millions de dollars pour une stratégie nationale de recherche médicale visant à financer le suivi et le dépistage des cas de COVID-19, la mise au point de vaccins et de thérapies, ainsi que l’amélioration de la capacité du Canada en matière d’essais cliniques et de biofabrication; 302,4 millions de dollars destinés à soutenir les petites et moyennes entreprises; et 274,5 millions de dollars pour les mesures d’intervention d’urgence en matière de recherche et d’innovation sur les contre-mesures médicales.

Madame la présidente, permettez-moi maintenant de passer à la proposition de projet de loi de crédits provisoires supplémentaires, soit le projet de loi de crédits n° 2 pour 2020-2021.

Comme vous le savez, honorables sénateurs, il s’agit du deuxième projet de loi de crédits provisoires supplémentaires pour l’exercice 2020-2021. Ce projet de loi cherche à faire approuver environ 55 milliards de dollars sur les 125 milliards de dollars de montants votés présentés dans le Budget principal des dépenses que les parlementaires étudient actuellement.

Le premier projet de loi de crédits provisoires supplémentaires du gouvernement, le projet de loi de crédits n° 1 pour 2020-2021, a reçu la sanction royale le 13 mars dernier et a permis de fournir 44 milliards de dollars pour appuyer les activités du gouvernement entre les mois d’avril et juin du présent exercice financier.

Cependant, le 20 avril dernier, la Chambre des communes a également adopté une motion permettant de modifier temporairement l’article 81 de notre Règlement. Cette mesure a notamment eu pour conséquence de prolonger l’étude du Budget principal des dépenses jusqu’en décembre, soit sept mois plus tard que ce qui s’est fait habituellement les années précédentes.

Cette mesure exceptionnelle était nécessaire en raison des circonstances extraordinaires provoquées par la propagation de la COVID-19 dans notre pays. Par conséquent, nous avons proposé un deuxième projet de loi de crédits provisoires, qui prévoit 55 milliards de dollars pour soutenir les programmes et les activités des institutions fédérales entre juillet et décembre.

Sans le financement proposé, bon nombre de ces organisations ne seront plus en mesure de continuer de fournir les programmes et les services sur lesquels comptent des millions de Canadiens.

En conclusion, le gouvernement du Canada et les Canadiens demeurent résilients pendant cette crise mondiale.

Les nouveaux plans de dépenses présentés ici continueront d’aider les personnes touchées par la COVID-19 tout en soutenant l’économie et les Canadiens.

Je tiens à reconnaître le travail essentiel et extraordinaire de tous les parlementaires, alors que nous continuons de travailler ensemble pour assurer le bien-être de tous les Canadiens.

J’aimerais maintenant présenter le ministre des Finances, monsieur Bill Morneau, qui n’a en fait pas besoin de présentation, ainsi que les deux fonctionnaires qui nous accompagnent, le ministre des Finances et moi-même : M. Glenn Purves, secrétaire adjoint, Secteur de la gestion des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor, et M. Andrew Marsland, sous-ministre adjoint principal, Direction de la politique de l’impôt, Finances Canada.

Cela dit, c’est avec grand plaisir que nous répondrons à vos questions, honorables sénateurs.

La présidente [ + ]

Merci, monsieur le ministre.

Le sénateur Plett [ + ]

Les questions que je poserai cet après-midi s’adressent au ministre Morneau.

Monsieur le ministre, le mois dernier, lorsque le directeur parlementaire du budget a témoigné devant un comité de l’autre endroit, on lui a demandé si la dette fédérale atteindrait 1 billion de dollars durant l’exercice en cours. Il a répondu que c’était une possibilité, que c’était une hypothèse réaliste et que ce n’était pas inconcevable.

Monsieur le ministre, à combien s’élève la dette actuelle du gouvernement du Canada?

L’honorable Bill Morneau, c.p., député, ministre des Finances [ + ]

Tout d’abord, sénateur, merci beaucoup de la question. C’est un plaisir d’être ici avec vous tous aujourd’hui. Je suis heureux d’avoir l’occasion de répondre à vos questions.

Je crois que la meilleure façon de vous répondre, monsieur le sénateur, serait de dire que nous avons promis de fournir au pays une mise à jour économique et que nous allons le faire le 8 juillet. À ce moment-là, nous allons faire le point sur les sommes que nous avons injectées et sur la situation économique, ce qui nous permettra aussi de présenter les montants de la dette et du déficit.

Le sénateur Plett [ + ]

Monsieur le ministre, on vous a déjà posé cette question auparavant et je crois que les Canadiens ont le droit de connaître la réponse. Je pense que les Canadiens ont le droit de connaître, chaque jour de l’année, l’état des finances de l’État. Ils ont le droit de connaître, chaque jour de l’année, l’état de leurs finances.

Le directeur parlementaire du budget a 42 employés. Le ministre des Finances en a 800. Le directeur parlementaire du budget, avec ses 42 employés, a une bonne idée du montant de la dette nationale.

Monsieur le ministre, puisque vous ne pouvez pas me donner une réponse aujourd’hui, si je vous disais que selon les chiffres que j’ai, la dette s’élève à 1,3 billion de dollars, pourriez-vous me confirmer que c’est un montant assez juste?

M. Morneau [ + ]

Merci beaucoup de la question, sénateur. L’une des choses les plus importantes pour le gouvernement — et certainement pour moi, en tant que ministre des Finances — est de fournir de l’information exacte aux Canadiens. Toutes les deux semaines, nous fournissons au Parlement, au comité des finances — et, bien sûr, nous mettons à la disposition du Sénat — une mise à jour de nos dépenses liées à la COVID-19 et il y aura une description complète de la situation financière courante le 8 juillet prochain. À ce moment-là, nous serons en mesure de vous donner des précisions sur la situation économique courante et nos prévisions pour l’année.

Le sénateur Plett [ + ]

Monsieur le ministre, sauf votre respect, vous êtes ici au Sénat et je pense que nous méritons plus que de nous faire dire que vous allez nous donner une mise à jour économique plus tard; nous méritons une réponse.

Si vous ne pouvez pas confirmer que la dette s’élève à 1,3 billion de dollars, je dois supposer que ce chiffre est juste.

Monsieur le ministre, qui détient la dette?

M. Morneau [ + ]

Tout d’abord, sénateur, je pourrais simplement dire qu’il est important de ne pas émettre d’hypothèses sur un sujet aussi important que les finances du pays.

Le sénateur Plett [ + ]

Nous devons obtenir une réponse, s’il vous plaît.

M. Morneau [ + ]

Comme je l’ai mentionné, nous fournirons une réponse complète le 8 juillet prochain, ce qui sera la meilleure manière pour nous d’aider les Canadiens à bien comprendre la situation.

Pour ce qui est du détenteur de notre dette, il y a, évidemment, de nombreux Canadiens et beaucoup d’investisseurs étrangers qui cherchent à détenir des parts de la dette du Canada en raison de la très haute qualité de notre dette et de notre succès à maintenir une économie saine et forte.

Le sénateur Plett [ + ]

Quelle part de la dette de 1,3 billion de dollars du gouvernement du Canada est détenue par des entités étrangères?

M. Morneau [ + ]

Monsieur, ce serait un réel plaisir pour mon bureau et moi-même de vous fournir de plus amples détails. Je vous prierais de bien vouloir transmettre votre question à mon bureau et demander...

Le sénateur Plett [ + ]

Monsieur le ministre, nous vous avons invité au Sénat pour répondre à certaines questions. Si j’avais voulu me rendre directement à votre bureau pour poser des questions à votre personnel, je l’aurais fait. Quelque 800 personnes travaillent pour vous. Ces employés vous ont certainement averti du montant de la dette du gouvernement du Canada et de la proportion de cette dette qui est ou non détenue par des intérêts étrangers, alors s’il vous plaît, donnez-nous une réponse.

Ce comité plénier a été formé pour nous permettre d’obtenir des réponses. Nous sommes censés approuver un projet de loi de crédits à la fin de la semaine. Vous ne répondez pas à nos questions. Vous nous invitez à votre bureau. Nous vous avons pourtant invité ici. Vous êtes accompagné de membres de votre personnel. Si vous ne pouvez pas répondre à la question, pourriez-vous demander à votre attaché quel est le montant total de la dette du Canada et quel pourcentage de celle-ci est détenu par des intérêts étrangers?

M. Morneau [ + ]

Merci, sénateur, de cette question. Si votre question porte sur des montants précis et des sujets précis sur lesquels nous ne nous sommes pas préparés à l’avance, je ne pense pas qu’il soit indiqué que je vous donne une réponse approximative. Je ne demanderais pas au membre de l’équipe qui m’accompagne de le faire non plus.

Cela dit, je réponds toujours avec plaisir aux questions plus précises quand on les transmet à mon bureau. Je serai heureux de répondre aux questions de nature plus générale, celles qui ne m’obligent pas à demander une réponse plus détaillée à mon ministère.

Le sénateur Plett [ + ]

Il y a quelque temps, à la Chambre, Pierre Poilievre vous a demandé à combien s’élève la dette nationale. Vous avez eu beaucoup de temps pour vous informer de la réponse. Quelle proportion des 1,3 billion de dollars dus par l’État canadien est détenue par des intérêts étrangers? Sous quelles conditions ces emprunts ont-ils été réalisés? Quelle proportion est à échéance fixe?

M. Morneau [ + ]

Pour la gestion du Trésor, le gouvernement cherche toujours à trouver l’équilibre entre les risques de refinancement et les coûts de l’endettement à long terme. Chaque fois que le pays s’endette davantage, le gouvernement s’efforce de prolonger la durée des emprunts et d’en repousser l’échéance afin de réduire au minimum les risques de refinancement.

Le sénateur Plett [ + ]

Je vous remercie. Vous ne savez donc pas quelle part de la dette est détenue par des intérêts étrangers ni quelle part des emprunts est à échéance fixe.

Voyons si vous avez la réponse à la question suivante. Honnêtement, je m’étonne que vous n’ayez pas les réponses parce que vous saviez que nous vous poserions ces questions. L’actif de la Banque du Canada, qui dépasse aujourd’hui les 500 milliards de dollars, a plus que triplé depuis la mi-mars.

Monsieur le ministre, la Banque du Canada s’est-elle dotée d’un plan pour réduire son actif, et si oui, sur quelle période prévoit-elle le faire?

M. Morneau [ + ]

Je crois que vous savez aussi bien que moi, sénateur, que la Banque du Canada est indépendante du gouvernement fédéral. Pour peu qu’elle ait pris la peine de faire des scénarios prévisionnels et de se prêter à un exercice de planification, je suis pas mal certain que j’en serai informé, et vous par la même occasion, quand elle décidera de rendre cette information publique.

Le sénateur Plett [ + ]

Monsieur le ministre, comme vous ne pouvez répondre à aucune de ces questions, je présume que c’est 1,3 billion de dollars. Si ce n’est pas le montant exact, j’espère que nous obtiendrons la réponse avant la tenue du vote sur le projet de loi de crédits plus tard cette semaine. Je m’attends à avoir ces renseignements. Nous devrions avoir toutes les réponses aux questions que j’ai posées avant que nous ne tenions un vote sur un projet de loi de crédits de cette ampleur, lequel n’a été débattu que quatre heures à l’autre endroit. Ici, nous nous acquittons de notre tâche. Nous refusons de laisser le gouvernement nous limiter à un débat de quatre heures. Nous exigeons des réponses. Je suis assez déçu de vous voir comparaître dans notre enceinte sans vous être préparé à me répondre.

Monsieur le ministre, ma prochaine question porte sur l’aide financière d’urgence destinée aux grands employeurs. La seule mise à jour concernant le Crédit d’urgence pour les grands employeurs, présentée dans le rapport bimensuel du 8 juin déposé à l’autre endroit, indique que le portail de demande a été lancé le 30 mai. Or, il y a une semaine, votre ministère a dit aux médias qu’aucune demande n’avait été approuvée pour ce programme. Comment est-ce possible, monsieur le ministre? Vous avez affirmé que le programme avait été conçu pour appuyer le secteur énergétique, qui a grandement besoin d’aide.

Monsieur le ministre, combien de grands employeurs ont présenté une demande de financement dans le cadre de ce programme? Plus précisément, savez-vous combien de grands détaillants, de transporteurs aériens ou de sociétés énergétiques ont fait une demande?

M. Morneau [ + ]

Je vous remercie de votre question. Nous avons créé le Crédit d’urgence pour les grands employeurs afin d’offrir un crédit de dernier recours aux entreprises qui traversent une période difficile.

Le sénateur Plett [ + ]

Monsieur le ministre, je ne veux pas qu’on m’explique en quoi devrait consister le programme. Je veux savoir combien d’employeurs ont présenté des demandes.

M. Morneau [ + ]

Monsieur, je n’avais pas terminé de répondre à la question. À ce sujet, c’est-à-dire le nombre de demandes approuvées, il n’y en a aucune parce qu’il faut un certain temps pour suivre les procédures qui s’imposent. L’étude de ces demandes est relativement complexe. Il s’agit de grandes sociétés.

Ainsi, nous avons un certain nombre d’organismes...

Le sénateur Plett [ + ]

Non, monsieur le ministre, ma question ne portait pas sur le nombre de demandes approuvées. J’ai ce chiffre et je sais qu’il est de zéro. J’ai plutôt demandé ceci : combien d’entreprises ont présenté des demandes?

M. Morneau [ + ]

Madame la présidente, puis-je vous demander quelle est la procédure à suivre en cette enceinte? Est-ce que...

Le sénateur Plett [ + ]

Je pose une question et vous y répondez.

M. Morneau [ + ]

Madame la présidente, selon la procédure à suivre, lorsqu’un sénateur pose une question, est-ce que je dispose du même temps pour y répondre?

La présidente [ + ]

Lors d’une séance de comité plénier, le sénateur qui a la parole dispose de 10 minutes pour les questions et réponses. C’est la procédure que nous suivons.

M. Morneau [ + ]

D’accord. Est-ce à dire que la procédure diffère de celle à la Chambre, selon laquelle les questions et les réponses doivent avoir une durée semblable?

La présidente [ + ]

C’est exact.

Le sénateur Plett [ + ]

Contrairement à la Chambre, nous attendons vraiment une réponse.

La présidente [ + ]

La période de 10 minutes est écoulée. Nous allons maintenant passer au prochain intervenant.

Le sénateur Cormier [ + ]

Bienvenue, messieurs les ministres. Mes questions s’adressent au ministre Duclos, de la part de la sénatrice Raymonde Saint-Germain.

La première question porte sur les dépenses et les allocations financières prévues par votre gouvernement en réponse à la pandémie de COVID-19. De nombreuses critiques ont souligné le fait qu’il faudra des décennies aux contribuables canadiens pour se remettre des dépenses engendrées par la pandémie. Nous sommes d’accord pour dire que, étant donné la situation et l’état de la crise à l’échelle planétaire, il était indispensable d’investir afin de sauver des vies et de soutenir la population. Cependant, croyez-vous que le gouvernement a su trouver le bon équilibre entre la nécessité de sauver des vies et de soutenir la population et les entreprises, et la nécessité de sauvegarder l’économie canadienne?

M. Duclos [ + ]

Merci, sénateur Cormier. Je pense que vous avez capté les deux objectifs essentiels du gouvernement canadien au cours des dernières semaines. Le premier objectif était d’aider à protéger la santé des travailleurs, de leurs familles et de leurs proches. Le deuxième objectif était de protéger leur capacité à joindre les deux bouts et à nourrir leur famille dans le contexte d’une pandémie que nul n’anticipait et que nul ne comprend entièrement, même aujourd’hui. Il fallait user à la fois de prudence et d’urgence. C’est ce que nous avons fait depuis le début, et c’est ce que nous croyons que les Canadiens méritent de la part de leur gouvernement.

Le sénateur Cormier [ + ]

Merci, monsieur le ministre. Si, au début de la pandémie, il était facile de comprendre le fondement de vos décisions, plus on avance dans cette phase de déconfinement, plus il est légitime de se demander comment se prennent ces décisions aujourd’hui.

Ma deuxième question est la suivante : quels critères décisionnels votre gouvernement a-t-il utilisés afin de trouver cet équilibre et d’établir la stratégie du gouvernement en matière de dépenses?

M. Duclos [ + ]

Je vais me permettre de répondre tout d’abord en parlant des bases sur lesquelles certaines des décisions les plus importantes ont été prises. La base essentielle, c’est celle de la science, de l’épidémiologie, de l’immunologie et de la science de la santé publique, que nous ne connaissions que très peu dans plusieurs cas avant la pandémie, mais que nous comprenons beaucoup mieux maintenant. En ce qui a trait aux enseignements en matière de politique publique, l’objectif premier a été de protéger notre tissu économique et social, de protéger les millions de travailleurs qui ont perdu non seulement leur emploi, mais leur revenu au cours des derniers mois, et de protéger aussi l’environnement économique, celui des petites entreprises, en particulier, dont nous aurons absolument besoin lors de la relance qui commence à émerger.

Le sénateur Cormier [ + ]

Merci. Ma dernière question pour vous, monsieur le ministre, est celle-ci : comment répondez-vous aux critiques qui estiment que votre approche handicapera l’économie canadienne pour de nombreuses années à venir?

M. Duclos [ + ]

Au contraire, l’approche que nous avons adoptée dès le départ en agissant rapidement et d’une manière intensive, c’est l’approche qu’il fallait adopter pour éviter à notre économie des dégâts non seulement considérables, mais de longue durée. Il fallait protéger le tissu économique, et c’est ce qu’on a fait avec les programmes que vous connaissez déjà très bien. Cela nous a déjà évité de passer d’une récession sévère à une dépression encore plus sévère qui se serait étendue sur de nombreuses années.

Le sénateur Cormier [ + ]

Merci, monsieur le ministre. Je cède le reste du temps de parole qui m’est accordé à l’honorable sénateur Loffreda.

Le sénateur Loffreda [ + ]

Merci, sénateur Cormier.

Merci, messieurs Morneau et Duclos, d’être des nôtres aujourd’hui. Je tiens aussi à vous remercier de soutenir les Canadiens, de contribuer à maintenir la vitalité de l’économie canadienne et d’aider les entreprises à survivre. Je suis constamment en relation avec le milieu des affaires et, à l’heure actuelle, il a besoin de toute l’aide qu’on peut lui offrir. Je tiens donc à vous remercier de cette aide.

Il y a une question qui me préoccupe également, et j’aimerais que le ministre Morneau y réponde.

J’aimerais aussi avoir les commentaires du ministre Duclos sur cette question.

Le sénateur Forest et moi siégeons au Comité des finances nationales, et nous avons la même préoccupation. Lorsque la nouvelle vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan, a comparu devant le Sénat, à la mi-mai, je l’ai questionnée sur la capacité de son bureau de mener des vérifications approfondies sur les diverses mesures et les différents programmes mis en place par le gouvernement en réponse à la pandémie de COVID-19. Elle a reconnu que le manque de ressources se répercutait sur tous les autres secteurs de l’organisation, et que la COVID-19 occupera probablement une bonne partie de ses ressources et de son temps.

Or, j’ai remarqué que, selon le Budget principal des dépenses, le Bureau du vérificateur général reçoit un peu moins de fonds que l’année dernière, alors que, plus tôt ce mois-ci, des fonds supplémentaires n’ont pas été demandés au titre du Budget supplémentaire des dépenses (A).

Ma question est la suivante. Peut-on s’attendre à ce qu’un financement supplémentaire soit offert à Mme Hogan et à son personnel dans le cadre des prochains projets de loi de crédits, afin que la vérificatrice générale puisse s’acquitter de son rôle et examiner les dépenses sans précédent qui résultent de la pandémie?

M. Morneau [ + ]

Je pense que c’est une bonne idée que nous répondions tous les deux à cette question. Nous sommes conscients que la vérificatrice générale doit relever un défi de taille pour s’acquitter de son mandat. Il va sans dire que nous sommes heureux d’avoir nommé une nouvelle vérificatrice générale. Nous nous réjouissons à la perspective de collaborer avec elle pour veiller à ce qu’elle dispose des ressources nécessaires pour effectuer son travail. Le gouvernement est aux prises avec le même genre de problème en ce moment. L’environnement économique dans lequel nous sommes est très dynamique et évolue constamment, ce qui veut dire qu’elle aura autant de mal que nous à déterminer la somme exacte dont elle aura besoin.

Cela dit, nous savons qu’une collaboration avec la vérificatrice générale s’impose. Selon nous, les fonctions qu’elle assume sont importantes et sont essentielles pour que les parlementaires et les Canadiens comprennent la nature et la qualité des investissements du gouvernement. Vous pouvez donc vous attendre à ce que nous poursuivions notre travail en ce sens.

Aviez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Duclos?

M. Duclos [ + ]

Merci, ministre Morneau, et merci, monsieur le sénateur. En fait, j’ai parlé à Mme Hogan il y a quelques heures pour la féliciter de sa nomination et pour lui dire à quel point son travail est important. Elle le savait évidemment déjà. Comme le disait le ministre Morneau, son travail est important pour la capacité du gouvernement canadien de se doter d’un conseiller capable de l’accompagner dans les eaux parfois calmes et parfois plus troubles dans lesquelles nous naviguons. Je tenais également à manifester à Mme Hogan, comme le ministre Morneau vient de le dire, notre appui complet dans le cadre des relations que nous aurons avec elle au cours des prochaines années.

Le sénateur Loffreda [ + ]

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

La réouverture des économies éveille évidemment des craintes quant au taux d’endettement du Canada. C’est une grande source de préoccupation. Cependant, je suis convaincu que l’économie canadienne, qui a toujours été très saine, retrouvera sa vitalité. Comme je l’ai déjà dit, je pense qu’il est important de continuer à aider nos entreprises. Tandis que les économies rouvrent et que nous passons de mesures d’aide financière à des politiques de relance économique, je suis d’avis que la Banque du Canada a fait tout ce qu’elle pouvait dans les circonstances, en évitant le double emploi. Félicitations à la Banque du Canada. Je l’en remercie.

À mesure que les économies à l’échelle du pays commencent à rouvrir, pouvez-vous nous dire si on envisage d’adopter des politiques de relance économique et, dans l’affirmative, nous parler de certaines d’entre elles?

M. Morneau [ + ]

J’aimerais tout d’abord, je pense, mettre cette question en contexte. À mon avis, nous sommes actuellement confrontés à un défi économique sans précédent. Par conséquent, les solutions qui nous permettront de surmonter ce défi seront probablement elles aussi différentes des solutions qui ont fonctionné par le passé.

En 2008-2009, au sortir d’une période d’une autre période de difficultés économiques, on a constaté à un appauvrissement de la demande. Bien sûr, dans un tel contexte, les gouvernements cherchent de moyens — comme vous le dites — de stimuler l’économie. Nous ne pouvons pas encore dire avec certitude à quoi ressemblera la situation une fois la pandémie de COVID-19 passée. Ainsi, dans le scénario optimiste, advenant que la reprise se déroule bien et qu’un redressement soit possible plus tard cette année, il faudra alors examiner la situation et prendre des mesures en conséquence. Par exemple, si la demande est faible, nous envisagerons des mesures en vue de la stimuler. Toutefois, les difficultés pourraient être d’un autre ordre.

Jusqu’à maintenant, nous injectons de l’argent dans l’économie sous forme d’aide aux particuliers et aux entreprises. Grâce à cette aide, en général, les gens réussissent à surmonter les difficultés économiques que nous éprouvons en ce moment. Cela pourrait signifier que ce genre de mesure est prometteur pour la prochaine étape. Il se pourrait aussi que nous devions revenir à des mesures plus traditionnelles.

Selon nous, l’important est de comprendre qu’il s’agit d’une situation dynamique qui nous oblige à prendre des décisions à mesure que l’information nous parvient. Puisque nous ne sommes pas encore rendus à l’étape du redressement, il serait prématuré pour moi de conclure quels seront les moyens appropriés de remédier à une éventuelle faiblesse de la demande.

Le sénateur R. Black [ + ]

Merci aux ministres d’être présents. C’est bien de vous recevoir ici.

Mes questions concernent l’agriculture et s’adressent au ministre des Finances. Le budget des dépenses prévoit environ 20 millions de dollars pour l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Pourriez-vous nous donner un aperçu de ce à quoi serviront ces fonds?

M. Duclos [ + ]

Je peux sans problème, ministre Morneau, soumettre la question au fonctionnaire qui m’accompagne, Glenn Purves, car il est bien au fait de la situation, à moins, bien sûr, que vous préfériez y répondre vous-même avec votre collègue.

Glenn Purves, secrétaire adjoint, Secteur de la gestion des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor [ + ]

Merci beaucoup de cette question, sénateur.

De ces 20 millions de dollars, 16 millions de dollars permettront à l’Agence canadienne d’inspection des aliments de répondre aux vulnérabilités émergentes au niveau de la capacité d’inspection de la nourriture et des produits végétaux et animaux face à la COVID-19 et de s’assurer que la chaîne d’approvisionnement alimentaire des Canadiens demeure adéquate, sûre et fiable.

Ces fonds permettront à l’Agence canadienne d’inspection des aliments de maintenir ses activités essentielles en assurant sa capacité d’inspection et en investissant dans les technologies facilitant la prestation des services d’inspection.

Le sénateur R. Black [ + ]

Merci. Nous avons beaucoup entendu de critiques dernièrement concernant la couverture insuffisante offerte par les programmes de gestion des risques d’entreprise, particulièrement à la lumière de la crise de la COVID-19.

Est-ce que les fonds affectés à Agriculture et Agroalimentaire Canada comprennent des sommes pour l’amélioration des programmes de gestion des risques d’entreprise?

M. Morneau [ + ]

Ministre Duclos, voulez-vous répondre à cette question?

M. Duclos [ + ]

Comme vous l’avez dit plus tôt, afin d’avoir des renseignements précis et utiles, nous inviterons une fois de plus Glenn Purves à répondre. Il n’est pas seulement une bonne personne, il est aussi un excellent spécialiste de ce domaine.

M. Purves [ + ]

Des fonds sont prévus à cet effet. Il s’agit d’une somme globale qui couvre également ce secteur.

Le sénateur R. Black [ + ]

Merci. J’ai une autre question à poser avant la fin de mon intervention.

La ministre de l’Agriculture a annoncé un investissement de 75 millions de dollars au titre du Fonds des infrastructures alimentaires locales. Comment les agriculteurs et les producteurs pourront-ils faire en sorte que leurs surplus de production soient acheminés là où ils doivent l’être?

M. Duclos [ + ]

Je propose à nouveau de laisser M. Purves répondre à la question.

M. Purves [ + ]

Il s’agit d’un poste budgétaire qui ne figure pas dans le Budget supplémentaire des dépenses (A). Par conséquent, je n’ai pas d’information à ce sujet.

Le sénateur R. Black [ + ]

J’ai donc le temps de poser une question de plus.

De nombreux producteurs, transformateurs et groupes agricoles ont exprimé leur déception quant aux mesures de soutien offertes à leur secteur dans le cadre de la COVID-19. Une aide supplémentaire est-elle prévue?

M. Duclos [ + ]

À cet égard, je peux peut-être fournir une réponse satisfaisante quant à ce qui se passe à un haut niveau. La ministre Bibeau s’est employée très activement à soutenir les agriculteurs tout au long de la crise. Nous savons à quel point la situation est difficile pour eux. La ministre travaille avec ses homologues des provinces et territoires. Dans de nombreux cas, les programmes que nous mettons en place bénéficient et ont besoin du soutien des provinces et des territoires.

Le sénateur Dagenais [ + ]

J’ai quelques questions à poser à M. Duclos et M. Morneau. Monsieur Morneau, quand on examine attentivement les chiffres — ce qui n’est pas facile en raison de la multiplication des programmes sur une base presque quotidienne —, on constate des écarts inquiétants ou, à tout le moins, on est en droit de se poser des questions. Lorsqu’il tient ses conférences de presse à la porte de son cottage , M. Trudeau dit parfois que c’est bien la réalité.

Prenons le cas de la Prestation canadienne d’urgence, la PCU. On parle d’une aide d’urgence de 73 milliards de dollars à raison de 2 000 $ par mois. Les projections qui ont été faites en mai dernier ont permis de corriger ce montant de 73 milliards de dollars pour le ramener à 45 milliards de dollars. Donc, on parle de presque 4 milliards de dollars de moins par mois. Où sont allés les 28 milliards de dollars manquants par rapport à l’annonce de départ, et comment expliquer cette erreur de vision? Il ne s’agit pas ici de petits montants. Il s’agit quand même d’une erreur de 28 milliards de dollars.

M. Duclos [ + ]

Sénateur Dagenais, je pense qu’il ne s’agit pas ici d’une erreur de vision, mais plutôt de compréhension. Le montant de 73 milliards de dollars dont vous parlez — M. Morneau pourra davantage vous l’expliquer davantage —, c’est le montant de la subvention salariale, ce n’est pas le montant de la Prestation canadienne d’urgence.

Le sénateur Dagenais [ + ]

Dans les nouveaux programmes qu’on examine en ce moment, on parle de 13 milliards de dollars. Est-ce qu’on peut s’attendre à des corrections de ce genre, des corrections d’envergure? Pouvez-vous me donner plus d’explications?

M. Duclos [ + ]

Les mots que vous avez en tête, c’est « ajustement », « évolution » ou « adaptation ». La crise a été rapide, mais elle a aussi évolué au fil des semaines. C’est pour cette raison que nous avons mis des mesures en place très rapidement. Ces mesures ont évolué avec les semaines en fonction de la situation sanitaire, qui était la plus grande préoccupation au départ, mais aussi en fonction de l’économie. C’est exactement ce qu’il faut faire dans ce genre de circonstances, soit agir rapidement pour éviter une sévère dépression et agir en s’adaptant au contexte de la reprise économique.

Le sénateur Dagenais [ + ]

Puisque vous me répondez, monsieur Duclos, j’aurais une autre question à vous poser sur les fameux 10 jours de congé de maladie accordés à tous les Canadiens. Je vais être conservateur, mais, avec 15 millions de travailleurs à temps plein, soit 150 millions de jours à 100 $ par jour, cela représente environ 15 milliards de dollars. De quels programmes proviendront ces crédits? Pouvez-vous nous garantir que vous n’avez pas inclus ces dépenses dans les 14 milliards de dollars de transferts aux provinces, parce qu’il va manquer 1 milliard de dollars? Quelle proportion de ce montant de 14 milliards de dollars sera transférée au Québec?

M. Duclos [ + ]

J’ai une réponse rapide, et une autre peut-être un peu plus longue par la suite.

Tout d’abord, nous nous sommes engagés à fournir un soutien aux travailleurs pour éviter qu’ils aient à faire un choix entre protéger leur santé et protéger leur capacité à nourrir leur famille. Comme vous l’avez mentionné, tout cela passe par un congé de maladie accordé en raison de la COVID-19. Au cours des prochaines semaines, ce congé pourrait permettre notamment d’éviter une deuxième vague de la COVID-19.

Deuxièmement, nous avons indiqué très clairement que le gouvernement du Canada allait certainement, à court terme, prendre en charge à la fois le coût et le fardeau de cette mesure, car nous savons que les impacts positifs sont généralisés lorsque les travailleurs peuvent s’isoler lorsqu’ils en ont besoin. Cela permet de protéger leurs collègues de travail et d’éviter d’infecter leur milieu de travail.

Enfin, les 14 milliards de dollars que le gouvernement du Canada offre aux provinces et aux territoires ont pour but de reconnaître — ce que la plupart des gens comprennent, y compris vous — le lourd fardeau que les provinces et les territoires ont dû assumer au cours des dernières semaines. Il s’agit d’une aide accordée par le gouvernement du Canada pour assurer un soutien aux priorités sur lesquelles les premiers ministres se sont mis d’accord au cours des 14 dernières semaines lors de leurs échanges.

Le sénateur Dagenais [ + ]

Quelle sera la portion destinée au Québec?

M. Duclos [ + ]

Les discussions se poursuivent. L’objectif est de poursuivre cette excellente collaboration entre les différents gouvernements. Cette collaboration est importante dans n’importe quel contexte, mais elle est d’autant plus importante dans un contexte de pandémie, comme c’est le cas depuis les derniers mois.

Le sénateur Dagenais [ + ]

Je vous remercie.

Le sénateur Campbell [ + ]

La ministre des Pêches, Bernadette Jordan, a confirmé, le 15 juin, soit plus d’un mois après avoir annoncé une aide de 400 millions de dollars pour l’industrie de la pêche canadienne mais, pour autant que je sache, le gouvernement n’a pas encore délié les cordons de la bourse dans ce dossier. En fait, les demandes ne sont pas encore acceptées pour certaines nouvelles aides, dont les 267 millions de dollars au titre de la Prestation aux pêcheurs et les 202 millions de dollars au titre de la Subvention aux pêcheurs.

Je comprends que les choses changent rapidement dans cet environnement, mais connaissez-vous d’autres situations semblables à celle-ci, où le gouvernement a dit : « Nous allons de l’avant avec cette mesure pendant la pandémie » et où, pour une raison ou pour une autre, la prestation du programme a été retardée? Je suis sûr qu’il y a d’autres cas de ce genre, étant donné ce que nous voyons ici.

M. Morneau [ + ]

Je vous remercie. La question est pertinente. Il y a évidemment de nombreux cas où nous avons essayé d’apporter un soutien à différents secteurs.

Pour répondre directement à votre question, oui, il y a des cas où, pour finaliser les détails administratifs d’une manière logique ou pour affecter correctement les fonds, nous devons faire vérifier l’approche avant d’aller plus loin. Je peux vous donner comme exemple le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, dont nous espérions appliquer l’élargissement vendredi dernier. En fait, à la suite de vérifications administratives appropriées, nous travaillons à le mettre au point le plus rapidement possible et nous espérons que ce travail sera terminé très prochainement.

Dans ce contexte d’urgence, nous essayons de faire les choses le plus rapidement possible tout en sachant qu’il est de notre responsabilité de bien faire les choses.

La sénatrice Marshall [ + ]

Ma question s’adresse au ministre Duclos. Je vous remercie de vos observations préliminaires, monsieur le ministre. Elles cadrent assez bien avec ma question.

Vous avez parlé du budget principal des dépenses, qui totalise 308 milliards de dollars en dépenses gouvernementales. Vous avez ajouté que les crédits votés s’élèvent à 125 milliards de dollars, puisque 183 milliards sont des dépenses législatives.

Sur les 125 milliards de dollars, à la fin de la semaine, 99 milliards auront déjà été approuvés par le Parlement au moyen de projets de loi de crédits provisoires. Cela ne laisse donc que 26 milliards de dollars du budget principal des dépenses devant être approuvés par le Parlement plus tard au cours de l’année.

J’ai entendu dire qu’il était possible qu’il y ait un troisième projet de loi de crédits provisoires pour les derniers 26 milliards. Pouvez-vous confirmer que le gouvernement entend faire approuver les autres 26 milliards de dollars par le Parlement au moyen d’un troisième projet de loi de crédits provisoires? Si ce n’est pas le cas, qu’avez-vous prévu au juste pour cette somme?

M. Duclos [ + ]

Merci. Ce sont d’excellentes questions qui montrent une bonne compréhension du processus.

Dans une année normale, on déposerait le Budget principal des dépenses. On adopterait le Budget provisoire des dépenses, puis le projet de loi de crédits à peu près à cette période de l’année, ce qui fait que les sommes prévues dans le Budget principal des dépenses seraient à la disposition des ministères et des organismes pour l’ensemble de l’année.

La situation est différente cette année. Un premier projet de loi de crédits provisoires a déjà été adopté plus tôt cette année. Nous en avons aussi un deuxième, qui devrait en principe représenter la valeur totale du Budget principal des dépenses. Toutefois, comme la sénatrice vient de le dire, il reste encore à approuver environ le quart du Budget principal des dépenses. Il s’agit de sommes qui ne sont pas couvertes par le projet de loi de crédits provisoires pour cette période et qu’il faudra donc approuver à l’automne. Il reste à déterminer et à annoncer quand cela aura lieu au juste. Cela complétera alors le processus du Budget principal des dépenses.

Il reste aussi les budgets supplémentaires des dépenses. Aujourd’hui, nous discutons aussi du Budget supplémentaire des dépenses (A). Normalement, il y aurait ensuite le Budget supplémentaire des dépenses (B) à l’automne et le Budget supplémentaire des dépenses (C) au début de l’hiver prochain. Comme la sénatrice l’a indiqué, ces budgets permettent de modifier et d’accroître les niveaux de soutien en fonction de la situation.

La sénatrice Marshall [ + ]

Monsieur le ministre, pourriez-vous parler des 26 milliards de dollars? J’aimerais savoir s’il y aura un troisième projet de loi de crédits provisoires. Comment le gouvernement prévoit-il faire approuver ces 26 milliards de dollars?

M. Duclos [ + ]

Oui, on prévoit présenter un troisième projet de loi de crédits provisoires. Cependant, comme Glenn Purves est présent ici aujourd’hui, on pourrait lui demander d’intervenir de nouveau pour expliquer ce que je viens de dire de la manière la plus précise possible.

La sénatrice Marshall [ + ]

Sans vouloir manquer de respect à l’endroit de M. Purves, monsieur le ministre, je préfère m’adresser à vous, car j’ai une autre question.

Sur les 125 milliards de dollars, 99 milliards seront approuvés d’ici la fin de la semaine. Nous avons jusqu’à la fin du mois de décembre pour étudier le Budget principal des dépenses. Je ne vois pas l’utilité de mener cette étude maintenant. La plupart des sommes ont déjà été approuvées.

Pourquoi pensez-vous qu’il serait utile d’étudier le Budget principal des dépenses cette année?

M. Duclos [ + ]

C’est une bonne question. En passant, si je voulais que M. Purves prenne la parole, c’est parce que je le vois et que je l’entends régulièrement. Vous n’avez peut-être pas la même chance. C’est une personne très claire, posée et structurée. J’ai peut-être été trop généreux en essayant de vous faire profiter de ses qualités, mais permettez-moi de revenir sur le sujet qui nous intéresse.

En effet, nous devrions voter sur le Budget principal des dépenses au complet à ce moment-ci, mais, compte tenu de la situation, les parlementaires des deux Chambres ont la possibilité de poursuivre leur étude de ce budget. À l’automne, ils pourront débattre du troisième projet de loi de crédits provisoires et voter sur celui-ci.

La sénatrice Marshall [ + ]

Merci. Ma prochaine question s’adresse au ministre Morneau.

Monsieur le ministre, je suis heureuse de vous revoir. Je tiens à parler de l’avis aux médias que votre ministère a publié en juin au sujet du portrait de l’économie et des finances publiques que vous présenterez le 8 juillet. L’avis indique ceci : « Figureront dans ce portrait des renseignements sur l’état actuel de l’économie et la réponse du gouvernement du Canada en ce qui a trait au soutien [...] pendant la pandémie de la COVID-19 ».

Je n’ai jamais entendu le terme « portrait des finances publiques » auparavant. Cela ne semble pas très prometteur. J’espère que vous promettez moins aujourd’hui que ce que vous offrirez en juillet.

Pouvez-vous nous donner une idée de ce que vous divulguerez en juillet dans votre portrait des finances publiques?

M. Morneau [ + ]

Je tiens d’abord à vous remercier, madame la sénatrice. J’essaie certainement de prendre l’habitude d’offrir plus que ce que je promets. Nous verrons si je réponds à vos attentes le 8 juillet.

En réalité, il est extrêmement difficile actuellement de faire des projections de façon précise. Comme tout le monde ici présent le sait, le ralentissement économique survenu à la fin mars et au cours des mois d’avril et de mai a été sans précédent. C’est pourquoi nous estimons devoir fournir de l’information sur ce que nous savons et non de l’information hypothétique ou sans fondement.

Ce que nous ferons, c’est vous fournir notre estimation la plus récente de l’état actuel de l’économie, avec une analyse complète des engagements que nous avons pris jusqu’à un certain point dans le temps, ce qui, à notre avis, nous permettra de brosser un tableau de ce que sera 2021.

La sénatrice Marshall [ + ]

Fournirez-vous des chiffres, notamment à propos de la dette et du déficit actuels? Je sais qu’il est difficile de faire des prévisions, mais c’est vraiment un défi de trouver des renseignements sur l’état actuel des finances du gouvernement. Les personnes intéressées doivent consulter de multiples sources.

Fournirez-vous des renseignements sur la situation actuelle? À titre d’exemple, le sénateur Plett a parlé de la dette et du déficit. Obtiendrons-nous ces chiffres, ou devrons-nous encore tenter de les calculer nous-mêmes?

M. Morneau [ + ]

Oui, vous les aurez.

La sénatrice Marshall [ + ]

Excellent, je vous remercie. Monsieur le ministre Duclos, j’aurais une autre question pour vous.

Nous faisons une étude assez approfondie des projets d’immobilisations du ministère de la Défense nationale. Il y a deux ans, le premier ministre a annoncé que le Conseil du Trésor prendrait la responsabilité de dossiers cruciaux, y compris en matière d’approvisionnement pour la défense.

Je remarque que le Budget supplémentaire des dépenses (A) prévoit quelque 700 millions de dollars destinés à des projets d’immobilisations du ministère de la Défense, la somme la plus importante, 585 millions de dollars, correspondant au projet des navires de soutien interarmées. La décision qu’a prise le premier ministre de transférer cette responsabilité au Conseil du Trésor saute aux yeux quand on regarde la mise à jour de 2019 du Plan d’investissement de la Défense, puisqu’on y voit clairement que le Conseil du Trésor se trouve au sommet de la pyramide montrant les niveaux d’approbation.

En tant que président du Conseil du Trésor, êtes-vous convaincu que les projets d’immobilisations relevant de la politique de défense Protection, Sécurité, Engagement et approuvés par le Conseil du Trésor sont correctement gérés au sein du ministère de la Défense nationale, et que les renseignements sur le coût et l’avancement de ces projets sont à la fois complets et exacts?

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie pour cette question. Elle est très importante.

Je souhaite d’abord rectifier quelque chose qui aurait pu être mal interprété : le Conseil du Trésor n’est pas en charge de ces processus importants, ni d’ailleurs la seule instance impliquée. En fait, le rôle du Conseil du Trésor est d’appuyer et de superviser d’autres ministères qui jouent un rôle important dans ce type de processus.

Dans ce cas particulier, les ministères principalement concernés sont, bien entendu, Défense nationale, mais aussi Services publics et Approvisionnement Canada. Nous travaillons tous ensemble en respectant les capacités et les responsabilités de chacun. Nous collaborons afin de veiller à ce que, comme vous l’avez dit, des mesures et des mécanismes financiers appropriés soient mis en œuvre dans le cadre de projets d’immobilisations aussi importants.

La sénatrice Marshall [ + ]

Merci beaucoup.

Ai-je le temps de poser une autre question?

La présidente [ + ]

Non.

Le sénateur Harder [ + ]

Bon après-midi à tous, et merci aux ministres et aux fonctionnaires d’être ici aujourd’hui. Je suis probablement l’une des rares personnes à Ottawa qui pense que le travail du Conseil du Trésor est aussi important qu’excitant. J’aimerais saisir l’occasion de poser quelques questions au ministre sur le rôle du Conseil du Trésor, surtout dans le contexte des mesures qui ont été prises en lien avec la COVID et du caractère changeant des programmes et des montants que nous sommes appelés à approuver.

Le Conseil du Trésor, c’est connu, est traditionnellement le ministère responsable de veiller à l’intégrité des programmes, d’évaluer les programmes et de faire en sorte que l’argent des contribuables soit utilisé judicieusement et prudemment.

J’aimerais que le président du Conseil du Trésor réponde à la question suivante : quelles étapes additionnelles, outre les pratiques courantes du ministère, ont été mises en œuvre à la suite des mesures liées à la COVID afin de veiller à ce que les allocations substantielles et soudaines versées dans le cadre des nouveaux programmes respectent les normes d’intégrité et d’efficience habituelles?

M. Duclos [ + ]

Merci, sénateur Harder. Je vous remercie de cette marque de gentillesse et d’appuyer le rôle du Conseil du Trésor, et peut-être aussi de son président. Oui, c’est effectivement un organisme central important, mais peut-être aussi un organisme dont le travail est plutôt discret, dans bien des cas, lorsqu’il appuie d’autres organismes et ministères importants du gouvernement.

Durant la crise actuelle, nous avons pris différentes mesures afin de pouvoir faire les choses rapidement, mais en tenant compte des préoccupations en matière d’intégrité et d’optimisation des ressources que vous avez également signalées, et à juste titre.

Nous avons dû être agiles et, en même temps, diligents et responsables. À titre d’exemple des mesures prises, nous avons communiqué clairement à l’ensemble des ministères et des fonctionnaires de toutes les régions et de tous les échelons non seulement une attente, mais aussi une exigence selon laquelle ils doivent documenter toutes les mesures mises en place — parfois de manière relativement rapide — et devront fournir tôt ou tard des renseignements complets aux institutions importantes, comme le Commissariat à l’information, le Bureau du vérificateur général et d’autres organismes centraux du gouvernement du Canada.

Par ailleurs, nous avons dû nous montrer agiles et rigoureux pour être en mesure de suivre le nombre élevé des demandes dans le secteur des soins de santé et de la santé publique en soutenant la recherche médicale, le dépistage, les traitements et les vaccins et en assurant un approvisionnement à un niveau et à un rythme sans précédent dans l’histoire du Canada. Pour ce faire, nous travaillons avec Services publics et Approvisionnement Canada et nous utilisons d’autres mécanismes importants pour les ressources humaines, la technologie et la gestion financière, ce que le Conseil du Trésor doit absolument faire.

Le sénateur Harder [ + ]

Je vais maintenant passer aux activités « normales », si je puis dire, relatives aux programmes. Quelles mesures votre ministère prend-il pour garantir que les ressources nécessaires sont consacrées aux autres programmes qui ne concernent pas les initiatives liées à la COVID, et que ces programmes sont efficacement surveillés pour assurer leur intégrité?

M. Duclos [ + ]

Pour répondre brièvement, le Secrétariat du Conseil du Trésor a le privilège de compter en son sein des employés dont le niveau d’expertise et le dévouement ne sont malheureusement pas très visibles, du moins pas suffisamment pour la majorité des Canadiens et même pour les parlementaires. Je le sais maintenant avec certitude. En effet, je suis président du Conseil du Trésor depuis quelques mois maintenant, et je peux vous dire que, même dans le cadre d’une situation d’urgence comme la COVID-19, des efforts appropriés, comme vous l’avez suggéré, ont été déployés pour que les activités du gouvernement non liées à la pandémie soient assujetties aux bonnes procédures en matière d’intégrité et de surveillance. Ce degré exceptionnel de dévouement, d’expertise et d’engagement assure le bien-être des Canadiens.

Le sénateur Harder [ + ]

La dernière question que j’aimerais vous poser en votre qualité de président du Conseil du Trésor porte sur la transparence. On entend beaucoup parler de transparence. Certes, les divers sites Web des ministères communiquent beaucoup de renseignements au public et aux parlementaires, non seulement à titre d’information, mais également pour leur permettre d’exiger des comptes du gouvernement.

L’une des difficultés tient au fait que de nombreuses fenêtres permettent d’observer ce qui se fait sur le plan de la transparence, mais qu’aucune de celle-ci n’offre une vue d’ensemble. J’aimerais savoir si le Conseil du Trésor examine des moyens de rajuster les exigences de reddition de comptes relatives aux résultats obtenus afin de mettre à profit les outils supplémentaires, notamment électroniques, qui ont été créés pendant la crise à des fins de transparence et qui offriraient un meilleur contexte pour la reddition de comptes en matière de résultats obtenus, par ministère.

M. Duclos [ + ]

Merci. J’aime votre observation selon laquelle on peut voir ce que fait le gouvernement en regardant à travers diverses fenêtres, mais que celles-ci n’offrent pas nécessairement une vue d’ensemble. C’est tout à fait vrai. C’est pourquoi mon ministère et celui du ministre des Finances ont joué un rôle de premier plan à cet égard. Nous avons présenté des rapports bimensuels aux comités parlementaires concernés.

Il y a deux plateformes clés de disponibles, où des informations importantes ont été publiées au cours des dernières semaines. La première est l’InfoBase du gouvernement du Canada, qui contient des renseignements importants sur les mesures et les coûts connexes. Il y a aussi le portail Gouvernement ouvert, qui a permis la divulgation complète et automatisée de près de 150 mesures d’urgence distinctes visant la COVID-19.

Outre les réponses aux questions légitimes que les sénateurs et les députés ont posées à maintes reprises sur les activités du gouvernement, il y a eu un bon souci de transparence. Bien entendu, il est toujours possible de faire mieux. Nous devrions toujours chercher à nous améliorer, mais je crois que le niveau de transparence a été bon, étant donné les circonstances.

Le sénateur Harder [ + ]

Merci.

Ma prochaine question s’adresse au ministre Morneau.

À la une du Financial Times d’hier, on pouvait lire que la société Brookfield Properties pourchasse de petits détaillants qui lui doivent des milliers de dollars sur le loyer de locaux de magasins qui ont dû fermer leurs portes en raison de la pandémie de coronavirus. Au même moment, le groupe canadien d’investissement saute des paiements hypothécaires et en appelle à l’indulgence de ses prêteurs. L’article décrit, en s’appuyant sur divers documents reçus, comment la société serre la vis à ses locataires tout en demandant à ses créanciers de faire preuve de compréhension.

Je sais que ce dossier ne relève évidemment pas directement du ministre des Finances. Toutefois, vous avez déjà parlé de l’esprit dans lequel les mesures du gouvernement ont été prises et de l’aide qu’il fournit. Je vous invite à commenter la coopération des grandes sociétés, dans cet esprit, dans leur secteur de responsabilités.

M. Morneau [ + ]

Eh bien, merci, sénateur Harder. Tout d’abord, je n’ai pas vu cet article; je ne peux donc pas faire de commentaires sur la situation de Brookfield et de ses locataires.

En ce qui concerne votre question d’un ordre plus général, je dirai que nous avons essayé d’élaborer des mesures qui inciteraient les participants sur le marché à s’entendre, et c’est ce que visait l’approche que nous avons choisie pour l’aide d’urgence pour le loyer. Elle devait inciter les propriétaires à collaborer avec leurs locataires puisqu’ils étaient assurés de recevoir 75 % de leurs paiements, et c’était une mesure incitative pour les locataires parce qu’ils n’avaient que 25 % à payer. Ce programme commence maintenant à prendre de l’ampleur — ce qui est positif —, parce que de nombreuses provinces ont mis en place un moratoire temporaire sur les expulsions de locataires commerciaux.

À votre question directe, je répondrai que nous avons en fait travaillé avec certains des plus grands propriétaires du pays. J’ai parlé personnellement avec un certain nombre d’entre eux, pas avec Brookfield mais avec d’autres grands organismes qui ont un grand nombre de locataires commerciaux. J’ai parlé aux responsables de grandes caisses de retraite canadiennes qui, en fait, m’ont répondu dans tous les cas vouloir adopter l’approche que nous avons mise en place en matière de loyers commerciaux afin d’essayer de résoudre le problème auquel ils sont confrontés, à savoir le fait que les locataires n’ont pas l’argent pour payer et que les propriétaires, bien sûr, ne veulent pas y laisser leur chemise. Ils estimaient que le programme était adapté à ce problème.

Je pense que cela répond globalement à votre question.

La sénatrice Batters [ + ]

Monsieur le ministre, votre gouvernement nous demande encore une fois d’approuver des milliards de dollars de dépenses à l’aveuglette. Cette pratique est inquiétante. La première mesure législative liée à la COVID-19 que le gouvernement Trudeau a mise en place vous accordait le pouvoir de créer une énorme société d’État sans surveillance parlementaire.

Le projet de loi C-14 comporte une disposition de caducité touchant cette société d’État, mais elle ne fait qu’empêcher la création de la société d’État après le 30 septembre. Si elle a été créée avant cette date, le gouvernement a le droit d’y consacrer autant de deniers publics qu’il veut. Or, vous avez déjà créé cette société gigantesque. Les décrets en conseil du 10 mai dernier révèlent que vous l’avez nommée la Corporation de financement d’urgence d’entreprises du Canada. Ainsi, la disposition de caducité du projet de loi C-14 sur cette énorme société d’État ne veut plus rien dire.

Monsieur le ministre, pourquoi n’imposez-vous pas une véritable disposition de caducité afin d’éliminer cette échappatoire béante? Les Canadiens ne veulent pas assumer les coûts liés à un autre abus de pouvoir du gouvernement Trudeau.

M. Morneau [ + ]

La société dont vous parlez a été créée dans la foulée du crédit d’urgence aux entreprises afin de gérer ce même crédit.

Nous sommes conscients que le stress qui pousse certaines grandes entreprises à se tourner vers le gouvernement afin d’obtenir un crédit d’urgence risque fort de se prolonger au-delà du 30 septembre. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé en 2008-2009 : les grandes entreprises qui se sont retrouvées en difficulté ont dû se restructurer après la crise.

Nous estimons que nous avons fait des choix responsables qui nous permettront d’aider les entreprises ayant besoin de crédit. Notre objectif est évidemment de permettre aux entreprises concernées de survivre à la COVID-19 afin qu’elles puissent continuer de donner de l’emploi aux Canadiens et de contribuer à la vigueur économique du pays.

Comme on l’a dit tout à l’heure, un certain nombre d’entreprises se sont manifestées. Dans bien des cas, le crédit d’urgence leur a permis à lui seul d’obtenir du financement d’une tierce partie. Depuis deux semaines, Air Canada et la Compagnie de la Baie d’Hudson ont toutes deux réussi à obtenir des sommes importantes, et c’est ainsi que les choses doivent se faire, selon nous. Ces deux entreprises ont réussi à se financer sur le marché. Le crédit d’urgence est destiné aux entreprises qui sont incapables de faire la même chose. Il va sans dire que les difficultés peuvent apparaître plus tard et, pour bien des entreprises, plus la pandémie va durer longtemps, plus la pression sera grande. Selon nous, il s’agit du meilleur moyen d’aider l’économie et de faire en sorte qu’il y ait encore des emplois après la crise.

La sénatrice Batters [ + ]

Monsieur le ministre Morneau, lors de la crise de 2008-2009, le gouvernement conservateur a pris des mesures beaucoup plus limitées et ciblées. De plus, il a acheté des actifs de sociétés non pas parce qu’il voulait le faire, mais seulement lorsqu’il devait le faire. Cependant, revenons à la grande société d’État en question.

Avez-vous déjà utilisé cette société d’État pour distribuer l’argent des contribuables? Si c’est le cas, à qui l’avez-vous versé? Combien cela a-t-il déjà coûté aux Canadiens? A-t-on déjà établi quels seront les bénéficiaires de cette généreuse mesure financée par les contribuables? Le gouvernement Trudeau va-t-il se servir de cette société pour offrir une aide considérable aux sociétés qu’il privilégie, SNC-Lavalin et Bombardier?

Monsieur le ministre, encore une fois, pourquoi ne voulez-vous pas éliminer cette énorme lacune? Si vous promettez d’imposer une disposition de caducité à l’égard d’un pouvoir gouvernemental aussi considérable, faites-le comme il faut.

M. Morneau [ + ]

Eh bien, pour être clair, encore une fois, l’idée n’est pas de s’en servir pour acheter des entreprises. Au contraire, il s’agit d’une facilité de crédit mise en place pour donner des liquidités aux entreprises en difficulté. Le coût de ce crédit est relativement élevé, comme l’exige la situation dans laquelle se trouvent ces organisations, avec la possibilité de garanties, garanties qui peuvent être satisfaites avec l’argent des organisations, ce qui signifie qu’il n’est pas nécessaire qu’il y ait transfert de capitaux entre le gouvernement et l’entreprise.

La réponse à votre question est non. Aucun financement n’a été versé, parce que, comme notre réponse l’indiquait plus tôt lorsqu’on nous l’a demandé, aucun de ces prêts potentiels n’a encore été approuvé. De nombreuses entreprises vivent une situation difficile. La facilité sera probablement utilisée, mais elle ne l’a pas encore été parce que le processus ne fait que commencer. Encore une fois, nous espérons que cette mesure nous donnera la possibilité d’aider de grandes organisations importantes à traverser cette période sans précédent, ce qui explique évidemment pourquoi nous avons choisi ce modèle plutôt que celui utilisé pour répondre à la crise de 2008-2009, qui était certes importante, mais beaucoup plus limitée.

La sénatrice Batters [ + ]

Merci. Monsieur Morneau, le directeur parlementaire du budget, Yves Giroux, est également très préoccupé par les pouvoirs considérables dont vous disposez personnellement auprès de cette méga société d’État. Lorsqu’il a témoigné devant le Comité sénatorial des finances nationales le mois dernier, il a déclaré que le fait d’accorder un tel pouvoir à :

[...] une personne [...] sans surveillance immédiate — , est une mesure qui est, à mon avis, sans précédent dans le régime actuel et dans l’histoire du Canada. Même si la rapidité est un facteur très important en ce moment, cela ne signifie pas que le ministre devrait être autorisé à agir seul ou par lui-même pour créer des sociétés de fiducie et pour emprunter des milliards de dollars...

Le directeur parlementaire du budget a ajouté :

Ces pouvoirs sont heureusement accordés pour une période limitée, mais ils sont sans précédent, et cela m’inquiète beaucoup.

Donc malheureusement, monsieur le ministre, la durée de vie de cette méga société d’État n’est pas vraiment limitée dans le temps puisqu’elle a déjà été créée. N’allez-vous pas rassurer un peu le directeur parlementaire du budget en assujettissant cette société à une véritable disposition de caducité?

M. Morneau [ + ]

Premièrement, il est évident que je respecte l’importance du travail du Bureau du directeur parlementaire du budget. Il permet au Sénat, à la Chambre des communes et aux Canadiens de mieux comprendre les finances fédérales. Je crois qu’il effectue un travail important.

Nous allons certainement mettre en place des mesures de protection appropriées concernant le financement des grandes entreprises. Nous avons fait en sorte qu’il y ait plusieurs niveaux de diligence raisonnable tandis que nous traversons cette épreuve, et nous maintiendrons cette approche. C’est complexe. Cela nécessite beaucoup d’expertise, une expertise que le gouvernement possède dans une certaine mesure, mais aussi une expertise que nous devrons aller chercher à l’externe, sans parler d’une gouvernance appropriée. C’est ce que nous cherchons à faire.

La sénatrice Batters [ + ]

Monsieur le ministre, en mars, peu après le début de la pandémie, vous avez promis ici même que le gouvernement Trudeau allait très bientôt fournir de l’aide au secteur pétrolier et gazier. Vous aviez dit : « Dans quelques heures, ou peut-être dans quelques jours [...] ».

Vous avez fait cette promesse il y a maintenant 90 jours, monsieur le ministre. Cela fait presque 13 semaines et plus de 2 160 heures, mais qui compte? Je vais vous dire qui compte, monsieur le ministre. Ce sont les travailleurs du secteur pétrolier et gazier, dont les emplois étaient déjà menacés à cause des politiques antiénergétiques de votre gouvernement. Ce sont les petites et moyennes compagnies pétrolières, qui ne peuvent plus payer leurs travailleurs parce que l’aide que vous aviez promise n’arrive tout simplement pas. Ce sont les petites entreprises qui dépérissent ou qui ont fermé boutique, et les petites collectivités rurales en régression. Ce sont toutes ces collectivités, un peu partout dans ma région de l’Ouest canadien, dont la survie dépend du secteur de l’énergie que votre gouvernement semble avoir abandonné. Quand le gouvernement Trudeau cessera-t-il de se contenter de platitudes et passera-t-il aux actes pour le secteur énergétique canadien et les millions de Canadiens qui en dépendent?

M. Morneau [ + ]

Je vous remercie. Il y a lieu de dissiper un gros malentendu.

Je vais être très clair : les programmes que nous avons mis en place soutiennent tous les secteurs au Canada et l’ensemble de la population. La Prestation canadienne d’urgence est évidemment destinée aux Canadiens de tout le pays.

La subvention salariale concerne à présent 223 000 demandeurs, pour un total de plus de deux millions de personnes, soit un employé canadien sur sept, y compris le personnel d’importantes grandes entreprises et de nombreuses petites et moyennes entreprises du secteur de l’énergie. Le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes touche désormais 680 000 personnes, dont plus de dix mille en Alberta, beaucoup d’entre elles dans le secteur de l’énergie.

Le programme auquel vous faites peut-être allusion est l’approche de prêt basée sur les réserves, de la Banque de développement du Canada. Ce programme va également de l’avant, mais il a nécessité le règlement de nombreux détails.

L’aide circule, le crédit circule dans tout le pays pour les particuliers et les entreprises de tous les secteurs, y compris le secteur pétrolier et gazier dans les régions où il est vital. Nous continuerons de soutenir tous les secteurs. Je me réjouis de voir que nos mesures atteignent exactement leurs cibles. Au fur et à mesure que nous faisons face à des difficultés, nous essayons d’améliorer ou de modifier les programmes pour les surmonter, et cette approche se poursuivra certainement.

La sénatrice Batters [ + ]

Les commentaires que vous avez faits au Sénat ce jour-là ne laissent place à aucun malentendu. Vous parliez du secteur de l’énergie, et les promesses creuses de votre gouvernement ne paieront pas les factures, monsieur le ministre. Vous avez 90 jours de retard et il vous manque des milliards de dollars. Les politiques anti-énergie du gouvernement Trudeau ont dévasté...

La présidente [ + ]

Sénatrice Batters, je suis désolée, mais vos 10 minutes sont écoulées.

La sénatrice Forest-Niesing [ + ]

J’ai deux questions à vous poser. Je vous remercie, messieurs les ministres, d’avoir accepté l’invitation de comparaître devant nous aujourd’hui.

Mes deux questions portent sur le thème du transport. Je vais les poser en vous laissant le soin de déterminer lequel d’entre vous peut y répondre.

Je pose la première au nom de mon collègue le sénateur Éric Forest. Il s’intéresse à la question suivante : par comparaison avec l’an dernier, on a noté une baisse de 500 millions de dollars du Fonds pour l’infrastructure de transport en commun. Il pose la question suivante :

Comme on le sait, il y a plusieurs projets en attente de financement au Québec et partout au Canada. Doit-on s’attendre à un réinvestissement majeur dans ce fonds pour favoriser le développement du transport en commun, et ainsi, la relance économique?

M. Morneau [ + ]

Je peux commencer. Comme je l’ai dit il y a quelques minutes, nous nous trouvons en ce moment dans une situation de relance prudente, donc nous ne sommes pas rendus là dans l’immédiat. Nous ne pouvons pas dire précisément ce que nous ferons pour ce qui est des infrastructures, mais nous savons que le transport en commun est très important. C’est pour cela que, dans notre approche avec les provinces, nous avons considéré améliorer la situation des municipalités. Cela veut dire que nous reconnaissons l’importance des besoins des municipalités, et que l’un de ces besoins est le transport en commun.

Dans notre approche sur le plan des négociations actuelles avec les provinces, nous considérons d’abord la situation actuelle des municipalités. Nous pourrons donc vous fournir des réponses ultérieurement.

Au sujet d’un investissement plus important à l’avenir, et étant donné les mesures de stimulation, j’espère que nous serons en mesure d’en dire plus au cours des prochains mois.

La sénatrice Forest-Niesing [ + ]

Merci. Ma deuxième question est la suivante.

La question porte sur les aéroports communautaires et régionaux et leur survie à très court terme. J’ai remarqué que le gouvernement a attribué 38 millions de dollars au Programme d’aide aux immobilisations aéroportuaires dans le Budget principal des dépenses. De plus, en réponse à la pandémie, certaines mesures d’urgence ont été adoptées pour soutenir les entreprises, mais la plupart des aéroports régionaux qui ont des modèles de gouvernance qui font intervenir les municipalités sont inadmissibles. Ils ne sont pas admissibles à ces mesures.

Les aéroports régionaux sonnent l’alarme. Ils ont été durement touchés. Beaucoup d’entre eux sont au bord de la faillite, ayant perdu jusqu’à 90 % de leurs revenus et ayant des coûts fixes.

Le gouvernement prévoit-il prendre des mesures de soutien à court terme pour éviter que ces vecteurs économiques et sociaux si essentiels aux régions éloignées du Canada fassent faillite? Dans l’affirmative, quelles sont ces mesures? Dans la négative, pouvez-vous expliquer pourquoi?

M. Morneau [ + ]

Je peux parler de ce que nous avons accompli à cet égard, et décrire notre approche.

Je pense que vous savez que nous avons éliminé un certain nombre de tarifs dans les aéroports du pays, ce qui a aidé. Nous avons également déclaré que les mesures que nous avons mises en place pour l’industrie et les organisations dans tout le pays sont assujetties à des critères uniformes. Par exemple, pour bénéficier de la subvention salariale, une entreprise doit avoir perdu 30 % ou plus de ses revenus.

Nous examinons actuellement la possibilité de prolonger la subvention salariale, et la manière dont nous pourrions modifier les critères de cette subvention pour nous assurer qu’elle produise les effets escomptés. Nous avons procédé à une série de consultations avec les entreprises et les syndicats afin d’obtenir leur avis. Nous serons bientôt en mesure de prendre une décision définitive sur la manière dont ces programmes seront modifiés.

Je pense que beaucoup des secteurs les plus durement atteints, dont les aéroports, seront heureux de constater que nous avons pris compte de leurs défis pour élaborer cette nouvelle politique. Je suis convaincu que nous apporterons un soutien supplémentaire aux entreprises qui ont été particulièrement touchées par la pandémie.

Évidemment, à cela s’ajoutent les mesures de crédit que nous avons mises en place pour soutenir des organisations de différentes tailles. Les prêts consentis dans le cadre du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes sont destinés aux entreprises les plus petites. Les prêts accordés par la Banque de développement du Canada et Exportation et développement Canada dans le cadre du Programme de crédit aux entreprises visent les grandes entreprises. Les aéroports de la taille dont vous parlez ont probablement accès à un crédit de 12,5 millions de dollars. Les aéroports les plus importants qui touchent des revenus de plus de 300 millions de dollars peuvent bénéficier du Crédit d’urgence pour les grands employeurs dont nous avons parlé plus tôt. Certains aéroports appartiennent à cette catégorie.

Nous tentons d’offrir du soutien au moyen de mesures directes comme la subvention salariale et, au besoin, de mesures de crédit, en fonction de la situation. Nous ne cherchons pas nécessairement à cibler les mesures d’intervention sur des secteurs précis, mais plutôt à venir en aide à toutes les organisations qui, selon les critères définis, sont touchées directement par la COVID-19.

La sénatrice Forest-Niesing [ + ]

Ce qui m’inquiète, concernant les mesures d’urgence qui ont déjà été mises en place, notamment en ce qui a trait à l’aide pour les loyers des aéroports, c’est que les grands aéroports ont pu en bénéficier. Les aéroports régionaux, qui constituent des liens extrêmement importants pour le transport non seulement des passagers, mais aussi des marchandises essentielles à la survie des régions éloignées, ont des modèles de gouvernance qui les rendent inadmissibles en raison de leur lien avec l’administration municipale, qui est peut-être propriétaire de leur bâtiment, et du fait qu’il n’y a peut-être pas de loyer à payer, donc ils ne peuvent pas se prévaloir de ces mesures.

Je pense que l’urgence demeure en ce qui concerne les aéroports régionaux. Si nous ne voulons pas en perdre un seul — il en existe plus de 50 au Canada, et les régions éloignées en dépendent —, les mesures supplémentaires les concernant devront être empreintes de créativité. Je vous laisse y réfléchir.

M. Morneau [ + ]

Je peux dire que je suis conscient du problème. D’autres parlementaires ont attiré mon attention sur la question. Nous faisons de notre mieux pour soutenir la multitude de secteurs qui sont durement mis à l’épreuve actuellement, dont celui-là, et nous réfléchissons à différentes façons de pouvoir le faire.

De toute évidence, les petits aéroports régionaux pourraient par exemple obtenir de l’aide auprès des administrations municipales. Cependant, nous ne suivons pas de plan de match. Les problèmes qui se présentent au fil de la crise prennent sans cesse de nouvelles formes. Plus la pandémie perdure, plus les organisations subissent un stress supplémentaire, ce qui nous oblige à réévaluer si les mesures prises conviennent. C’est ce que nous essayons de faire au quotidien.

La sénatrice Forest-Niesing [ + ]

Il ne me reste que quelques secondes, alors je tiens simplement à exprimer ma reconnaissance envers le gouvernement pour la rapidité et la créativité dont il a fait preuve dans ses interventions au cours de cet état d’urgence sans précédent.

La sénatrice Martin [ + ]

Ma première question s’adresse au ministre Morneau. D’une certaine façon, elle rejoint les questions de ma collègue sur les petits aéroports, mais elle porte sur les petites entreprises.

Je sais que, comme vous le dites, les entreprises ont bénéficié de facilités de crédit. De nombreuses entreprises ont pu obtenir de l’aide, mais, monsieur le ministre, les très petites entreprises, les entreprises familiales, au départ, n’étaient pas admissibles au Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. Lorsque vous avez modifié les critères pour admettre les demandeurs dont la masse salariale est de moins de 20 000 $, ces entreprises ont dû attendre encore plus longtemps. Étant donné que c’est EDC qui gère le Compte et non une entité qui connaît déjà les coopératives de crédit, certaines de ces entreprises qui avaient déjà un compte dans une coopérative de crédit ont dû attendre d’obtenir leur accréditation, ce qui a pris environ un mois.

Enfin, le 19 mai, vous avez annoncé que ces entreprises pouvaient s’attendre à recevoir de l’aide. L’aide en question était censée être accordée 19 juin mais, la veille, vous avez publié un gazouillis indiquant que la durée du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes n’allait pas être prolongée comme prévu. Ce fut un dur coup pour les entreprises et les familles qui attendaient. Évidemment, le gazouillis contenait peu d’explications et pas de nouvelle date.

Monsieur le ministre, qu’est-il arrivé à cette date tant attendue? Ces petites entreprises attendent depuis des mois. Pourquoi avez-vous retardé davantage l’aide que ces entreprises attendent depuis trop longtemps? D’après les appels que nous avons reçus, j’en suis venu à comprendre qu’il s’agit des entreprises les plus vulnérables. Quand allez-vous enfin prolonger la durée du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes afin d’aider ces entreprises? Avez-vous fixé une date?

M. Morneau [ + ]

Merci. Je crois sincèrement qu’il est important de mettre les choses en contexte. En l’espace de très peu de temps, nous avons créé de nombreux programmes ayant une portée très vaste dans l’ensemble du pays. En ce qui a trait au Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, on parle de chiffres très élevés; en effet, le 12 juin, il y avait déjà 680 000 demandeurs. Environ 680 000 petites entreprises ont été approuvées pour ce programme, ce qui totalise 27,05 milliards de dollars de versements cumulatifs.

Selon moi, il faut toujours commencer par rappeler le contexte. Bien sûr, plus que 680 000 entreprises au pays répondent aux critères d’admissibilité. Toutefois, c’est une quantité énorme d’entreprises qui ont présenté une demande, obtenu une réponse positive et déjà reçu des versements.

Notre engagement était d’élargir le bassin d’entreprises admissibles. En toute bonne foi, nous avons établi les critères d’admissibilité dès le départ. Les gens venaient à nous pour nous dire, dans certains cas, qu’ils ne payaient pas leurs employés de façon à ce que le livre de paie puisse servir d’indicateur. Nous avons désigné le livre de paie comme indicateur initial tout simplement parce que c’était quelque chose que les banques pouvaient vérifier. Quand nous concevons des programmes de prêt, nous nous efforçons de toujours veiller à ce que les banques aient un moyen de vérification pour authentifier la légitimité des organisations.

Quand nous avons constaté ce problème, nous avons décidé d’élargir les critères de manière à ce que le programme soit accessible à un plus grand nombre d’entreprises, comme nous le souhaitions. Nous nous attendions à pouvoir commencer d’accorder des prêts vendredi dernier.

Disons premièrement que nous allons bel et bien mettre en œuvre cette mesure. Personne ne devrait être déçu et penser que le prêt ne lui sera pas accordé. Le prêt arrive. Le problème est qu’au cours de la dernière semaine, les multiples institutions financières qui devaient se préparer à l’élargissement des critères avaient besoin de se doter d’une capacité administrative qu’elles ne possédaient pas auparavant. Nous avons su la veille qu’elles ne pensaient pas être prêtes à répondre aux attentes. Elles ont demandé un délai supplémentaire de quelques jours.

J’ai répondu que nous voulions bien faire les choses et que nous allions donc leur accorder quelques jours de plus. Je dirais aux propriétaires de petites entreprises qu’ils peuvent toujours compter sur cette mesure et qu’il n’est pas question de l’annuler. Nous avons élargi les critères d’admissibilité. Nous nous assurons que l’octroi des prêts peut être géré par les institutions financières, y compris les coopératives de crédit, qui sont maintenant beaucoup plus nombreuses à avoir notre agrément. Les prêts seront bientôt accordés. Comme nous avons raté notre échéance de vendredi dernier, je ne voudrais pas m’engager aujourd’hui à respecter une autre date, mais je peux dire que les gens travaillent jour et nuit pour tout finaliser.

La sénatrice Martin [ + ]

Je vous remercie, monsieur le ministre. Dans votre réponse, vous avez mentionné d’abord quelques jours, puis un avenir rapproché. Vous soulignez que cette période sera brève, mais rappelons que dans les petites entreprises familiales, les gens travaillent parfois 16 ou 20 heures par jour et qu’ils attendent depuis plusieurs mois. C’est donc crucial, sans oublier le gazouillis publié la veille. Bref, je tiens à rappeler très respectueusement que ces gens souffrent vraiment. Je tenais à le dire en leur nom.

Ma prochaine question s’adresse au ministre Duclos.

Monsieur le ministre Duclos, mes questions portent sur le Bureau du Conseil privé, qui a reçu un montant supplémentaire de 48,7 millions de dollars pour la communication et le marketing liés à la COVID-19.

Un porte-parole du directeur parlementaire du budget a dit le mois dernier qu’un montant de 26,7 millions de dollars provenant de ces fonds sera consacré, et je cite :

[...] à d’autres initiatives ministérielles de publicité liées à la COVID-19, au besoin.

Monsieur le ministre, quelle portion de ce montant est-elle dépensée pour les conférences de presse matinales que le premier ministre tient sur le perron de son « chalet » plutôt que sur la Colline du Parlement?

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie, sénatrice Martin, de cette question posée en français. Je vous remercie de la gentillesse dont vous faites preuve en la posant dans ma langue maternelle.

Je pourrais vous dire tout de suite que, en période de crise et de pandémie comme nous l’avons vécue et comme nous la vivons encore, les Canadiens sont inquiets. Ils sont inquiets non seulement pour leur portefeuille et leur capacité à joindre les deux bouts, mais surtout, dans la plupart des cas, pour leur santé. C’est pour cela que les activités de communication, d’information et parfois de réassurance auprès des gens, et plus particulièrement des gens qui sont plus vulnérables et plus inquiets, sont si importantes.

Les ressources que vous avez identifiées et décrites sont là justement pour accompagner les Canadiens, les informer et les guider dans les choix personnels qu’ils doivent faire pour protéger leur santé et la santé de leurs proches. Elles servent aussi à les informer sur les bonnes façons non seulement de vivre leur quotidien, mais aussi d’entrevoir leur avenir.

C’est un environnement de communication très important qui permet non seulement d’informer et de rassurer les gens, mais aussi de les guider dans leurs comportements, et il y a une foule d’activités prévues qui pourront être réalisées à l’aide de ces fonds.

La sénatrice Martin [ + ]

Merci. J’aimerais toutefois en savoir davantage sur les sommes affectées à ces annonces quotidiennes. C’était ma question. Elle s’inscrit dans un souci de transparence, un aspect que vous avez vous-même qualifié de très important. Si nous pouvions avoir ces renseignements, j’en serais ravie.

Monsieur le ministre, on prévoit un montant de 7,5 millions de dollars de crédits pour, et je cite :

[...] appuyer la présence régionale et pour stabiliser ainsi qu’améliorer la capacité du BCP et le transfert du personnel exonéré vers les bureaux régionaux des ministres.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous expliquer exactement ce que signifient ces mots, en nous donnant une ventilation détaillée de la façon dont ces 7,7 millions de dollars qui proviennent des poches des contribuables ont été dépensés?

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie encore une fois de votre question. Pour en revenir à votre question précédente, je vous assure que la présence du premier ministre est importante. Il est bien présent depuis plusieurs semaines. Il y a aussi plusieurs autres activités qui sont peut-être moins visibles, auxquelles le Bureau du Conseil privé et plusieurs autres institutions fédérales participent pour rassurer, communiquer, informer et guider les Canadiens.

Quant à la question des bureaux régionaux des ministres, dans le contexte de la pandémie actuelle, les directives de la santé publique ont été centrales en ce qui a trait à toutes les opérations du gouvernement. Les fonctionnaires ont été invités — et même forcés, dans plusieurs cas — à travailler de la maison. Je pourrai donner des détails plus tard sur ce que nous avons appris et sur les bons résultats que nous avons atteints, mais il y a aussi des activités et des rencontres qui ont eu lieu à distance entre les membres du Cabinet et entre de hauts fonctionnaires qui ont exigé des investissements en matière de sécurité et de technologie au sein des bureaux régionaux des ministres.

La présidente [ + ]

La période de 10 minutes est terminée.

La sénatrice Moncion [ + ]

Merci d’être ici parmi nous aujourd’hui. Ma question concerne l’encours maximal de la dette. Je sais que vous avez dû répondre à des questions à ce sujet au début de la séance. L’article 43.1 de la Loi sur la gestion des finances publiques a été abrogé en juin 2016. Cette modification rétablit l’exigence qui veut que le ministre des Finances obtienne l’autorisation du Parlement pour ses activités d’emprunt. Pour satisfaire à cette exigence d’autorisation des emprunts renouvelés, le Parlement a adopté la Loi autorisant certains emprunts, qui est entrée en vigueur le 23 novembre 2017. Cette loi établit un encours maximal de la dette contractée sur les marchés par le gouvernement du Canada et les sociétés d’État à 1,168 milliard de dollars et octroie des pouvoirs au gouverneur en conseil pour qu’il autorise les emprunts qui se trouvent à l’intérieur de cette limite. En vertu de cette loi, le gouvernement doit faire rapport au Parlement sur l’état de l’emprunt au minimum tous les trois ans.

Étant donné que la situation financière du pays évolue rapidement dans le contexte actuel, et compte tenu des obligations du gouvernement de faire rapport au Parlement tous les trois ans, quand peut-on s’attendre à ce que le gouvernement fasse rapport au Parlement en vertu de cette loi ou dépose un projet de loi afin d’établir un nouvel encours maximal?

M. Morneau [ + ]

Est-ce que la question s’adresse à moi?

M. Duclos [ + ]

Je crois que oui. C’est un peu trop technique. C’est un peu injuste d’inviter le ministre Morneau à se prononcer sur des aspects techniques. Certains sont gouvernés par des décrets du gouverneur en conseil. Si vous vous intéressez davantage aux aspects techniques, je peux demander à M. Purves d’intervenir.

M. Morneau [ + ]

Nous savons qu’il est très important de suivre les règles. Nous avons l’intention de suivre les règles ayant trait aux informations que nous devons présenter au Parlement. Nous vous assurons que nous le ferons avant les dates prévues.

La sénatrice Moncion [ + ]

Je corrige tout de suite le montant : on parle bien de 1,168 billion, et non de 1,168 milliard de dollars. Ce serait merveilleux d’avoir une dette aussi basse que celle-là.

Les dépenses d’urgence faites par le gouvernement dans le contexte de la COVID-19 sont financées en grande partie par la Banque du Canada et en partie par des emprunts que fait le gouvernement sur les marchés. C’est donc dire que les dispositions de la Loi autorisant certains emprunts ne s’appliquent pas à la situation actuelle.

Pourriez-vous nous donner des explications au sujet du financement par emprunt lié à la COVID-19 et de la façon dont il figurera dans les états financiers du gouvernement?

M. Morneau [ + ]

Nous allons indiquer l’ensemble des emprunts dans la mise à jour financière, ce qui inclura la dette de la Banque du Canada. Notre comptabilité comprendra toute cette information. La mise à jour sera transparente et donnera un portrait fidèle des emprunts et des difficultés que nous rencontrons à cause de la pandémie de COVID-19. Nous avons hâte de présenter cette mise à jour.

La sénatrice Moncion [ + ]

Pouvons-nous nous attendre à avoir plus de précisions sur les montants lors de la mise à jour financière que vous allez nous présenter le 8 juillet?

M. Morneau [ + ]

Oui.

La sénatrice Moncion [ + ]

Merci.

Si la sénatrice Pate le souhaite, je lui cède le temps de parole qu’il me reste...

La sénatrice Pate [ + ]

Je remercie les deux ministres de leur présence, ainsi que le gouvernement pour l’aide financière fournie aux Canadiens durant cette période critique.

On estime que de maintenir les gens dans la pauvreté coûte de 72 à 84 milliards de dollars chaque année, ce qui comprend les dépenses du gouvernement en matière de soins de santé, de lutte contre le crime, d’aide juridique et de soutien d’urgence.

La Banque du Canada a affirmé qu’un programme permanent semblable à la Prestation canadienne d’urgence serait un bon investissement et accélérerait les interventions auprès des gens dans le besoin lors de crises éventuelles dans l’avenir.

Le directeur parlementaire du budget estime à 71 milliards de dollars le coût de la mesure temporaire qu’est la Prestation canadienne d’urgence, y compris la récente prolongation de huit semaines. À titre de comparaison, le directeur parlementaire du budget souligne que les coûts de fonctionnement nets liés à un régime de revenu minimum garanti se chiffreraient à 44 milliards de dollars par année. Par ailleurs, un régime de revenu minimum garanti ferait économiser aux provinces et aux territoires 15 milliards de dollars par année en aide sociale.

Les avantages d’un régime de revenu minimum garanti ne sont pas seulement d’ordre financier. Un revenu minimum garanti pour tous les Canadiens fait partie des appels à la justice formulés par la Commission d’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Il a aussi été recommandé par le Bureau de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels.

Dans quelle mesure le gouvernement a-t-il considéré ces diverses recommandations dans le cadre du processus budgétaire, étant donné les économies que l’on pourrait réaliser en aval avec un programme de revenu minimum garanti à long terme qui réduirait les répercussions de la pauvreté sur le système de santé, l’appareil judiciaire, la justice pénale et d’autres systèmes, et si on veillait à mieux outiller le Canada pour traverser les prochaines crises comme celle causée par la pandémie de COVID-19?

M. Duclos [ + ]

Merci, sénatrice Pate. J’accorde énormément d’importance à cette question ainsi qu’à votre sensibilité et à vos connaissances par rapport à ces questions et au fait qu’il est important de tenir compte non seulement du coût à court terme de la pauvreté, qui est considérable, mais aussi, comme vous l’avez souligné, du coût à long terme de la pauvreté, de la vulnérabilité et de l’exclusion.

C’est l’une des raisons pour lesquelles nous devions et nous voulions intervenir rapidement et efficacement à l’égard de cette crise en particulier, car il était évident non seulement qu’on risquait de subir une grave dépression économique, mais aussi que l’on risquait fortement de devoir faire face à une grave crise sociale. Personne dans cette enceinte ne peut s’imaginer l’ampleur de la crise sociale qui sévirait actuellement au Canada si des millions de personnes et de familles n’arrivaient pas à subvenir à leurs besoins.

Évidemment, nous devrions tous être conscients du niveau d’intégrité et de rigueur dont les gouvernements doivent faire preuve en matière financière, mais aussi de la responsabilité sociale que nous devons assumer à l’égard des citoyens qui n’auront pas d’autres ressources si nous ne les aidons pas.

Cette question est également liée aux discussions et aux débats importants qui ont lieu sur le revenu minimum garanti. En fait, cette approche a inspiré l’instauration de l’Allocation canadienne pour enfants pendant le premier mandat, une prestation qui réduit encore aujourd’hui le niveau de pauvreté chez les enfants de 40 % tous les mois. C’est aussi le cas d’une grande partie des mesures que nous avons mises en place pour soutenir les aînés, en bonifiant la Sécurité de la vieillesse, le Régime de pensions du Canada et le Supplément de revenu garanti, le tout dans l’objectif d’offrir un filet de sécurité sociale qui est à la fois efficace, comme le système dont vous parliez, et équitable pour tous.

Pour l’avenir, nous avons tiré des leçons de la crise, y compris le fait que le régime canadien d’assurance-emploi n’a pas été conçu pour traverser de telles tempêtes. D’ailleurs, même avant la crise, il n’était pas bien adapté à l’évolution du marché du travail et des conditions sociales dans notre pays.

Vos commentaires sont très précieux. Nous vous encourageons à continuer votre travail parce que nous sommes tous convaincus que ces questions doivent faire l’objet de discussions et qu’il ne faut pas les perdre de vue.

La sénatrice Pate [ + ]

Merci beaucoup. Je vais rapidement passer à un autre sujet.

J’étais préoccupée plus tôt lorsqu’on a insisté sur une mesure visant à poursuivre les gens qui ont présenté une demande pour la Prestation canadienne d’urgence par erreur, ou qui ont présenté une fausse demande. Je suis très heureuse de voir que cette idée a été abandonnée en partie. Monsieur le ministre Duclos, c’est avec plaisir que j’ai écouté vos observations à ce sujet. Je serais toutefois curieuse de savoir quelles seraient les conséquences budgétaires de la fraude liée à la Prestation canadienne d’urgence comparativement à celles de la fraude associée aux autres mesures d’aides liées à la COVID-19, et à quelle fréquence ce genre de fraude survient. Je pense notamment aux mesures axées sur les entreprises qui ne prévoient pas de sanctions pour les fraudeurs. Je serais également curieuse de connaître, de façon plus générale — le ministre Morneau est probablement mieux en mesure de me répondre —, le montant des recettes fiscales perdues chaque année à cause de l’évasion fiscale et de l’évitement fiscal auxquels s’adonnent les entreprises et les particuliers bien nantis.

Le directeur parlementaire du budget a récemment estimé que les pertes causées par l’évasion et l’évitement fiscaux de la part de multinationales pourraient s’élever à 25 milliards de dollars par année. À ma connaissance, jamais un pareil montant n’a été avancé pour décrire les pertes financières liées aux erreurs dans les demandes pour la Prestation canadienne d’urgence.

La présidente [ + ]

Je suis désolée, mais vos 10 minutes sont écoulées. Vous pouvez toujours soumettre une réponse par écrit.

Le sénateur Tannas [ + ]

Ma question s’adresse au ministre Morneau. Plusieurs programmes sont en cours d’élaboration. C’est notamment le cas du Programme de cofinancement et du Programme de garantie et de prêts pour les petites et moyennes entreprises. Je pense qu’on mettra en place d’autres programmes pour les entreprises de moyenne envergure en partenariat avec des institutions financières, des grandes banques et des coopératives de crédit, entre autres.

Je peux vous dire que, d’après mes contacts, il ne semble pas que les institutions financières s’empressent de participer à de telles initiatives. En effet, malgré les garanties offertes, elles doivent quand même prendre des risques et elles sont réticentes à le faire. On a observé la même situation au fil des décennies avec les programmes de prêts aux petites entreprises. Les banques ont été réticentes à y recourir, et elles ont invoqué de nombreuses excuses pour s’abstenir de le faire, notamment la trop grande quantité de formalités administratives.

Êtes-vous satisfait du taux de participation? Pensez-vous que vos partenaires, en particulier les banques et les coopératives de crédit, déploient suffisamment d’efforts et font preuve d’assez d’enthousiasme? Ces programmes de prêts joueront un rôle majeur dans la relance. Si votre personnel et vous constatez qu’il y a une résistance à ces programmes, et qu’elle vient des sources habituelles, il est maintenant temps d’agir. Qu’en pensez-vous?

M. Morneau [ + ]

Merci. Je dirais d’abord qu’il s’agit selon moi d’une question très importante. Nous avons mis ces mesures en place parce que nous croyons que la présence de capitaux dans le marché présentement est essentielle, en particulier pour trouver des façons de permettre aux entreprises de traverser la crise.

Je dois dire franchement que certains des programmes que nous avons créés ont été d’une efficacité phénoménale. J’ai parlé du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. Bien sûr, tout n’est pas parfait, car il reste encore beaucoup à faire; cependant, il a donné accès à du crédit à un très grand nombre d’entreprises très rapidement. Les institutions financières — les banques et les coopératives de crédit — ont été très efficaces en général sur ce plan.

En ce qui concerne le Programme de crédit aux entreprises, j’ai deux observations à formuler. D’abord, il est trop tôt pour que je puisse répondre de façon complète à votre question. Si on regarde le déploiement du programme, qui avait bien fonctionné en 2008 et en 2009, on constate une tendance similaire. La participation au programme n’était pas élevée au début puis, à mesure que les organisations éprouvaient de plus en plus de problèmes, la participation a crû de façon continue.

Je crois que nous en sommes toujours au point où il est important de nous rappeler que nous fournissons un montant considérable d’argent, de liquidité, aux organismes par la voie de la subvention salariale et que nous offrons de l’aide à leurs employés grâce à la Prestation canadienne d’urgence. Je ne suis pas encore en mesure de vous donner une réponse claire à savoir si nous estimons que le nombre d’entreprises qui se prévalent de cette mesure d’aide correspond à ce que nous attendions.

Cela dit, j’essaie de demeurer proactif. Je communique constamment avec les institutions financières. Nous offrons une garantie de 80 % pour ces prêts parce que nous voulons rendre le crédit facilement accessible. Comme vous l’avez conseillé, si je ne m’abuse, nous continuerons de faire en sorte que ce programme ait l’effet désiré. Nous poursuivrons nos efforts en ce sens.

Enfin, pour ce qui est des grandes entreprises, je crois que ces dernières sont suffisamment averties pour savoir si elles ont besoin de recourir à cette forme de financement, compte tenu des autres sources de crédit disponibles.

Vous avez cerné l’aspect sur lequel nous devons concentrer notre attention. Toutefois, je ne saurais vous dire, pour l’instant, si cette mesure atteint nos objectifs, faute de renseignements.

Le sénateur Tannas [ + ]

Je vais vous donner un autre conseil non sollicité : tendez l’oreille près de la première ligne. Vous y obtiendrez peut-être une réponse bien différente que dans les bureaux de direction de Bay Street.

Je cède le reste de mon temps de parole au sénateur White. Merci, monsieur le ministre.

Le sénateur White [ + ]

Je remercie les deux ministres et les membres de leur personnel d’être parmi nous aujourd’hui.

Je m’adresse d’abord au ministre Duclos. Le Conseil du Trésor a créé le système de gestion des dépenses vers 2007 et il a principalement exigé que les nouveaux programmes proposés fassent l’objet d’un examen systématique, afin de s’assurer qu’ils répondent aux besoins des Canadiens, correspondent aux responsabilités fédérales, produisent des résultats et assurent l’optimisation des ressources.

Au cours des derniers mois, un certain nombre de nouveaux programmes, représentant des milliards de dollars de dépenses, ont été mis en œuvre. J’essaie d’obtenir du Conseil du Trésor l’assurance que ces nouveaux programmes respectent les mêmes normes que celles qui se seraient appliquées aux programmes précédents et que, le cas échéant, le système de gestion des dépenses est utilisé comme prévu.

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie, sénateur White. Permettez-moi de répondre en trois temps.

Premièrement, nous avons dû réagir rapidement.

Deuxièmement, nous avons régulièrement ajusté nos politiques, d’une part en fonction de l’évolution de la situation et, d’autre part, de la rétroaction constante des Canadiens, et particulièrement des entreprises.

Troisièmement, j’ai clairement fait savoir à mon équipe au Secrétariat — ce que tous les ministères et organismes ont compris — que pendant que nous prenons ces mesures, il faut assurer le niveau d’intégrité et de surveillance attendu du gouvernement fédéral, en particulier pour ce qui est de l’optimisation des ressources dont vous parlez.

La présente crise n’a en rien diminué l’utilité et l’importance du système de gestion des dépenses. Ce système demeurera en place jusqu’à la fin de la crise, au moment où nous en sortirons et lorsque nous mettrons en œuvre certaines des leçons que nous avons tirées au cours des dernières semaines.

Le sénateur White [ + ]

Dans la même veine, nous avons certainement compris que le gouvernement devrait fournir des milliards de dollars en programmes et en services afin de réagir efficacement à la COVID-19. Le Conseil du Trésor a autorisé la prolongation des marchés conclus en cas d’urgence.

Toutefois, le Conseil du Trésor a du même coup indiqué que les ministères ne devraient pas effectuer d’achats ponctuels en dehors de l’achat coordonné de produits, comme ce qui a par exemple été organisé par SPAC. Par ailleurs, le Conseil du Trésor a indiqué aux ministères de faire le suivi des dépenses associées à la COVID-19 dans le cadre de leur rapport ministériel de dépenses en réponse à la COVID-19.

Êtes-vous certain que les ministères ne font pas d’achats ponctuels en dehors des achats coordonnés de SPAC, et qu’ils assurent un suivi exact de toutes leurs dépenses en réponse à la pandémie? Par ailleurs, avez-vous instauré un processus de vérification afin de rassurer le public?

M. Duclos [ + ]

Comme vous l’avez dit, et comme vous l’avez laissé entendre, les ministères et les organismes ont entre eux d’importantes responsabilités et relations. Le Conseil du Trésor fait évidemment partie de ces organismes qui ont la responsabilité d’offrir aux autres ministères le soutien administratif, de surveillance et d’application dont ils pourraient avoir besoin.

Nous fournissons ce soutien d’une manière qui, dans le cadre de cette crise, tient compte de l’urgence et de la transparence auxquelles on est en droit de s’attendre relativement aux mesures que nous prenons. Nous allons continuer dans cette veine car, comme vous l’avez dit, il ne s’agit pas seulement de prendre les bonnes décisions et d’obtenir les bons résultats, encore faut-il que les Canadiens continuent d’avoir confiance en l’intégrité de nos institutions.

Le sénateur White [ + ]

Merci beaucoup.

Ma dernière question s’adresse à vous, monsieur le ministre, si vous me le permettez. Un certain nombre d’organismes à but non lucratif qui ont engagé des dépenses d’investissement dans tout le pays pour construire des refuges pour sans-abri, certains à Ottawa — par exemple, des logements pour les anciens combattants sans-abri —, ont de réelles difficultés à recevoir le même niveau de dons qu’avant la crise de la COVID.

Le gouvernement a-t-il envisagé d’augmenter le crédit d’impôt pour ceux qui font des dons à ce type de projets, en particulier les dépenses d’investissement, à but non lucratif, pour encourager les dons et, en même temps, augmenter le niveau de construction? C’est d’ailleurs ce que nous avons vu dans certains États des États-Unis il y a 15 ou 20 ans dans le cadre des initiatives lancées en faveur des sans-abri.

M. Morneau [ + ]

Je vous remercie. Nous avons essayé d’utiliser des approches qui tiennent compte des effets directs de la COVID-19 et des soutiens qui seraient liés à ce défi.

Vous avez vu comment nous avons utilisé les subventions salariales pour compenser la réduction des revenus et aider les organisations, y compris les organisations à but non lucratif, à relever ces défis dans tout le pays.

Nous avons évité de toucher au régime fiscal, qui est très large, pour les problèmes que les gens pourraient avoir à résoudre. Ce n’est pas l’approche que nous privilégions pour résoudre ces problèmes.

Je ne dis pas que nous excluons d’emblée certaines options, mais notre approche consiste essentiellement à soutenir directement les personnes, puis les organisations, afin que ces dernières puissent les garder au travail.

Quant aux problèmes et défis à long terme, nous espérons pouvoir les résoudre, y compris par le truchement du régime fiscal, lorsque nous reviendrons à un fonctionnement plus normal.

La sénatrice Galvez [ + ]

Merci beaucoup, monsieur le ministre Duclos et monsieur le ministre Morneau, d’être parmi nous afin de répondre à nos questions.

Ma question porte sur la transparence maximale, ce dont vous avez parlé dans votre introduction, monsieur Duclos. Nous avons des programmes du plan d’action pour un gouvernement ouvert et, selon votre site Web, certains engagements en matière de gouvernement ouvert facile à comprendre, de transparence financière et reddition de comptes, de transparence des entreprises et de gouvernement numérique et services sont censés être respectés.

Le projet de loi C-13 a permis au gouvernement d’augmenter la responsabilité pour le Compte du Canada. Ainsi, le 5 juin, il a été publié dans la Gazette du Canada que le total des dettes et des obligations pour le Compte du Canada ne peut à aucun moment être supérieur à 93 milliards de dollars.

Il s’agit d’une somme incroyable pour un compte, premièrement, qui risque l’argent des contribuables et, deuxièmement, sur lequel le vérificateur général, malgré les engagements qui ont été pris envers la transparence, n’a pu obtenir d’information, comme il en fait état dans son rapport de 2014.

Le gouvernement a décidé d’exclure de la partie I, page 2, du Budget supplémentaire des dépenses les paiements versés à Exportation et développement Canada parce que ses programmes ne reçoivent pas de fonds du Trésor. Or, le Compte du Canada, lui, reçoit des fonds du Trésor.

Je vais vous lire un passage du rapport d’EDC pour 2015-2016 :

Le gouvernement assume effectivement les risques financiers qui y sont associés en imputant au Trésor tous les fonds nécessaires pour effectuer des opérations.

L’accessibilité et la transparence des données font l’objet de critiques constantes, y compris de la part du vérificateur général en 2014, qui signalait des lacunes dans la divulgation liée au Compte du Canada. Pourquoi le gouvernement a-t-il décidé d’exclure ces opérations du Budget des dépenses?

M. Duclos [ + ]

Merci beaucoup, sénatrice Galvez. Je vais répondre brièvement à votre question, puis j’inviterai le ministre Morneau ou M. Purves, qui est spécialiste de la responsabilité financière, à fournir de plus amples détails.

Pour ce qui est de la vérificatrice générale, comme je l’ai dit plus tôt, nous sommes résolus à faire en sorte que, à mesure que la crise évolue, tous les organismes et ministères sachent qu’il leur incombe de conserver tous les renseignements concernant les processus, les mesures et les décisions, de telle sorte que la vérificatrice générale puisse obtenir l’information dont elle a besoin quand viendra le temps de tirer des leçons de la crise.

Pour ce qui est de la transparence et de la communication de l’information, comme je l’ai mentionné tout à l’heure, il existe deux portails importants et entièrement accessibles. Le premier est le Portail du gouvernement ouvert, qui, au cours des dernières semaines, a publié de manière proactive près de 150 dossiers complets et importants sur la COVID-19. Il y a aussi l’InfoBase du gouvernement du Canada, qui fournit les renseignements que vous méritez d’avoir sur les diverses mesures prises, y compris celles dont il est question dans les budgets des dépenses.

Les budgets des dépenses ne comprennent pas tous les détails. Par exemple, certains aspects des dépenses fiscales ne figurent habituellement pas dans ces budgets. En fait, le Budget supplémentaire des dépenses comprend également ce qu’on appelle le « financement prévu par la loi », qui provient des autorisations accordées par le Parlement, y compris le Sénat, avant l’élaboration et la présentation de ce budget.

Je vais m’arrêter ici pour donner la possibilité au ministre Morneau et à M. Purves de vous communiquer d’autres renseignements.

M. Morneau [ + ]

Je suis très satisfait de votre réponse.

La sénatrice Galvez [ + ]

Monsieur le ministre Morneau, le mois dernier, le Comité des finances nationales a entendu le témoignage de représentants de l’Agence du revenu du Canada, qui ont confirmé que plus de 3 000 cas se sont retrouvés devant la Cour canadienne de l’impôt et la Cour d’appel fédérale pour évasion fiscale par des entreprises. Par ailleurs, ils nous ont appris que l’Agence du revenu avait traité pour plus de 14 milliards de dollars en réévaluations de l’impôt sur le revenu.

Le Plan d’action national du Canada pour un gouvernement ouvert de 2018-2020, que j’ai déjà mentionné, comprend une série de jalons qui visent à améliorer la transparence des entreprises. Étant donné que l’un des problèmes à traiter, tel qu’indiqué dans le plan, est l’évasion fiscale, les mesures prises dans le cadre de ce plan ont-elles réussi à réduire les cas d’évasion fiscale des entreprises? Comment cet indicateur est-il mesuré, et de quelle façon le suivi est-il assuré?

M. Morneau [ + ]

Depuis que nous formons le gouvernement, cette question est très importante pour nous. L’approche que nous avons adoptée pour lutter contre l’évitement fiscal et l’évasion fiscale comporte de multiples volets. Tout d’abord, bien sûr, en ce qui concerne les questions internationales, nous avons dû travailler avec des collègues de plusieurs pays. Nous avons effectué la plupart du travail par l’intermédiaire de l’OCDE, en examinant comment établir des normes communes de déclaration à l’échelle mondiale afin de permettre l’échange de renseignements relatifs aux comptes partout dans le monde et assurer la transparence de l’information. Nous travaillons également à établir des normes relatives à ce qu’on appelle « l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices », c’est-à-dire les organismes qui déplacent leurs revenus et leurs profits pour améliorer leur situation. Nous n’avons ménagé aucun effort pour élaborer des normes internationales communes et celles-ci ont connu beaucoup de succès.

Dans chacun de nos budgets, nous avons également augmenté considérablement le financement de l’Agence du revenu du Canada. Cette mesure visait à donner à l’agence les ressources dont elle a besoin pour mener des vérifications et veiller à ce que les particuliers et les sociétés déclarent correctement leurs revenus et rendent des comptes sur les impôts qu’ils paient.

Enfin, cette question m’amène bien sûr à parler de la nécessité de disposer de ressources judiciaires adéquates pour que le système judiciaire puisse surmonter les difficultés entourant ces efforts et l’application de ces règles. Il s’agit aussi d’un enjeu constant, et je sais que nous allions en tenir compte dans le budget de 2020, qui a été retardé, malheureusement, pour les raisons que nous connaissons tous. Toutefois, nous avons l’intention de continuer à examiner tous ces éléments et à travailler à l’échelle internationale pour nous assurer d’avoir des règles qui fonctionnent. Il s’agit d’un travail continu et difficile : accorder les ressources adéquates à l’Agence du revenu du Canada et veiller à ce que nous disposions aussi des ressources judiciaires nécessaires pour assurer un suivi lorsqu’on trouve des gens qui agissent de façon inappropriée.

La sénatrice Galvez [ + ]

Merci.

La sénatrice Miville-Dechêne [ + ]

Tout d’abord, merci d’être ici, messieurs. Je vais d’abord poser la question de ma collègue la sénatrice Pate pour que vous puissiez y répondre, monsieur le ministre.

Comment l’incidence budgétaire des « fraudes » liées à la Prestation canadienne d’urgence se compare-t-elle à la prévalence des fraudes liées à d’autres formes de mesures d’aide économique relatives à la COVID-19, ainsi qu’aux sommes qui s’y rattachent, y compris les mesures destinées aux entreprises pour lesquelles ce type de sanctions n’a pas été envisagé?

La présidente [ + ]

Monsieur le ministre, nous comprenons que vous devez nous quitter. Nous vous remercions de votre présence.

M. Duclos [ + ]

Je tiens à dire, avant toute chose, que la grande majorité des Canadiens sont des gens honnêtes.

Deuxièmement, la grande majorité des erreurs commises étaient vraiment des erreurs, surtout celles qui ont été faites ces dernières semaines à propos de la Prestation canadienne d’urgence. Elles se sont notamment produites parce que des Canadiens ne comprenaient pas exactement, à juste titre, comment la nouvelle prestation serait versée. Certains ont donc fait deux demandes en passant par Service Canada et par l’Agence du revenu du Canada. Dans beaucoup de cas, il s’agit d’erreurs sincères qui ont été corrigées. En fait, un grand nombre de Canadiens, environ 200 000 selon nos estimations, ont déjà remboursé les sommes versées en trop.

Troisièmement, il y aura des fraudes comme il y en a dans tous les programmes, y compris les programmes destinés aux entreprises. Nous sommes convaincus que les fonctionnaires de Service Canada et de l’Agence du revenu du Canada feront tout leur possible et tout le nécessaire pour repérer les cas de fraude, les régler et imposer, au besoin, des sanctions appropriées. Il faudra tenir compte des circonstances particulières de chaque cas et de chaque entreprise, et agir d’une manière qui puisse à la fois amener les gens à prendre leurs responsabilités et maintenir la confiance de la population envers le système.

La sénatrice Seidman [ + ]

Merci d’être parmi nous cet après-midi, monsieur le ministre Duclos et monsieur le ministre Morneau, qui, je présume, a malheureusement dû partir. Merci également à votre personnel.

J’avais quelques questions pour le ministre Morneau, donc je vais vous adresser toutes mes questions. J’espère que vous pourrez y répondre.

Le budget des dépenses contient environ 40 millions de dollars de crédits votés pour les Instituts de recherche en santé du Canada, ce qui inclut le financement des mesures d’urgence en matière de recherche et d’innovation liées à la COVID-19. En ce qui concerne l’annonce de financement des Instituts de recherche en santé du Canada du 23 avril dernier, la mise à jour quinzomadaire du gouvernement à l’autre endroit indique que les détails des programmes sont presque réglés.

Quand le gouvernement compte-t-il confirmer les détails des programmes?

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie. Bien que le ministre Morneau soit parti, M. Purves est avec nous. Je ne le vois pas, mais je sens sa présence rassurante en arrière. Il sera en mesure de nous fournir les détails importants.

Aux échelons supérieurs, nous comprenons évidemment tous l’importance de financer les chercheurs dans le contexte d’une pandémie, notamment par l’intermédiaire des Instituts de recherche en santé du Canada, ce qui a une incidence énorme sur la santé de milliers de Canadiens et aussi une incidence considérable sur l’économie. M. Purves, êtes-vous toujours là?

La sénatrice Seidman [ + ]

Merci beaucoup, mais j’aimerais vous dire, avant que M. Purves ne commence, que je tiens vraiment à savoir quand le gouvernement pense pouvoir confirmer les détails du programme. C’est peut-être M. Purves qui est le mieux placé pour répondre. Quel est l’échéancier? L’annonce a été faite le 23 avril.

M. Duclos [ + ]

C’est une excellente question. Je pourrais vous donner une réponse, mais je préfère que ce soit la bonne, alors je demanderai à ma collègue la ministre de la Santé de vous fournir les renseignements précis dont vous avez besoin et que vous avez demandés.

La sénatrice Seidman [ + ]

C’est bien.

Dans ce cas, parlons de la somme de plus de 400 millions de dollars en crédits votés que le budget des dépenses accorde à des organismes et des ministères dans le cadre de la Stratégie nationale de recherche médicale pour lutter contre la COVID-19. Puisque des entités gouvernementales concluent des ententes avec des entreprises pour développer des vaccins — par exemple, le Conseil national de recherches Canada collabore avec une entreprise chinoise —, comment la question des droits de propriété sera-t-elle réglée? Qu’est-ce qui appartiendrait au gouvernement, dans les différents cas?

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie de soulever la question des droits de propriété, car elle est extrêmement importante non seulement dans nos relations avec des entreprises étrangères, mais aussi avec des entreprises canadiennes.

En deux mots, je peux vous assurer que ce sujet arrive tout en haut de la liste des priorités de la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement, du ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique et du Conseil du Trésor. Les réunions du Conseil du Trésor ont donné lieu à de sérieuses discussions, car nous tenons à ce que nos investissements soient prudents, à ce qu’ils soient avantageux pour les Canadiens et à ce qu’ils rapportent le plus possible.

La sénatrice Seidman [ + ]

Ma prochaine question porte sur le financement actuellement consacré aux recherches scientifiques et médicales qui ne concernent pas la pandémie de COVID-19. Depuis le début de la pandémie, de nombreux projets de recherche ont été suspendus, et d’autres risquent d’être abandonnés d’un moment à l’autre. Les autres sources de financement, comme l’industrie et la philanthropie, se sont considérablement taries. Il s’agit pourtant de projets essentiels.

Pour remédier à la situation, le gouvernement a annoncé 450 millions de dollars pour venir en aide au milieu de la recherche universitaire du pays. De leur côté, les Instituts de recherche en santé du Canada ont annoncé le retour du concours de subventions du printemps de 2020, qui en est à l’étape de l’étude par les pairs.

Même si je suis prête à admettre que des mesures importantes ont été prises pour aider les chercheurs, les sommes annoncées suffiront-elles à atténuer les énormes répercussions que la COVID aura sur leurs travaux? Le gouvernement fédéral entend-il prendre d’autres mesures pour atténuer les perturbations subies par le milieu de la recherche?

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie de faire un lien entre le milieu de la recherche et la situation d’urgence que nous connaissons.

Initialement, nous savions qu’il serait nécessaire d’investir dans la conception, l’élaboration, la mise à l’essai et la production de tests, de vaccins et de traitements. Nous avons instauré simultanément diverses mesures relatives à la subvention salariale d’urgence, que le ministre Morneau a résumées tout à l’heure. Malheureusement, bon nombre des établissements de recherche que vous mentionnez ne sont pas admissibles à cette subvention parce qu’ils font partie du secteur public.

Toutefois, nous avons accordé, comme vous le soulignez, des investissements de presque 500 millions de dollars qui imitent, dans une certaine mesure, l’action de la subvention salariale d’urgence offerte aux entreprises en général pour les milieux de la recherche en santé et de la recherche universitaire.

Cela dit, nous savons qu’il est important de maintenir cet appui, car il est fragile. Nous pourrions facilement perdre des chercheurs qui ont le goût d’aller travailler à l’étranger. Dans le contexte actuel, où il faut se préparer à de futures pandémies, nous ne pouvons nous permettre de laisser une telle chose se produire.

La sénatrice Seidman [ + ]

Merci.

J’aimerais aborder un sujet légèrement différent, si vous le voulez bien. À l’échelle du Canada, un certain nombre d’établissements de soins de longue durée sont désuets et ont désespérément besoin de travaux de rénovation. Dans ces établissements, plusieurs personnes occupent la même chambre, les salles de bain et les toilettes sont communes et les salles à manger sont bondées. Ils ont grandement contribué à la propagation de la COVID-19.

Dans un mémoire prébudgétaire pour cette année, l’Association canadienne des soins de longue durée a demandé des fonds pour la « construction, la rénovation et l’amélioration de 400 foyers de soins de longue durée d’ici 2023 afin de satisfaire aux normes de conception actuelles et aux besoins des aînés d’aujourd’hui, en particulier ceux qui sont atteints de démence ».

Monsieur le ministre, le gouvernement fédéral prévoit-il utiliser les fonds destinés aux infrastructures pour rénover les établissements de soins de longue durée partout au Canada? Si oui, quand pouvons-nous nous attendre au lancement de ces projets?

M. Duclos [ + ]

Merci.

Il y a deux aspects à l’importante question que vous soulevez. Premièrement, comme nous l’avons appris ces dernières semaines — et c’est une leçon que j’ai tirée personnellement de mon expérience à titre de député du Québec —, le traitement que nous réservons à nos aînés est bien inférieur à ce dont ils ont besoin pour vivre dans la dignité. Il y va de la dignité, de la sécurité et de la santé des aînés. Malgré les différents pouvoirs exercés par les provinces et par les territoires, il s’agit là d’une leçon dont nous devons parler ouvertement.

Deuxièmement, comme vous l’avez souligné, à juste titre, à mesure qu’il continuera d’investir dans les infrastructures, le gouvernement fédéral aura des occasions d’être à la fois un partenaire et un chef de file, tout en respectant les champs de compétence, lorsqu’il s’agit de bâtir des foyers pour personnes âgées plus sûrs et plus sains. Nous pensons notamment à une mesure à laquelle travaille actuellement le ministre Hussen, soit la Stratégie nationale sur le logement, une stratégie sur le logement dotée de 55 milliards de dollars que nous avons commencé à mettre en œuvre. Il y a évidemment d’importantes occasions à saisir pour jumeler ce genre de financement à l’aide que les gouvernements provinciaux et territoriaux voudront aussi fournir afin que les aînés puissent vivre dans la dignité.

La sénatrice Seidman [ + ]

Je vais continuer de parler des aînés, qui ont été durement touchés par la pandémie de COVID-19, ainsi que par la hausse du coût de la vie. Bon nombre d’entre eux ont dû engager des dépenses supplémentaires, y compris des frais de livraison d’épicerie, et composer avec des augmentations des frais de délivrance des médicaments sur ordonnance et des coûts de transport.

Le 12 mai, le gouvernement fédéral a annoncé un paiement complémentaire unique non imposable pour aider les aînés à assumer ces frais de subsistance supplémentaires. Ceux qui touchent des prestations de la Sécurité de la vieillesse recevront 300 $ de plus, tandis que ceux qui touchent le Supplément de revenu garanti recevront 200 $. Bien que de nombreuses personnes se réjouissent de la bonification de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti, elles soutiennent que ces paiements devraient être récurrents et versés aux gens qui en ont le plus besoin.

Monsieur le ministre, est-ce que le gouvernement fédéral prévoit offrir une plus grande aide financière aux aînés canadiens, plus particulièrement sous la forme d’un financement ciblé aux aînés qui en ont réellement besoin?

M. Duclos [ + ]

Vous me regardez d’un air sévère.

La présidente [ + ]

C’est parce que la présente période de 10 minutes est écoulée. Nous devons maintenant passer à la période suivante de 10 minutes.

La sénatrice McPhedran [ + ]

Je tiens à remercier le ministre Duclos et le ministre Morneau, ainsi que les fonctionnaires qui les accompagnent, de s’être joints à nous aujourd’hui. Je vous poserai d’abord des questions au nom de la sénatrice Mobina Jaffer concernant les mesures que vos ministères respectifs ont prises ou qu’ils prendront pour s’attaquer au problème du racisme systémique et, si j’ai le temps, j’aurai aussi mes propres questions pour vous.

Permettez-moi de prendre un instant pour vous demander de ne pas considérer les interruptions d’une des personnes qui vous ont posé des questions comme étant le reflet de l’attitude de l’ensemble des sénateurs présents et pour vous dire que je regrette que certains se soient abaissés à agir de la sorte.

Le préambule de la sénatrice Jaffer est le suivant :

Je comprends que, dans « analyse comparative entre les sexes plus », le « plus » signifie la race, l’origine ethnique, la religion, l’âge et les handicaps mentaux ou physiques. Si la reconnaissance de ces enjeux est louable, je crois qu’une surveillance des politiques fondée explicitement sur la race est requise pour s’assurer que la réponse aux injustices raciales dans le processus législatif ne soit pas reléguée au second rang.

Conséquemment, à la lumière des déclarations du premier ministre Trudeau, nous devons nous attaquer aux problèmes de racisme systémique au Canada au moyen d’actions concrètes à l’échelle des institutions.

Voici la question de la sénatrice Jaffer :

Vos ministères respectifs entendent-ils mettre en place une analyse fondée sur la race et, si des mesures pour contrer le racisme systémique sont déjà en place, en quoi consistent-elles?

M. Duclos [ + ]

Merci, sénatrice. Je vais d’abord répondre à votre observation concernant l’analyse comparative entre les sexes plus, ou ACS+. Le but est toujours de procurer à tous des chances égales dans la vie. Je donne un exemple d’inégalité des chances au Canada. Deux filles naissent le même jour; l’une est Autochtone et l’autre non. Il est 10 fois plus probable que la fille autochtone se fasse emprisonner dans sa vie que l’autre fille.

Cela prouve indéniablement que l’inégalité des chances existe au Canada. D’où la nécessité de prendre des mesures comme l’ACS+, même si elles peuvent sembler techniques. Il faut parler de ces enjeux. La première étape pour remédier au problème est de reconnaître qu’il existe. Ensuite, nous pouvons discuter ouvertement des raisons de son existence et des moyens de l’éliminer.

Admettre l’existence du racisme systémique au Canada est la première étape en vue d’y remédier. Voilà pourquoi ce dialogue est si important pour appuyer la prise de mesures subséquente. Le racisme systémique est l’une des raisons pour lesquelles il existe une inégalité des chances au Canada. C’est la raison pour laquelle, dès la naissance, une fille autochtone n’a pas les mêmes chances qu’une fille non autochtone.

La sénatrice McPhedran [ + ]

Monsieur le ministre Duclos, je vous prie de relayer ces questions au ministre Morneau.

Les Canadiens doivent dépenser leurs économies ou emprunter de l’argent pour joindre les deux bouts, et le Canada est l’un des pays où la dette à la consommation est la plus élevée au monde. Statistique Canada vient d’annoncer que l’endettement du Canadien moyen était de 1,77 $ pour chaque dollar de revenu disponible. Cela comprend les dettes hypothécaires, les cartes de crédit et les marges de crédit.

À l’heure actuelle, les PDG des grandes banques gagnent environ 10,5 millions de dollars par année. Cela représente plus de 200 fois le revenu par habitant au Canada.

Monsieur le ministre Duclos, en avril, le premier ministre et le ministre des Finances ont tous les deux dit aux Canadiens que les banques devaient en faire davantage. Monsieur le ministre Duclos, quelles mesures concrètes le gouvernement a-t-il prises pour inciter les grandes banques à accorder un soulagement économique légitime et durable aux Canadiens, et aussi, bien sûr, pour empêcher les grandes banques de tirer des gains de la pandémie? Je suis vraiment triste de devoir le dire, mais je pose cette question parce que tout comme les plus de 90 000 autres signataires de la pétition de Démocratie en surveillance, qui a été portée à l’attention de votre gouvernement, je n’ai rien trouvé de substantiel qui indique que les six grandes banques ont pris des mesures durables pour améliorer le sort des Canadiens pendant la COVID-19.

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie. Cela souligne la responsabilité qui est la nôtre dans le contexte de la COVID-19. Je conviens que nous — c’est-à-dire nous tous — avons quelque chose à voir pour préserver le tissu économique et social de la société.

L’une des premières choses que nous avons faites au début de la crise a été de demander aux banques, y compris aux coopératives de crédit, de prévoir un moratoire de six mois, donc jusqu’en septembre 2020, sur le paiement du capital et des intérêts. Nous avons ensuite travaillé avec le secteur bancaire pour nous assurer que ce moratoire soit appliqué de manière plus conséquente pour les étudiants.

Nous — c’est-à-dire le ministre des Finances et moi-même — avons joué un rôle décisif dans la réduction de certains frais d’intérêt sur les cartes de crédit. Cela dit, il s’agit là, comme vous l’avez dit, de mesures relativement modestes de la part du secteur bancaire dans le contexte d’une crise redoutable. Je transmettrai votre message au ministre des Finances. Je sais qu’il continue à travailler énergiquement et efficacement avec le secteur bancaire, car, comme vous l’avez dit, si nous voulons sortir plus forts et plus unis de cette crise, nous devons tous apporter notre contribution.

La sénatrice Miville-Dechêne [ + ]

J’aimerais poser une question au nom du sénateur Deacon. Je vous la lis :

Le gouvernement a presque doublé le coût prévu de la Prestation canadienne d’urgence, tout en réduisant les estimations relatives aux subventions salariales. Nombreux sont ceux qui, au Québec et ailleurs, ont fait valoir que la Prestation canadienne d’urgence n’encourage pas les gens à travailler. La subvention salariale devait permettre aux employeurs de garder leurs employés et de leur verser leur salaire.

A-t-on fait des recherches pour savoir pourquoi la participation à ce programme a été si faible? A-t-on l’intention de le remanier et de le relancer?

M. Duclos [ + ]

Merci. En premier lieu, en ce qui concerne la Prestation canadienne d’urgence, 8 millions de Canadiens ont touché au moins un paiement. Pour ce qui est de la Subvention salariale d’urgence, approximativement 2,7 millions de travailleurs en ont bénéficié.

Il est vrai que le démarrage de ce programme a été relativement lent. Deux raisons expliquent cette lenteur. Premièrement, comme il s’agit d’un nouveau programme, il a fallu aux entreprises un certain temps pour en connaître les tenants et les aboutissants et pour s’assurer de leur admissibilité.

Le deuxième enjeu tenait à l’incertitude de la part des entreprises elles-mêmes. Avant de décider de réembaucher leurs employés, de nombreuses sociétés ont de toute évidence dû se demander si l’avenir à court et à long termes leur permettrait de participer à ce programme de subvention salariale.

Le démarrage a pris un peu de temps. Cela étant dit, nous avons ensuite constaté une accélération de la participation à la subvention salariale. C’est ce à quoi nous nous attendions dès le départ. Nous nous réjouissons de pouvoir maintenant observer cette tendance d’un point de vue plus factuel. Comme l’a dit le ministre Morneau il y a un moment, il annoncera bientôt des modifications, notamment pour offrir davantage de souplesse, car le gouvernement estime que le programme de subvention salariale constitue une initiative importante et efficace pour stimuler la reprise économique.

La sénatrice Miville-Dechêne [ + ]

J’ai parlé à des manufacturiers canadiens de chaussures qui craignent que leurs clients, les détaillants, soient confrontés à une crise de liquidités à l’automne, ce qui signifie qu’ils ne pourront ni acheter ni payer leur marchandise. Pour les manufacturiers, le risque est énorme s’ils font crédit aux détaillants. Avez-vous réfléchi à une forme d’aide gouvernementale ciblée pour que la chaîne d’approvisionnement ne s’effondre pas?

M. Duclos [ + ]

J’aime bien entendre parler de l’importance de maintenir la chaîne d’approvisionnement. Je sais que je passe beaucoup de temps — et je vois la présidente qui me regarde très sérieusement —, mais je vais tout de même vous raconter une petite histoire.

Au début de la crise, j’étais dans un avion qui était pris dans une tempête énorme. Il fallait atterrir en gardant les passagers et les travailleurs intacts et en s’assurant que l’appareil resterait intact. L’appareil représente les petites entreprises, qui sont aussi le moteur de l’avion, alors que ce sont les grandes entreprises, qui sont souvent dans le cockpit à l’avant, qui mènent l’avion. Quant aux ailes, elles sont les chaînes d’approvisionnement. Quand il n’y a pas de chaînes d’approvisionnement, il n’y a pas d’ailes pour relancer l’économie. Il fallait absolument mettre en place des programmes universels, facilement accessibles, comme le ministre Morneau l’a décrit un peu plus tôt, pour préserver l’intégrité de cette chaîne d’approvisionnement; je pense que nous avons assez bien réussi jusqu’à maintenant — pour être plutôt modeste —, mais vous avez raison de dire qu’il y aura des défis futurs auxquels nous devrons à nouveau faire face.

Le sénateur Patterson [ + ]

Avec tout le respect que je vous dois, M. Duclos, j’ai fait un très long voyage depuis le Nunavut pour poser au ministre Morneau des questions qui portent sur ses pouvoirs. Au cours des quelques minutes qui me sont attribuées, je vais lire mes questions pour qu’elles figurent au compte rendu. J’ai parlé à un fonctionnaire de son ministère en vue d’obtenir des réponses écrites. C’est ainsi que je souhaite procéder.

Ma première question se rapporte à une question que le sénateur Plett a gracieusement posée à M. Morneau le 11 avril dernier, lorsque le ministre est venu au Sénat. Cette question portait sur la décision de soustraire les industries non génératrices de revenus de la Subvention salariale d’urgence du Canada. Le ministre Morneau a déclaré ce qui suit : « Si nous devons examiner certains enjeux propres à un secteur donné, nous le ferons [...] » Or, plusieurs mois plus tard, pour autant que je sache, on n’a pas encore examiné ces enjeux.

Par exemple, les sociétés minières et les sociétés d’exploration de petite taille ne sont pas admissibles aux mesures de soutien destinées aux petites et moyennes entreprises. Elles ne sont pas admissibles au programme de subvention salariale parce qu’elles ne génèrent pas de revenus — leurs revenus proviennent d’actions accréditives et d’investisseurs. Elles ne sont pas admissibles non plus au financement consenti par l’Agence canadienne de développement économique du Nord.

Des organismes comme l’Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs font pression sur votre gouvernement pour obtenir du soutien. Je sais pertinemment que cette préoccupation a été réitérée dans un mémoire sur la subvention salariale qui a été signé par les sénatrices Duncan, Anderson et Bovey, qui représentent les trois territoires et la région de Churchill, ainsi que par moi-même.

Est-ce que votre gouvernement va permettre aux entreprises qui ne génèrent pas de revenus, y compris les petites sociétés minières et d’exploration, d’être admissibles à la subvention salariale?

Ma deuxième question porte sur l’industrie touristique du Nord. Elle est grandement menacée car, comme vous le savez, la COVID-19 a entraîné l’imposition de restrictions strictes en matière de déplacements, particulièrement dans le Nord, afin de protéger et d’isoler les populations vulnérables. Même si nous applaudissons évidemment à de telles mesures grâce auxquelles, je suis heureux de le dire, le Nunavut n’a pas été touché par la pandémie, elles ont malheureusement nui à de nombreuses industries, notamment celles du tourisme et de l’hôtellerie du Nord. Il demeure impossible de savoir quand les activités normales pourront reprendre dans le Nord, et ce même avec des mesures de sécurité accrues.

Dans un mémoire adressé à la ministre Joly, les représentants de l’ensemble des hôteliers du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut ont clairement indiqué que cette incertitude fera en sorte que les industries du voyage auront encore plus de difficultés à financer un flux de trésorerie négatif en 2020.

Est-ce que votre gouvernement va offrir un financement provisoire afin d’aider les hôtels situés au nord du 60e parallèle? Ils ont demandé une subvention pour les chambres inoccupées jusqu’à la levée des restrictions liées à la pandémie. Jusqu’à présent, ils ont été incapables d’obtenir de l’aide auprès de l’Agence canadienne de développement économique du Nord.

Ma troisième question porte sur les compagnies aériennes qui, vous le comprenez, bien sûr, jouent un rôle vital dans le Nord. Je tiens à remercier le gouvernement pour l’aide qu’il a accordée aux compagnies aériennes du Nord, mais cette aide doit se terminer à la fin du mois de juin. Tant qu’on ne sera pas revenu aux niveaux de service qui existaient avant la pandémie, il faudra encore de l’aide.

Le gouvernement va-t-il prolonger le programme d’aide pour les services aériens essentiels dans le Nord après le mois de juin et pendant toute la durée de la pandémie?

La Northern Air Transportation Association a aussi demandé que soient suspendues les fusions d’entreprises imposées au Nord canadien l’année dernière — et qui ne sont plus pertinentes pendant la présente pandémie — jusqu’à ce que les niveaux de service soient revenus à la normale.

Enfin, M. Joseph Sparling de la Northern Air Transportation Association a demandé au Comité permanent des finances nationales que le ministre utilise ses bons offices pour étudier l’augmentation de la circulation sur les routes d’accès comme autre moyen efficace de soutenir financièrement les compagnies aériennes en difficulté dans le Nord.

Ce sont là mes trois questions que j’aimerais voir inscrites au compte rendu. Je remercie le ministre Duclos de m’avoir écouté, et je vous remercie d’y répondre.

Le sénateur Wells [ + ]

J’ai une question pour le ministre Duclos. Je vous remercie encore une fois d’être venu ici et du travail que vous faites.

Monsieur le ministre, le Budget supplémentaire des dépenses comprend une affectation de crédits de 203,5 millions de dollars destinés au financement du système de paie du gouvernement. La ministre Anand a confirmé que ces fonds vont servir à stabiliser le système de paie Phénix. Cela doit sûrement vous dire quelque chose.

Monsieur le ministre, pourquoi ce crédit ne figure-t-il pas dans le Budget principal des dépenses? Je ne peux pas croire que le gouvernement n’était pas au fait des problèmes liés à ce système de paie. Je crois que le Canada au complet est au courant. Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas inclus ces 200 millions de dollars et quelques dans le Budget supplémentaire des dépenses plutôt que dans le Budget principal des dépenses?

M. Duclos [ + ]

Je vous remercie pour cette question. J’aimerais commencer par préciser dans quel contexte général s’effectue ce genre d’investissements.

Nous sommes tous conscients qu’il est totalement inacceptable que des fonctionnaires ou n’importe quels travailleurs canadiens ne soient pas payés pour les services qu’ils fournissent à leur employeur. Il est certainement inacceptable que le gouvernement du Canada ne paie pas correctement ses travailleurs.

Nous réalisons des progrès importants en ce qui concerne le règlement du problème, c’est-à-dire le nombre encore trop élevé de travailleurs qui ne reçoivent toujours pas le paiement exact et à temps. C’est pourquoi ces investissements sont si importants.

Ce poste ne figurait sans doute pas dans le Budget principal des dépenses parce qu’il n’y avait probablement pas assez d’information à l’époque, essentiellement avant février ou plus probablement janvier, pour qu’il y apparaisse. Si vous voulez des assurances, je peux demander à M. Purves de confirmer que c’est bien le cas.

Le sénateur Wells [ + ]

J’aimerais recevoir des assurances. Je pense que tous les Canadiens aimeraient en recevoir. Je vais donc écouter la réponse de M. Purves.

Est-il prévu que d’autres demandes soient formulées dans les futurs budgets supplémentaires des dépenses?

M. Duclos [ + ]

Vous me demandez s’il y aura d’autres demandes relatives à Phénix? Il est fort probable que d’autres travaux soient nécessaires en lien avec Phénix parce que, comme je l’ai expliqué brièvement, il reste du travail à faire. Même si, au cours des derniers mois, le nombre de dossiers non résolus a considérablement diminué, il y a encore trop de dossiers en suspens. C’est pourquoi nous devons absolument offrir à tous les fonctionnaires le niveau de service non seulement dont ils ont besoin, mais aussi qu’ils méritent. Donc, il est fort probable que de nouveaux investissements soient requis. Toutefois, comme je l’ai dit, nous sommes rendus à une étape où nous pouvons être optimistes quant à notre capacité de finalement venir à bout de ce problème et d’ouvrir tout un monde de possibilités.

M. Purves [ + ]

Le ministre Duclos a tout à fait raison de dire que parfois nous n’avons pas assez d’information pour que les coûts apparaissent dans le Budget principal des dépenses. Voilà pourquoi il y a le Budget supplémentaire des dépenses. D’autres postes comme celui-là se trouvent dans le Budget supplémentaire des dépenses.

Le financement, les 203 millions de dollars, vise à éliminer l’arriéré et à stabiliser le système de paie en maintenant la capacité des employés pour y arriver, en améliorant les taux de traitement et en augmentant l’automatisation du plus grand nombre possible d’opérations grâce à des améliorations du système.

Voici rapidement quelques chiffres pour vous donner une meilleure idée. En date du 27 mai, le nombre d’opérations en attente de traitement au centre de paie avait diminué de 49 % depuis la pire période en janvier 2018, ce qui représente une diminution de 310 000 opérations; nous sommes passés de 633 000 à 323 000 opérations.

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre présence parmi nous et de votre travail.

Je pose la question que voici au nom de la sénatrice Wanda Thomas Bernard, qui vient comme moi de la Nouvelle-Écosse :

En Nouvelle-Écosse, les organismes à but non lucratif emploient 20 000 travailleurs, dont 68 % sont des femmes. En avril 2020, le conseil du secteur communautaire de la Nouvelle-Écosse a fait un sondage auprès de ces organismes. Le sondage a mis en lumière que les organismes à but non lucratif sont dans une situation précaire, qu’ils font face à une demande accrue de services destinés à des personnes à risque, et qu’ils ont beaucoup de mal à poursuivre leurs activités parce qu’ils sont sous-financés. Si certains doivent fermer en raison de pertes irrémédiables causées par la COVID-19, ces fermetures toucheront particulièrement les emplois et les revenus des femmes, et elles auront des conséquences négatives sur les populations vulnérables qu’aident ces organismes [...]

Nous savons que certains organismes à but non lucratif reçoivent des sommes du programme de subvention salariale, qu’ils y participent. Nous aimerions toutefois savoir quelles autres formes de soutien le gouvernement offrira aux organismes à but non lucratif après la pandémie pour les aider à surmonter les difficultés financières causées par cette crise sanitaire.

M. Duclos [ + ]

Merci beaucoup. Vous avez raison de faire allusion à la vulnérabilité qui peut être exacerbée par une crise. Les gens et les organismes qui étaient déjà vulnérables au départ peuvent avoir beaucoup de difficulté à se sortir d’une crise qui les affaiblit encore plus.

Nous avons très bien pris soin de protéger et d’aider les gens, surtout les Canadiens particulièrement vulnérables. Nous avons besoin du secteur communautaire et des organismes à but non lucratif. Voilà pourquoi ces organismes ont tout de suite été admissibles à la Subvention salariale d’urgence du Canada. Nous avons aussi créé un fonds d’urgence de 350 millions de dollars pour aider les organismes communautaires, en plus d’accorder 150 millions de dollars aux organisations de femmes au tout début de la crise. Il est malheureusement vrai que les crises de ce type ont des répercussions disproportionnées sur les femmes, qui en souffrent beaucoup. Enfin, une enveloppe de 110 millions de dollars a rapidement été annoncée pour financer la lutte contre l’itinérance.

De plus, comme vous le savez, la ministre des Femmes et de l’Égalité des genres et la ministre de la Diversité et de l’Inclusion n’ont ménagé aucun effort et ont collaboré pour que nous puissions aider les femmes non seulement pendant la crise, mais aussi après.

Je transmettrai certainement vos importantes réflexions aux deux ministres et je leur suggèrerai de communiquer avec vous.

Le sénateur Massicotte [ + ]

Merci d’être parmi nous aujourd’hui. Je tiens à féliciter votre gouvernement, qui a agi rapidement et avec beaucoup de doigté. C’était crucial pour notre économie et nos communautés. On s’est assuré de répondre en temps opportun et toutes les mesures ont obtenu un succès retentissant et bien mérité.

Je voulais que vous me traciez un grand portrait budgétaire. Inutile d’entrer dans les détails. Je sais que ceux-ci seront rendus publics au cours des deux prochaines semaines. Selon un rapport rédigé principalement par David Dodge, qui travaille chez Bennett Jones, le plan A est que, si les choses vont bien et que la reprise permet de préserver un bon nombre d’emplois, la dette augmentera, mais elle sera gérable.

M. Dodge nous avertit aussi que, s’il y a une deuxième vague du coronavirus, le Canada aura du mal à obtenir des fonds. Il lui sera difficile de s’assurer que la situation est équitable pour tous les Canadiens. Ce sera le test ultime.

Qu’en pensez-vous? Je sais que nous parlons tous de l’avenir, mais je crois que les Canadiens devraient connaître les conséquences d’une autre vague du coronavirus et savoir ce qu’elles peuvent signifier pour nous tous.

La présidente [ + ]

Vous avez 30 secondes pour répondre à la question.

M. Duclos [ + ]

Trente secondes. Ma réponse laissera probablement à désirer, mais je vous remercie de votre question. Le mot-clé ici est « prudence ». Nous avons tous la responsabilité d’être très prudents pour éviter une deuxième vague. Il faut absolument suivre les directives de santé si nous voulons, comme je l’ai dit, protéger notre économie, notre société et les Canadiens vulnérables, et si nous voulons éviter d’être frappés par une deuxième vague de la pandémie.

La présidente [ + ]

Honorables sénateurs, le comité siège depuis maintenant 155 minutes. Conformément à l’ordre adopté par le Sénat plus tôt aujourd’hui, je suis obligée d’interrompre les délibérations afin que le comité puisse faire rapport au Sénat.

Messieurs les ministres, au nom de tous les sénateurs, je vous remercie de vous être joints à nous aujourd’hui et de nous avoir aidés dans nos travaux. Je tiens également à remercier les fonctionnaires qui vous ont accompagnés.

Des voix : Bravo!

La présidente : Honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que la séance du comité soit levée et que je déclare au Sénat que les témoins ont été entendus?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président [ + ]

Honorables sénateurs, le Sénat reprend sa séance.

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