La Loi sur la citoyenneté
Projet de loi modificatif--Troisième lecture--Débat
19 novembre 2025
Propose, au nom de la sénatrice Coyle, que le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (2025), soit lu pour la troisième fois.
— Honorables sénateurs, soyez indulgents, car je m’exprime dans ma troisième langue.
J’ai l’honneur de prendre la parole au nom de la sénatrice Coyle, la marraine du projet de loi C-3, qui s’excuse de ne pas pouvoir être présente aujourd’hui en raison de circonstances imprévues.
Nous travaillons ensemble sur ce projet de loi important, car je suis la responsable législative du projet de loi C-3 au sein du Groupe des sénateurs indépendants. La sénatrice Coyle m’a demandé de lire ses observations aujourd’hui. Les voici :
Chers collègues, à l’étape de la deuxième lecture, je vous ai brièvement présenté l’évolution du statut juridique de la citoyenneté canadienne ainsi que de la Loi sur la citoyenneté, que modifie le projet de loi qui nous occupe.
J’ai parlé de quelques-unes des modifications apportées à cette loi au fil des ans et de certaines répercussions de ces modifications, dont les problèmes que le projet de loi C-3 vise à corriger. J’ai aussi donné quelques exemples.
J’ai notamment parlé de ma famille, de ma fille, Lindelwa Naledi Coyle, à qui j’ai donné naissance au Botswana et qui ne jouit pas des mêmes droits que ses sœurs nées au Canada, Emilie et Lauren, à savoir celui de transmettre sa citoyenneté à ses filles, Violetta et Sierra, qui sont nées au Mexique.
J’ai présenté les principaux éléments du projet de loi, qui définissent les règles claires d’accès à la citoyenneté par filiation qui s’appliqueront dorénavant. À l’avenir, les enfants nés ou adoptés à l’étranger d’un parent canadien né ou adopté à l’étranger pourront obtenir la citoyenneté canadienne si ce parent a un lien substantiel avec le Canada.
Le projet de loi comble également des lacunes historiques. S’il est adopté, il conférera la citoyenneté aux personnes assujetties à la limite de la première génération, c’est-à-dire à toute personne qui, avant l’entrée en vigueur du projet de loi, est née à l’étranger d’un parent canadien, à partir de la deuxième génération.
Il rétablit également la citoyenneté de certaines personnes qui l’ont déjà perdue et fournit un cadre pour offrir une voie d’accès à la citoyenneté semblable à celle qui est offerte aux familles qui adoptent des enfants à l’étranger, et ce, dans la plupart des cas, mais pas tous. J’y reviendrai plus tard.
J’ai déjà expliqué pourquoi le projet de loi C-3 est à la fois nécessaire et urgent.
Notre tâche à l’étape de la troisième lecture consiste à déterminer si le projet de loi dont nous sommes saisis propose une façon pratique et fondée sur des principes de rétablir de manière équitable l’accès à la citoyenneté par filiation.
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a terminé son étude du projet de loi C-3 et en a fait rapport à la Chambre sans proposition d’amendement.
Le Comité des affaires sociales s’est réuni le 17 novembre pour étudier le projet de loi C-3. Le Comité a entendu la ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté et des fonctionnaires de son ministère, ainsi que neuf autres témoins, y compris des avocats de l’Association du Barreau canadien et de l’Association canadienne des avocats en immigration, des universitaires, des militants pour les droits des parents adoptifs, des militants pour les droits des Canadiens dépossédés de leur citoyenneté et le directeur parlementaire du budget.
Le Comité des affaires sociales a également mené, en décembre 2024, une étude préalable du prédécesseur du projet de loi C-3, le projet de loi C-71.
En tant que sénatrice qui parraine le projet de loi C-3 au Sénat, je souscris aux conclusions du rapport du comité. Certains collègues ont demandé si adopter ce projet de loi maintenant nous laissera suffisamment de temps pour un second examen objectif. Je comprends cette préoccupation, mais le contexte juridique et administratif est important.
En décembre 2023, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a déclaré inconstitutionnelles des dispositions fondamentales de la limite imposée à la citoyenneté par filiation après la première génération. Elle a estimé qu’elles violaient le droit à l’égalité et la liberté de circulation et d’établissement garantis par la Charte. Afin de laisser au Parlement le temps de réagir, la Cour avait d’abord suspendu l’application de sa déclaration jusqu’au 20 novembre, soit demain, mais elle a accordé récemment une prolongation jusqu’au 20 janvier 2026.
Le projet de loi C-3 est la solution. Il permettrait de régulariser la situation des personnes qui, sans la limite de la première génération fixée en 2009, auraient été des citoyens canadiens par filiation dès leur naissance. Parmi celles-ci figurent une cohorte d’enfants de 16 ans et moins ainsi que les descendants de Canadiens qui avaient été dépossédés de leur citoyenneté et qui ont déjà bénéficié d’une mesure corrective. Il y a aussi une petite cohorte qui a perdu sa citoyenneté en vertu des dispositions obsolètes de la Loi sur la citoyenneté de 1977.
À l’avenir, le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté, garantirait également qu’un enfant né ou adopté à l’étranger par un Canadien ayant un lien substantiel avec le Canada ait accès à la citoyenneté, quel que soit le lieu de résidence de la famille.
Ce lien doit être démontré par la présence physique du parent au Canada pendant au moins 1 095 jours cumulatifs — soit trois ans au total — avant la naissance ou l’adoption de l’enfant à l’étranger. Certaines personnes ont fait valoir que ces trois années devraient être comprises dans une période de cinq ans, car cette approche correspond à celle du Canada en ce qui concerne la naturalisation. Cependant, la citoyenneté par filiation est différente. Il ne s’agit pas d’accorder la citoyenneté à une nouvelle personne qui a immigré au Canada. Il s’agit de vérifier qu’un Canadien né ou adopté à l’étranger a un lien substantiel avec ce pays avant de pouvoir transmettre la citoyenneté à son enfant également né ou adopté à l’étranger. Un modèle cumulatif reconnaît la réalité selon laquelle les Canadiens peuvent établir des liens profonds et durables avec notre pays au fil du temps, même si ces liens ne sont pas établis au cours d’une période de cinq ans.
Nous avons aussi entendu des préoccupations au sujet du nombre de demandes, des coûts et des pressions possibles sur les services sociaux. Chers collègues, il est important de noter que les craintes alarmistes selon lesquelles des centaines de milliers, voire un million de personnes obtiendraient la citoyenneté canadienne à cause du projet de loi C-3 sont exagérées et sans fondement.
Lundi soir, pendant la réunion du comité, Jason Jacques, le directeur parlementaire du budget par intérim, a affirmé :
[...] Selon notre analyse, nous estimons le coût net total des modifications proposées à la Loi sur la citoyenneté à 20,8 millions de dollars sur cinq ans. Le nombre total des personnes touchées est estimé à environ 150 000 au cours de la même période. [...]
De janvier 2024 à juillet 2025, le ministère a reçu un peu plus de 4 200 demandes dans le cadre de la mesure provisoire destinée aux personnes concernées par la limite de la première génération. Des modifications similaires avaient déjà été apportées en 2009 et 2015, et au cours des décennies qui ont suivi, environ 20 000 personnes ont demandé une preuve que la citoyenneté leur a été rendue.
Le nombre de demandes d’attribution discrétionnaire de la citoyenneté de la part de personnes qui l’ont perdue en raison de l’article 8 est faible, lui aussi, et il est en train de diminuer. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, recevait initialement entre 35 et 40 demandes par an. Le ministère n’a constaté aucune augmentation marquée du nombre de demandes dans tous ces cas.
L’incidence nette sur les coûts devrait également être limitée.
Certaines personnes visées par le projet de loi C-3 vivent déjà au Canada et contribuent aux recettes de l’État, tandis que celles qui se trouvent à l’étranger ne sont généralement pas admissibles à la plupart des programmes sociaux du Canada. Chaque programme fédéral et provincial a ses règles d’admissibilité fondées sur l’âge, le revenu, le statut juridique, la déclaration de revenus ou la résidence au Canada ou dans une province pendant une période déterminée. Toute personne qui présente une demande pour bénéficier d’un programme ou d’un service doit satisfaire à tous les critères, comme tout autre Canadien.
Des questions ont également été soulevées sur les vérifications de sécurité, les tests de langue et de connaissances. La citoyenneté par filiation n’a jamais exigé de vérification des antécédents pour des raisons de sécurité, des antécédents criminels ou des compétences linguistiques, et ce projet de loi maintient cette situation. Le Canada ne peut pas avoir différentes catégories de citoyens : ceux qui sont nés ici et dont la citoyenneté est automatique, et ceux qui sont nés à l’étranger au-delà de la première génération et qui doivent se soumettre à des tests complémentaires.
Le fardeau de la preuve repose entièrement sur les épaules du parent canadien, qui doit fournir la preuve de sa présence physique au Canada pendant 1 095 jours avant la naissance ou l’adoption de son enfant à l’étranger. Les documents comme les relevés de notes, les relevés de paie ou les baux seront examinés par des agents. Si un parent ne peut pas démontrer son lien substantiel avec le Canada, son enfant né ou adopté à l’étranger n’obtiendra pas la citoyenneté canadienne.
Chers collègues, lors de la deuxième lecture, le porte-parole pour ce projet de loi a fait valoir que le gouvernement aurait dû faire appel de la décision de la cour et qu’en procédant dans le délai fixé par le juge, le gouvernement risquait de restreindre le débat. Je comprends toujours cette préoccupation. Cependant, nous ne sommes pas en train de légiférer à l’aveuglette et nous n’avons pas beaucoup de temps, même avec le nouveau délai.
Nous avons un problème constitutionnel à régler. Nous avons une solution claire. Nous avons examiné soigneusement plusieurs options de politique. La norme des 1 095 jours au total s’inspire des règles de naturalisation. Elle est appliquée différemment afin d’offrir aux Canadiens la flexibilité nécessaire pour profiter des possibilités qui s’offrent à eux à l’étranger. Il s’agit d’une règle qu’il est réaliste de vouloir appliquer, qui respecte la réalité vécue par les familles et qui préserve la valeur de la citoyenneté canadienne.
Certains pensent que les Canadiens dont les origines canadiennes remontent à de nombreuses générations et qui vivent à l’étranger en permanence devraient pouvoir obtenir la citoyenneté sans avoir à faire la démonstration du lien substantiel. La structure du projet de loi offre une solution à cette situation. Chaque génération suivant la première génération devrait démontrer à nouveau son lien au Canada avant de transmettre la citoyenneté aux enfants nés à l’étranger. Si un parent n’a pas de lien substantiel avec notre pays, la citoyenneté par filiation s’arrêterait avec lui.
Lors de la réunion du comité de lundi, nous avons entendu parler du problème inverse qui existe à cause du monde d’aujourd’hui. Nous avons entendu parler des difficultés et des coûts que cette situation non résolue impose aux Canadiennes qui sont nées à l’étranger et qui vivent à l’étranger au moment où elles souhaitent avoir des enfants.
Allison Petrozziello, professeure à l’Université métropolitaine de Toronto, a déclaré ceci :
[...] Depuis 2009, le seul conseil que le gouvernement a pu donner aux Canadiennes pour leur permettre de transmettre leur citoyenneté à leurs enfants est de revenir au Canada en fin de grossesse pour y accoucher. Même pendant la pandémie de COVID-19, même en cas de grossesse à haut risque, même lorsque le couple essaie depuis des années de concevoir un enfant par fécondation in vitro et même lorsque les parents ont accès à une équipe médicale et à l’assurance-maladie dans leur pays de résidence, mais pas ici au Canada. Le projet de loi C-3 promet donc d’éliminer une fois pour toutes la discrimination fondée sur le sexe dans notre Loi sur la citoyenneté et de permettre aux parents canadiens de prendre les décisions en matière de procréation en consultation avec leurs médecins, pas avec le gouvernement.
La disposition relative au lien substantiel est une règle équitable et fondée sur des principes. Elle est également humaine, car elle met l’accent sur les liens réels et démontrés d’une mère avec le Canada plutôt que sur des calendriers rigides qui peuvent pénaliser les familles dont la vie transcende les frontières.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-3 vise à redonner la citoyenneté canadienne à ceux qui en ont été privés. Il établit une norme claire et fondée sur des preuves pour l’avenir. Il préserve l’intégrité de la citoyenneté canadienne en veillant à ce que ce soit le lien — et non la commodité — qui régisse la transmission au-delà de la première génération.
Après l’adoption du projet de loi C-3 par le Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie, le sénateur Arnot a présenté trois observations, qui ont également été appuyées...
Sénatrice Youance, j’ai le regret de vous annoncer que votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous cinq minutes de plus?
Oui, une minute.
Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?
Merci, Votre Honneur.
Avec le projet de loi C-3, nous pouvons remédier à la situation des personnes qui ont perdu la citoyenneté canadienne et moderniser la loi afin qu’elle reflète le mode de vie des Canadiens.
Les Canadiens sont mobiles et se trouvent partout sur la planète, mais nous sommes profondément attachés à notre pays. Je vous exhorte à adopter le projet de loi C-3 afin que la Loi sur la citoyenneté canadienne reflète mieux la réalité moderne.
Merci.
Honorables sénateurs, je n’ai pas l’intention de retarder l’adoption de ce projet de loi. Le délai imposé par la Cour supérieure de justice de l’Ontario dans la décision Bjorkquist est réel, et les conséquences de son non-respect sont graves. Cependant, même en respectant la date d’échéance fixée par la cour, le Parlement, en corrigeant des iniquités de longue date, a l’obligation de veiller à ne pas en créer de nouvelles par inadvertance.
C’est dans cet esprit que je souhaite parler d’une préoccupation centrale : le traitement inéquitable, en vertu du projet de loi C-3, des personnes adoptées à l’étranger. Il s’agit d’enfants introduits dans des familles canadiennes dans le cadre d’un processus d’adoption long et très rigoureux, des enfants auxquels le Canada, conformément à la Convention de La Haye, est tenu d’accorder le même statut que celui accordé aux enfants canadiens adoptés au pays. Pourtant, le projet de loi C-3 risque de créer de nouveaux obstacles qui touchent injustement et uniquement sur ce groupe.
Le projet de loi C-3 s’applique aux enfants nés à l’étranger de parents canadiens, aux enfants adoptés à l’étranger par des Canadiens vivant à l’étranger et, surtout — même si c’est problématique —, aux enfants adoptés à l’étranger.
Il est important de souligner que l’expression « adoption internationale » désigne toute adoption dont l’enfant et les parents adoptifs proviennent de pays différents. Fait important, l’expression « adoption internationale » a également un sens juridique. Elle est utilisée en droit canadien et international pour décrire le processus d’adoption d’un enfant d’un autre pays dans le cadre du système juridique transfrontalier officiel, dans lequel s’inscrit la Convention de La Haye.
Dans une lettre récente, des fonctionnaires d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ont apporté des précisions essentielles, surtout sur le fait que les enfants nés à l’étranger de parents canadiens vivant à l’étranger, soit le groupe 1, et les enfants adoptés à l’étranger par des Canadiens vivant à l’étranger, soit le groupe 2, peuvent obtenir la citoyenneté en vertu de l’article 5.1 de la Loi sur la citoyenneté, même s’ils n’ont jamais vécu au Canada. Leurs parents n’ont pas besoin de résider au Canada après l’adoption, et leur adoption n’a pas besoin d’être reconnue par une autorité provinciale. La citoyenneté est accordée directement.
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a également confirmé que l’article 5.1, qui a été créé dans la foulée de l’affaire McKenna en 1998 et qui a été interprété dans le cadre de l’affaire Worthington en 2008, visait à garantir l’égalité entre les enfants nés à l’étranger et les enfants adoptés à l’étranger, et non à créer de nouvelles distinctions. Enfin, le ministère a souligné que le projet de loi C-3 applique le critère du lien substantiel de la même manière aux enfants nés à l’étranger et aux enfants adoptés à l’étranger.
Cependant, chers collègues, un libellé identique ne produit pas toujours des résultats identiques, et c’est là que surgissent les préoccupations concernant les personnes adoptées à l’étranger. Les précisions apportées par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada révèlent qu’il faut reconnaître trois groupes distincts.
Le groupe 1 : les enfants nés à l’étranger de parents canadiens vivant à l’étranger, qui pourraient ne jamais résider au Canada, mais qui acquièrent et transmettent néanmoins la citoyenneté si leurs parents satisfont à l’exigence des 1 095 jours. Le groupe 2 : les enfants adoptés à l’étranger par des Canadiens vivant à l’étranger, qui, eux aussi, pourraient ne jamais vivre au Canada, mais qui se voient accorder directement la citoyenneté. Finalement, le groupe 3 : les enfants adoptés à l’étranger. Il s’agit d’enfants adoptés par des citoyens canadiens vivant au Canada. Ils sont, en fait et en droit, adoptés au Canada. Leur adoption doit être autorisée et supervisée en vertu des lois provinciales et territoriales. Ils sont soumis aux mesures de protection prévues dans la Convention de La Haye. Ils n’entrent au Canada qu’après avoir obtenu l’approbation du gouvernement fédéral et sont élevés au Canada, souvent dès leur plus jeune âge, comme des membres à part entière de la société canadienne.
Pourtant, à des fins de transmission de la citoyenneté, le projet de loi C-3 les traite malheureusement comme s’ils appartenaient au groupe 1 ou 2, c’est-à-dire comme des enfants qui pourraient ne jamais vivre au Canada. En ce qui concerne les enfants adoptés à l’étranger, l’application du critère du lien substantiel est fondamentalement inéquitable, et c’est là le nœud du problème.
Si vous devez retenir une seule chose de mon discours d’aujourd’hui, que ce soit ceci : les enfants adoptés à l’étranger doivent être traités de la même manière que les enfants adoptés au Canada. La Convention de La Haye exige que les enfants adoptés à l’étranger jouissent des mêmes droits et du même traitement que les enfants adoptés au pays.
Autrement dit, étant donné que les enfants adoptés au Canada ne doivent pas satisfaire à un critère de lien substantiel, il en va de même pour les enfants adoptés à l’étranger. C’est cette exigence dans le projet de loi qui constitue un obstacle qui est interdit par la Convention de La Haye.
Réfléchissons à ceci : aucun groupe de citoyens canadiens n’est soumis à un processus de vérification aussi rigoureux et complexe avant d’entrer au Canada que celui des enfants adoptés à l’étranger. Ces enfants sont soumis aux tests suivants : approbation provinciale et territoriale, surveillance provinciale de la protection de l’enfance, approbation de l’État étranger, évaluations de l’intérêt supérieur, mesures de protection contre la traite des personnes, examen de conformité à la Convention de La Haye, examen fédéral de citoyenneté et confirmation que l’adoption est authentique et qu’elle n’a pas été demandée dans l’unique but d’obtenir la citoyenneté.
Des témoins ont déclaré devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie qu’il s’agissait d’un processus intégré. Une ordonnance d’adoption déclenche l’envoi d’une « lettre de non-opposition » par la province, et ce n’est qu’à ce moment-là qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada autorise l’enfant à entrer au Canada.
Comme l’a déclaré une témoin : « [...] si Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada estime que nous ne respectons pas la loi, je n’aurai pas de fils. »
Malgré tout cela, le projet de loi C-3 exige que ces personnes adoptées — des enfants qui grandissent ici au Canada, qui fréquentent les écoles canadiennes et dont la vie se déroule au Canada — prouvent à nouveau qu’elles ont un lien substantiel avec le pays même qui les a adoptées. C’est une anomalie absurde.
Les témoins ont décrit cela comme une forme de double contrôle et, de façon plus douloureuse encore, comme une remise en question de la légitimité du statut de citoyen canadien de l’enfant adopté. Une mère l’a exprimé ainsi : demander à un enfant adopté à l’étranger « [...] de prouver qu’il est lié à la nation qui l’a adopté revient à lui demander qui sont ses vrais parents ».
Ce projet de loi soulève des questions de droit constitutionnel et international pour les personnes adoptées à l’étranger. Cela comprend le droit à l’égalité garanti par l’article 15 de la Charte. Les personnes adoptées à l’étranger doivent composer avec des répercussions discriminatoires en raison de leur pays de naissance, de leur parcours d’adoption, de leur représentation disproportionnée parmi les enfants racialisés et de leur mobilité potentiellement réduite en raison de traumatismes ou de besoins médicaux. Ces personnes sont traitées différemment des enfants adoptés au pays, malgré la garantie d’égalité de traitement prévue par la Convention de La Haye.
Cela comprend également le droit à la mobilité garanti par l’article 6 de la Charte. Le critère du lien substantiel limite la mobilité future des enfants adoptés, qui pourraient ne pas être en mesure d’accumuler 1 095 jours au Canada pendant qu’ils sont encore jeunes.
Cela comprend ensuite le droit à la sécurité de la personne, garanti par l’article 7 de la Charte. Les témoins ont expliqué que le fait de limiter la capacité d’un enfant adopté à transmettre sa citoyenneté menace l’unité familiale et la sécurité future.
Enfin, cela soulève des questions de droit international. En vertu de la Convention de La Haye, le Canada doit veiller à ce que les personnes adoptées à l’étranger aient les mêmes droits que les personnes adoptées au pays, lesquelles obtiennent automatiquement la citoyenneté pleine et transmissible. Or, le projet de loi C-3 viole ce principe.
Les témoins ont déclaré sans ambages que le Canada ne respectait pas la Convention de La Haye depuis 2009. Il s’agit là d’une allégation grave qui mérite d’être examinée avec sérieux, mais nous n’avons pas eu le temps de le faire.
Le gouvernement a présenté un énoncé concernant la Charte. Celui-ci indique que le projet de loi est constitutionnel.
Ici, il faut être clair et précis et dire que cet énoncé concernant la Charte est lacunaire. En voici les lacunes : premièrement, il ne traite pas du tout des adoptés interpays; deuxièmement, il propose une analyse incomplète concernant l’égalité; troisièmement, il ne tient pas compte de la Convention de La Haye ni de la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant; quatrièmement, il ne traite pas des preuves des effets néfastes présentées lundi soir par des familles canadiennes devant le Comité des affaires sociales; cinquièmement, le travail du comité comble donc les lacunes constitutionnelles que cet énoncé concernant la Charte laisse subsister.
Certains ont fait valoir que le temps manque pour apporter des modifications. C’est vrai, mais le Parlement peut quand même consigner ses préoccupations au compte rendu et s’engager à apporter des corrections à l’avenir. En effet, des témoins nous ont rappelé que c’est précisément ce qui s’est produit en 2009. En 2009, à un moment où les contraintes de temps étaient comparables, le Sénat a adopté le projet de loi C-37 malgré des préoccupations concernant la rigidité et l’équité. Le Sénat a néanmoins consigné de sévères observations dans le compte rendu, et ces avertissements ont ensuite été cités dans le cadre de contestations fondées sur la Charte. Nous pouvons et devons suivre cet exemple.
Le Comité des affaires sociales a entendu les témoignages extraordinaires de Mme Katherine Lanteigne et de M. Graeme Ball, parents adoptifs de Nathanael, âgé de 10 ans. Leurs témoignages ont clarifié certaines réalités juridiques essentielles. Premièrement, il est illégal d’adopter un enfant à l’étranger dans le cadre d’une adoption internationale si les parents ne résident pas au Canada. Deuxièmement, il est important de s’appuyer sur la définition juridique de l’adoption internationale, plutôt que sa définition générale. J’y ai fait référence à dessein. Dans son sens juridique, l’adoption internationale est un processus précis et strictement régi par la Convention de La Haye. Troisièmement, les enfants adoptés à l’étranger ne sont pas des immigrants. D’ailleurs, leur statut est déterminé par le droit de l’adoption, et non le droit de l’immigration. Quatrièmement, les explications publiques d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ont parfois brouillé ces distinctions, créant de la confusion pour les décideurs politiques.
Les témoins ont décrit au Comité des affaires sociales les traumatismes, l’altérité raciale et les dommages durables qui surviennent lorsque les enfants adoptés ne sont pas traités comme des Canadiens à part entière. Ils ont clairement indiqué que, si le projet de loi C-3 est adopté tel quel, comme il le sera aujourd’hui, ils invoqueraient la Charte pour le contester devant les tribunaux, au nom de leur fils. Ils ont retenu les services d’avocats en droit constitutionnel expérimentés, y compris le professeur Sujit Choudhry, qui a déjà plaidé avec succès l’affaire Bjorkquist devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario. Ils nous ont rappelé que le non-respect par le Canada de la Convention de La Haye n’aura pas seulement des conséquences théoriques; il risque de nuire à la réputation du Canada auprès des pays partenaires qui comptent sur lui pour suivre à la lettre la convention.
Les témoignages rendus par Mme Lanteigne et M. Ball étaient percutants, émouvants, profondément personnels et fondés sur le droit. Ils doivent éclairer nos délibérations.
Étant donné que la déclaration d’invalidité n’est suspendue que jusqu’au 20 janvier 2026, le Sénat ne peut raisonnablement pas amender le projet de loi sans risquer de créer un vide législatif. Nous ne pouvons pas permettre une situation où aucune règle de transmission de la citoyenneté ne s’applique. Toutefois, nous pouvons et nous devons exprimer clairement nos préoccupations : premièrement, les adoptés interpays constituent une catégorie distincte et particulièrement vulnérable d’enfants canadiens; deuxièmement, le projet de loi C-3 constitue une violation claire et sans ambiguïté des articles 15, 6 et 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, ainsi qu’une violation de la Convention de La Haye telle qu’elle s’applique à ces enfants; troisièmement, le Parlement n’a jamais eu l’intention de rendre leur citoyenneté conditionnelle ou moins transmissible; et, quatrièmement, de futures mesures législatives devraient inclure une modification ciblée et restreinte, telle que le traitement des adoptés interpays qui ont grandi au Canada comme des « citoyens autrement que par filiation » — un terme juridique —, comme le fait le Royaume-Uni, afin de remédier à ces violations.
Il s’agit d’une modification législative simple qui corrigerait la situation. C’est un amendement que j’aurais proposé si j’avais eu plus de temps.
Je note également avec espoir que la ministre, Mme Metlege Diab, a accepté de rencontrer des représentants des adoptés interpays, notamment Mme Lanteigne et M. Ball. Il s’agit là d’une avancée que j’encourage, car j’espère qu’une solution législative sera trouvée, la seule voie possible pour régler la question.
Chers collègues, je tiens à remercier la sénatrice Coyle, qui est la marraine du projet de loi, la sénatrice Youance, qui a lu le discours de la sénatrice Coyle, la sénatrice Moodie, qui est la présidente du Comité des affaires sociales, la sénatrice Osler, qui est la vice-présidente...
Sénateur Arnot, votre temps de parole est écoulé. Je vais demander à vos honorables collègues s’ils vous accordent plus de temps.
Le consentement est-il accordé?
Je voulais simplement mentionner tous les membres du Comité des affaires sociales qui se sont penchés sur cette question et qui ont appuyé les trois observations.
La citoyenneté, c’est plus qu’un statut juridique, c’est une déclaration d’appartenance. Lorsque des parents canadiens adoptent un enfant de l’étranger, ils ne lui disent pas : « Tu es Canadien, mais seulement à certaines conditions. » Ils lui disent : « Tu es notre enfant. »
Le projet de loi C-3 permet au Canada de corriger les injustices subies par les Canadiens dépossédés de leur citoyenneté, et pour cette raison, il mérite notre appui, mais il risque également de créer une nouvelle génération de Canadiens qui se heurteront à des obstacles qu’aucun autre enfant canadien n’a à surmonter, car, même pour certains enfants dont les liens d’appartenance au Canada ont déjà été mieux démontrés que pour n’importe quel autre citoyen canadien, il faudra de nouveau fournir des preuves de cette appartenance.
Adoptons ce projet de loi pour respecter l’échéance de la cour, mais tâchons également de dire les choses clairement, comme le Sénat l’a fait en 2009, afin que les parlementaires des futures législatures puissent terminer le travail de façon à ce que les personnes adoptées à l’étranger ne puissent jamais devenir la prochaine génération de Canadiens dépossédés de leur citoyenneté.
Merci, honorables collègues.
Honorables sénateurs, je serai très bref. J’aurais voulu poser une question au sénateur Arnot, mais nous avons manqué de temps.
Je ne comprends pas comment nous avons pu recevoir un projet de loi lundi — selon nos règles, nous disposions en fait de temps supplémentaire pour les comités, qui n’a pas été utilisé — et en être là aujourd’hui. Il reste trois semaines avant la fin de nos travaux pour l’année, et vous nous dites qu’on vous a informé que nous n’avions pas assez de temps pour faire notre travail. C’est pourtant notre travail. Pourquoi? Monsieur, à quel point serez-vous contrarié si nous adoptons cet amendement — et nous allons proposer un amendement —, nous renvoyons le projet de loi et vous n’obtenez pas le résultat que vous souhaitiez?
Je suis choqué que l’on puisse maintenant affirmer que nous n’avons pas le temps de nous occuper de cette question. C’est vraiment déplorable.
Je vous remercie pour vos observations et votre passion à ce sujet. Si nous recevions cinq cents chaque fois qu’un ministre nous demande de ne pas modifier un projet de loi pour quelque raison que ce soit, nous serions riches.
Sénateur Arnot, je suis triste pour vous; vous êtes un membre estimé et un contributeur important du Sénat. J’aimerais que vous puissiez faire apparaître un amendement de notre pupitre dès maintenant, car nous allons étudier des amendements. Je ne sais pas si c’est possible, mais peut-être bien. Je ne sais pas de quel amendement nous serons saisis, mais si nous l’adoptons, le ministre pourrait prendre la parole et présenter l’amendement que vous auriez dû présenter ici. Je vous remercie.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que porte-parole pour le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté.
Normalement, je commencerais par rappeler les détails du projet de loi, mais étant donné qu’un peu moins de deux semaines se sont écoulées depuis mon intervention précédente, je vais plutôt commencer par l’historique législatif qui nous a menés là où nous en sommes.
Remontons 21 ans en arrière, en 2004, à la troisième session de la 37e législature, où le sénateur Noël Kinsella a présenté le projet de loi S-17 afin de remédier aux cas de personnes qui avaient involontairement perdu leur citoyenneté canadienne en raison de dispositions obsolètes de la loi de 1947.
Le projet de loi, adopté à l’unanimité par le Sénat, est mort au Feuilleton à l’autre endroit. Son contenu a été repris lors de la législature suivante sous la forme du projet de loi S-2, qui a reçu la sanction royale en 2005 et est devenu l’une des premières mesures, impulsées par le Sénat, visant à rétablir le statut des personnes injustement exclues en vertu des lois antérieures.
S’appuyant sur ces fondements, le projet de loi C-37 de 2008 a permis de traiter de nombreux cas restants et a introduit la limite de la première génération, dans le but de trouver un équilibre entre l’équité et l’inclusion, d’une part, et la nécessité de préserver la valeur de la citoyenneté canadienne et d’éviter le phénomène des citoyens par opportunisme, d’autre part.
D’autres modifications techniques ont été apportées plus tard grâce au projet de loi C-24, et le projet de loi S-245 de la dernière législature visait à apporter une solution ciblée aux familles servant le Canada à l’étranger.
Le projet de loi C-3 dont nous sommes saisis aujourd’hui vise non seulement à combler les lacunes relevées dans la décision Bjorkquist pour les personnes qui ont perdu la citoyenneté canadienne, mais redéfinit également la citoyenneté par filiation au pays.
Il est important de reconnaître que c’est le Sénat, constituée à la fois du caucus du gouvernement et du caucus de l’opposition qui sont chacun liés à des partis nationaux, qui a d’abord mis en branle les efforts visant à remédier à ces iniquités. C’est le second examen objectif du Sénat, conjugué à la capacité des sénateurs de faire valoir les dossiers négligés au sein de leurs caucus, qui a ouvert le bal. Grâce à une étude minutieuse, à un plaidoyer fondé sur des principes et à une collaboration entre les partis, le Sénat a joué un rôle décisif en incitant le Parlement à agir.
Dans cette optique, chers collègues, il est préoccupant que nous soyons saisis d’un projet de loi aussi important, qui redéfinit la citoyenneté par filiation et traite des droits des Canadiens dépossédés de leur citoyenneté, depuis moins de deux semaines. Chers collègues, comme l’a souligné le sénateur Tannas, si l’on exclut la semaine de pause, cela ne représente que quelques heures et quelques jours.
Peu de questions et de projets de loi ont autant besoin de notre second regard objectif que la question de la citoyenneté dans notre pays. Depuis les premières tentatives du sénateur Kinsella jusqu’aux efforts du gouvernement Harper de trouver le juste équilibre, le Parlement a toujours abordé ce dossier avec un soin diligent.
Pourtant, aujourd’hui, ce n’est pas ainsi que les choses se passent. Le gouvernement s’appuie sur un échéancier imposé par les tribunaux pour précipiter les délibérations sur le projet de loi C-3 et, ni plus ni moins, pour passer outre au second examen objectif. Au lieu de permettre aux sénateurs de soumettre la Loi sur la citoyenneté et les possibles conséquences du projet de loi C-3 sur les Canadiens et les générations à venir à un second examen objectif, on insiste pour que nous respections un échéancier. Il s’agit pourtant de notre citoyenneté, donc de la question la plus fondamentale qui soit.
L’incarnation précédente de cette mesure législative, le projet de loi C-71, nous avait placés dans la même situation l’an dernier, puisque le comité avait pu entendre seulement quatre groupes de témoins. Comment affirmer avec certitude que nous avons procédé à un second examen objectif dans ce genre de conditions?
Il est important de rappeler encore une fois que, le 6 novembre, le gouvernement a représenté une motion à laquelle nous avons alors donné notre appui parce que le délai fixé par les tribunaux était le 20 novembre. Comme je l’ai dit à l’étape de la deuxième lecture, nous avons soutenu cette motion de procédure parce que nous voulions respecter le délai établi par les tribunaux. Sauf que, le 12 novembre, la Cour supérieure de l’Ontario a accordé un sursis de deux mois, soit jusqu’au 20 janvier. Miracle, la crise s’est évaporée, une crise — nous pouvons maintenant le confirmer — entièrement due à l’opportunisme politique du gouvernement.
À ce moment-là, chers collègues, en se fondant sur les renseignements à leur disposition, les leaders se sont réunis et ils ont conclu un marché. Comme nous formons une opposition responsable, nous allons honorer ce marché.
En même temps, nous avons reçu un nombre très limité de projets de loi du gouvernement depuis le début de la législature actuelle. En dehors des projets de loi obligatoires portant sur les crédits, le Sénat a traité exactement quatre projets de loi du gouvernement depuis le mois de mai. C’est une situation sans précédent après une élection générale, alors que le gouvernement a clairement pour mandat d’être un agent de transformation pour les générations futures. Bref, depuis le mois de mai, chers collègues, nous n’avons reçu que les projets de loi C-5, lié au discours du Trône, et les projets de loi S-2, C-3 et S-3, dont le débat vient de commencer.
C’est là toute l’ambition législative du gouvernement à ce jour. Après 34 jours de séance depuis l’ouverture du Parlement, un seul projet de loi du gouvernement a reçu la sanction royale. Si cela continue, les Canadiens commenceront à se demander non pas ce que fait le Sénat, mais ce que fait le Parlement.
Bien qu’il prétende avoir un programme ambitieux et bien que tous les comités soient prêts et disposés à examiner des mesures législatives du gouvernement, celui-ci ne semble pas pressé de gouverner ni, à coup sûr, de soumettre sa gouvernance à l’examen minutieux du Parlement. Pourtant, si l’on compte le nombre de jours que le premier ministre consacre à parcourir le pays en jet pour tenter de nous sauver, je crois que cela représente bien plus que 34 jours de séance.
Ce qui apparaît clairement, même à ce stade précoce de la législature, c’est que l’opportunisme politique prime sur tout le reste. Les relations publiques, les séances photo et le temps passé à se regarder le nombril sont plus importants que l’élaboration de mesures législatives.
Aujourd’hui, nous avons reçu le ministre de la Justice. Je lui ai posé des questions très concrètes, mais il n’a cessé de me répondre en évoquant des projets de loi ambitieux à venir. Il n’a pas été en mesure de citer un seul texte législatif traitant des droits des victimes, que ce soit au cours des 34 derniers jours ou des 10 dernières années. Mais il tenait à dire qu’il faut faire confiance au gouvernement, qu’une annonce allait venir. Il y a toujours une annonce à venir.
On nous avait dit que le projet de loi C-5 devait être adopté immédiatement, ce qui pouvait peut-être s’expliquer dans le contexte d’une promesse électorale. Nous l’avons adopté rapidement, avec la collaboration des deux côtés de la Chambre. Malheureusement, les incohérences entre les projets de loi S-2, C-5 et C-3 sont flagrantes.
Dans le cas du projet de loi C-5, le gouvernement avait assuré aux Premières Nations de tout le pays que les consultations pourraient simplement avoir lieu après l’adoption du projet de loi. Le gouvernement avait demandé de lui faire confiance, sa chanson la plus célèbre. Je ne cesse de répéter qu’il faut se méfier de tout politicien éloquent, sans parler de l’évocation de la sacro-sainte confiance.
Pourtant, avec le projet de loi S-2, ce même gouvernement refusait de faire un compromis avec le comité sur les amendements visant à éliminer la règle d’exclusion après la deuxième génération, en insistant soudainement sur le fait que son devoir de consultation est essentiel et de la plus haute importance.
Puis, avec le projet de loi C-3, le gouvernement a une fois de plus changé son fusil d’épaule, exigeant que le Sénat adopte immédiatement le projet de loi visant à éliminer la règle d’exclusion après la deuxième génération dans la Loi sur la citoyenneté, mais uniquement pour les Canadiens nés à l’étranger.
La vérité, chers collègues, c’est que nous avons un gouvernement qui ne souhaite pas respecter le processus parlementaire et un premier ministre qui n’est guère disposé à être présent au Parlement ou à remplir le mandat que lui ont confié les Canadiens de manière transparente et en consultation avec nous dans le cadre de notre rôle en tant que parlementaires.
En ce qui concerne le contenu du projet de loi, en tant que parlementaires, nous avons le devoir de faire respecter la valeur intrinsèque de la citoyenneté canadienne et de veiller à ce que les liens importants demeurent au cœur de la citoyenneté. Toute modification de la loi doit être claire, cohérente et facile à appliquer, non seulement pour les éventuels citoyens, mais aussi pour les fonctionnaires chargés de l’application de la loi. C’est exactement ce dont il a été question au cours de la dernière réunion du comité, lundi soir.
Et ce n’est pas la première fois. En 2008, dans le cadre de son étude du projet de loi C-37, le même comité a fait remarquer que le gouvernement devrait réécrire la Loi sur la citoyenneté afin de la rendre plus claire et plus facile à appliquer par les fonctionnaires qui en sont chargés. Cette responsabilité nous incombe, chers collègues.
C’est pourquoi les amendements adoptés par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes étaient si importants, dont deux qui, à mon avis, étaient les plus importants. En exigeant que les 1 095 jours soient compris dans une période de cinq ans, il a veillé à ce que le critère du lien substantiel illustre réellement un lien important au Canada, tout en adoptant des exigences identiques pour la citoyenneté par naturalisation et par filiation.
En outre, en étendant les exigences en matière de langue et de sécurité à la citoyenneté par filiation et aux enfants adoptés, les amendements ont renforcé l’intégration et la sécurité nationale. Enfin, en instaurant l’obligation de présenter un rapport annuel au Parlement, les amendements ont assuré la transparence et la surveillance des répercussions réelles des réformes.
Ces amendements constituaient une étape constructive pour améliorer la clarté et la cohérence de la Loi sur la citoyenneté. Toutefois, ils soulignent également une préoccupation plus large qui ne peut être ignorée, à savoir que le gouvernement doit faire preuve d’une véritable transparence et doit rendre de vrais comptes. C’est une chose que le présent gouvernement a malheureusement tendance à reléguer au second plan. Selon moi, le premier des deux amendements était le plus important.
Au Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes, un amendement simple, mais essentiel proposé par le député Brad Redekopp a été adopté. Cet amendement n’ajoutait aucune formalité administrative et ne modifiait en rien la portée du projet de loi. Il obligeait uniquement le ministre à déposer à la fin de chaque exercice un rapport devant les deux Chambres du Parlement indiquant le nombre de personnes ayant obtenu la citoyenneté en raison de l’entrée en vigueur de cette mesure législative, ainsi que leur pays de citoyenneté autre que le Canada, le cas échéant, leur dernier pays de résidence et les dispositions de la loi en vertu desquelles la citoyenneté a été accordée. C’est tout à fait raisonnable, chers collègues. En bref, il s’agissait d’une mesure de transparence — un outil de surveillance parlementaire — permettant aux Canadiens et à leurs représentants d’évaluer les répercussions réelles d’un changement législatif aussi important.
Soyons francs : personne, pas même le ministère, ne peut actuellement dire avec précision combien de personnes deviendront citoyens canadiens à la suite de cette réforme.
Chers collègues, la citoyenneté canadienne ne devrait pas être qu’un simple bout de papier; elle devrait être l’élément d’identité le plus essentiel et le plus précieux de notre pays. La notion de citoyenneté doit être claire et transparente, et le gouvernement ne peut pas la prendre à la légère. Si nous ne disposons pas d’instruments pour déterminer qui se voit accorder cet élément important de notre identité, et comment, que fait le gouvernement?
Je me souviens d’un ancien premier ministre qui, il n’y a pas si longtemps, a fait une publication sur Twitter en disant que le Canada était ouvert — il invitait tout le monde à venir ici librement. Peu après, nous n’arrivions plus gérer les arrivées au chemin Roxham. Nous n’arrivions pas à construire des hôtels assez rapidement à Montréal, à Toronto et partout au pays.
La crise actuelle — le coût de la vie et les pénuries qui frappent le pays — est en grande partie due à ce type de comportement irresponsable.
C’est pourquoi, quand on présente un projet de loi aussi important que celui-ci, il faut pouvoir en quantifier les résultats.
Lors de son témoignage devant notre comité lundi soir, la sous-ministre adjointe a déclaré qu’il était difficile d’estimer le nombre exact de personnes touchées par cette loi. Ce n’est pas moi qui le dis; c’est la sous-ministre adjointe. Elle a plutôt examiné les données de 2009, où un peu plus de 20 000 personnes se sont présentées, et a indiqué que depuis la décision de la cour, de janvier 2024 à juillet 2025, plus de 4 200 demandes avaient été reçues.
La ministre elle-même a confirmé ce manque de données lors de son témoignage devant le Comité de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes. En réponse à une question d’un membre du comité, la ministre Diab a d’abord déclaré qu’elle ne pensait pas que le Canada recueillait des données sur les contrôles à la sortie du territoire, avant de se corriger après un bref échange avec les fonctionnaires qui l’accompagnaient.
Chers collègues, cet épisode illustre également le niveau de confusion qui règne aux échelons supérieurs du ministère quant à la disponibilité et à la fiabilité des données de base nécessaires pour évaluer l’incidence de ce projet de loi. Ce n’est pas parce que le gouvernement n’a pas embauché d’autres fonctionnaires au cours des 10 dernières années; il suffit d’examiner les chiffres.
Lorsqu’on lui a simplement demandé combien de personnes seraient touchées par le projet de loi C-3, la ministre a répondu qu’il est « impossible de connaître le nombre exact ».
Mon observation n’est pas isolée. Andrew Griffith, ancien directeur général d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, a noté dans son mémoire au Comité des affaires sociales que la qualité des données fournies par la ministre et les fonctionnaires était « faible » et que la confusion persistait même sur la simple question de l’existence ou non au Canada de contrôles de sortie. M. Griffith a ajouté qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ne publie qu’un seul ensemble de données sur la citoyenneté sur le site de données ouvertes du gouvernement parmi plus de 100 ensembles de données. Il a qualifié cette situation de « gravement insuffisante » pour un programme d’une telle importance, soulignant que la publication des données sur les demandes de certificat de citoyenneté, la seule mesure pour savoir combien de personnes récupèrent leur citoyenneté, a cessé il y a des années.
Il a conclu que l’amendement du député Redekopp était essentiel pour que l’on puisse rendre des comptes.
En bref, ni le ministère ni la ministre ne peuvent nous dire combien de personnes verront leur statut changer à la suite de cette réforme. La meilleure estimation dont nous disposons vient du directeur parlementaire du budget : sur une période de cinq ans, le projet de loi C-3 pourrait toucher environ 115 000 personnes et coûter des millions de dollars. Pourtant, le gouvernement a choisi de rejeter un amendement qui aurait comblé cette lacune en exigeant la présentation d’un rapport annuel au Parlement.
Cela dit, nous avons affaire à un gouvernement qui considère que le Parlement est un gros désagrément. Il ne faudrait surtout pas laisser le Parlement jouer son rôle de gardien de la transparence.
Dans un tel contexte d’incertitude, le rôle du Parlement n’est pas de signer un chèque en blanc à l’exécutif, mais d’assurer un contrôle rigoureux de la mise en œuvre de la loi. C’est exactement ce que faisait cet amendement : il imposait une mesure de responsabilité raisonnable et conforme aux pratiques démocratiques exemplaires ainsi qu’aux attentes des Canadiens en matière de transparence.
Le deuxième amendement, qui est à mes yeux le plus important, c’est celui qui harmonisait l’exigence qui prévoit 1 095 jours de présence au Canada au cours d’une période de cinq ans pour l’obtention de la citoyenneté par filiation et par naturalisation. Cet amendement a fini par être rejeté par le gouvernement à l’autre endroit, lors de l’étape du rapport.
Aux termes du projet de loi C-3, une personne a seulement besoin d’accumuler 1 095 jours de présence au Canada à n’importe quel moment avant la naissance d’un enfant. Ce n’est pas vraiment un critère très exigeant. Elle peut le faire même plusieurs décennies avant d’avoir cet enfant, ce qui signifie qu’elle n’aura peut-être pas été au Canada pendant 20 ou 30 ans, mais, si elle a accumulé 1 095 jours et qu’elle peut le prouver d’une manière ou d’une autre, le compte est bon.
Selon le gouvernement, trois années passées au Canada à n’importe quel moment constituent un « lien substantiel » avec nos institutions, nos valeurs et notre communauté nationale. Chers collègues, il est logique que la citoyenneté par naturalisation et par filiation repose sur les mêmes critères : 1 095 jours au cours d’une période de cinq ans, ainsi que l’obligation pour les candidats d’avoir entre 18 et 54 ans, de démontrer leur maîtrise de l’une de nos langues officielles et de satisfaire aux normes de sécurité appropriées.
Une plus grande mobilité dans le monde ne nous oblige pas à affaiblir notre cadre de citoyenneté. Elle nous oblige à l’adapter, tout en préservant son intégrité.
Étant donné que le directeur parlementaire du budget et même la ministre elle-même sont incapables de dire combien de personnes seraient touchées par ce projet de loi, il est non seulement raisonnable, mais aussi responsable, de renforcer le critère du lien substantiel.
Lorsque le gouvernement ne peut pas préciser le nombre exact de personnes à laquelle il souhaite conférer automatiquement la citoyenneté, le Parlement est tenu de s’assurer que le cadre est solide, mesuré et défendable. Une exigence de lien plus solide sert de garde-fou contre les conséquences imprévues, préserve l’intégrité de la citoyenneté et nous garantit que tout élargissement de l’accès automatique à la citoyenneté repose sur des données probantes plutôt que sur des conjectures.
En l’absence de données claires, la prudence n’est pas de l’obstruction. Le Sénat est censé être essentiellement une Chambre de second examen objectif, et il devrait agir comme tel.
L’amendement que j’ai mentionné ne visait pas simplement à renforcer l’exigence de lien substantiel prévue dans la Loi sur la citoyenneté, mais aussi à en simplifier l’application. Le comité a entendu le témoignage d’Amandeep Hayer, qui représentait l’Association du Barreau canadien et qui nous a recommandé de cesser d’utiliser un langage complexe. Selon lui, nous devrions adopter une mesure législative très simple, cohérente et facile à comprendre.
Par ailleurs, recueillir les preuves des entrées et sorties d’une personne sur une période de 10, 20 ou 30 ans afin de documenter 1 095 jours de présence pourrait créer un fardeau administratif presque impossible à assumer. Imaginez un instant, chers collègues, le fardeau administratif que représenterait le suivi des entrées et des sorties pendant 25 ou 30 ans, pour des séjours de quelques mois ou quelques semaines, etc. Imaginez la situation. Nous avons déjà assez de mal à percevoir les impôts de manière efficace ou à suivre le nombre de personnes dans le monde qui n’en paient pas. Percy Downe pourrait nous entretenir sur la grande efficacité de l’Agence du revenu du Canada dans ce domaine.
Comment Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada s’en sortira-t-il s’il doit faire un tel suivi pendant 20 ou 30 ans?
Nous entendons parler de cas où des personnes ou des familles ont reçu l’ordre de quitter le pays en raison d’erreurs administratives. Nous avons lu l’histoire de Diana Calderón, qui a été rapportée par la CBC.
Je serai clair, chers collègues : je ne dis pas que c’est la faute des fonctionnaires du ministère, loin de là. Le gouvernement a présenté le projet de loi C-3, il a ajouté un nouveau critère qui s’applique pendant on ne sait trop combien de temps avant la naissance d’un enfant et il a laissé aux fonctionnaires se débrouiller. Or, il vient un temps où les parlementaires doivent aider les fonctionnaires à servir les Canadiens. C’est notre devoir. Nous avons le devoir de faire en sorte que ce projet de loi et que les services que la fonction publique est tenue d’offrir au public sont à la fois rationnels et pratiques.
Cette politique ayant été circonscrite à une période de cinq ans, comme la naturalisation, le ministère dispose déjà du savoir-faire nécessaire pour la mettre en œuvre. C’est logique, mais encore une fois, le gouvernement a décidé qu’il savait mieux faire les choses que le comité : il confie la mise en œuvre de cette politique à la fonction publique. Il lui demande de se débrouiller.
Ces amendements auraient été une première étape en vue de la simplification d’une loi d’une complexité déjà excessive. D’ailleurs, cette volonté de la simplifier ne date pas d’hier. En 2009, pendant l’étude du projet de loi C-37, le Comité des affaires sociales réclamait déjà la complète réécriture de la Loi sur l’immigration afin de la rendre plus claire et plus facile à appliquer. Avec le projet de loi C-3 et les amendements judicieux ayant été adoptés à l’autre endroit, nous avions finalement l’occasion de nous rapprocher de cet objectif. Le rapport du comité sur le projet de loi C-3 abordait aussi cette question :
Votre Comité observe que la Loi sur la citoyenneté est devenue de plus en plus complexe et difficile à comprendre pour les citoyens. Compte tenu des nombreuses modifications fragmentaires apportées au fil des décennies, la Loi bénéficierait d’une modernisation complète, notamment par l’adoption de principes de rédaction en langage clair.
Une telle modernisation faciliterait la compréhension du public, réduirait les charges administratives et garantirait que les citoyens puissent mieux connaître et exercer leurs droits et responsabilités en matière de citoyenneté.
Malheureusement, cette possibilité a été délibérément supprimée quand le projet de loi a été rétabli dans sa forme initiale au stade du rapport. À ce moment-là, tous les efforts déployés par le comité de l’autre endroit pour renforcer le projet de loi ont été rejetés d’un simple trait de plume.
Et ce qui rend tout cela encore plus troublant, c’est que cela s’est produit au tout début de la présente législature. Au cours des premiers mois, alors que le gouvernement devrait donner le ton en présentant des projets de loi cohérents et mûrement réfléchis, nous assistons plutôt à une désorganisation et à une indifférence totale à l’égard du Parlement. Si c’est ainsi que commence la session, il y a lieu de se demander : est-ce là le ton auquel les Canadiens doivent s’attendre pour la 45e législature?
Ce que cette séquence révèle, c’est un schéma troublant : il y a urgence quand cela arrange le discours politique du gouvernement, et on retarde les choses quand le Parlement cherche à régler des injustices que le gouvernement a décidé de ne pas considérer comme prioritaires. On nous a dit que le Sénat devait agir à une vitesse sans précédent pour permettre au gouvernement de respecter une échéance qu’il disait impossible à repousser. Pourtant, la semaine dernière, ce même gouvernement a discrètement obtenu un sursis. Le Parlement n’en a pas été informé, les sénateurs ont agi de bonne foi, et voilà où nous en sommes, chers collègues. Ce n’est pas ainsi qu’un gouvernement responsable devrait travailler avec la Chambre de second examen objectif, surtout lorsque celle-ci a démontré sa volonté d’être responsable et transparente, d’un côté comme de l’autre. Cela mine la confiance dans le processus et affaiblit la surveillance exercée par le Parlement. La prochaine fois que le gouvernement aura une échéance à respecter, sera-t-elle réelle, ou bien le gouvernement la modifiera-t-il à la dernière minute après que le Sénat aura agi de bonne foi?
En conclusion de nos délibérations sur le projet de loi C-3, la citoyenneté est l’un des statuts juridiques les plus importants que notre pays confère. Notre responsabilité est double : faire en sorte de résoudre les injustices de longue date auxquelles sont confrontés les Canadiens dépossédés de leur citoyenneté, et préserver la cohérence, l’intégrité et la signification de la citoyenneté canadienne pour les générations à venir.
Bien que nous ayons eu très peu de temps pour examiner le projet de loi C-3, je me dois de parler de l’amendement plein de bon sens adopté par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes, amendement qui visait à exiger, pour la citoyenneté par filiation, 1 095 jours de présence sur une période de cinq ans, comme on le fait pour la naturalisation. Andrew Griffith a fait la même recommandation devant le Comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Il est logique, chers collègues, d’au moins clarifier le libellé, ajouter une certaine uniformité et renforcer la protection de la citoyenneté canadienne.
Voici ce que Andrew Griffith a dit au comité lundi soir au sujet de la complexité de la loi :
[...] Cela répondait à mes principales préoccupations concernant la difficulté pour les demandeurs et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada d’administrer le projet de loi C-3, tout en créant un critère de lien plus solide. Le délai de traitement des preuves de citoyenneté est déjà passé de cinq à neuf mois avant même la mise en œuvre du projet de loi C-3. À mon avis, il serait irresponsable d’imposer à un ministère qui a déjà du mal à respecter les normes de service une charge administrative supplémentaire pour déterminer si une personne a cumulé 1 095 jours de résidence non pas pendant une période de 5 ans, mais au cours de sa vie.
Par conséquent, chers collègues, je propose que le projet de loi C-3 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit modifié, à l’article 1 :
a) à la page 3, par substitution, à la ligne 40, de ce qui suit :
« quinze jours au cours d’une période quelconque de cinq années consécutives avant la naissance; »;
b) à la page 4, par substitution, à la ligne 30, de ce qui suit :
« quinze jours au cours d’une période quelconque de cinq années consécutives avant la naissance. ».
Honorables collègues, je pense qu’il s’agit d’un amendement raisonnable. Il apporte intégrité et transparence au processus. Cela nous donnera une chance d’atteindre l’objectif du projet de loi, car autrement, ce sera difficilement gérable pour la fonction publique.
Même si nous n’avons pas pu adopter d’autres amendements qui renforceraient également ce projet de loi — et j’ai écouté très attentivement le discours du sénateur Arnot, qui a soulevé nombre de bons points dont on devrait tenir compte, mais ce sera malheureusement impossible —, il s’agit d’un élément clé des quatre ou cinq amendements que nous pouvons étudier. Nous devrions renvoyer ce projet de loi, et je crois que sans cet amendement, ce projet de loi n’a aucune chance de survivre. Je pense que ce projet de loi serait inapplicable. L’administration d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada aurait de la difficulté à s’y retrouver. Ce serait un échec pour tous les Canadiens dépossédés de leur citoyenneté qui méritent vraiment de se voir accorder la citoyenneté canadienne, mais cela doit se faire de manière juste et équilibrée.
Je propose cet amendement. J’espère que vous le soutiendrez. Je rappelle aux sénateurs que, au bout du compte, ce sera à la Chambre élue et au gouvernement élu de se prononcer sur tous ces amendements, mais je pense qu’il nous incombe de faire la lumière là où règne actuellement l’obscurité et de faire pression, même si le gouvernement s’est montré peu enclin à accepter des suggestions sensées et raisonnables. Je pense que l’amendement est ce genre de suggestion, et j’espère que vous l’approuverez. Merci, chers collègues.