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Projet de loi concernant un congé fiscal pour l'ensemble des Canadiens

Troisième lecture

12 décembre 2024


L’honorable Tony Loffreda [ - ]

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture pour faire part de mon point de vue sur le projet de loi C-78, qui vise à modifier la Loi sur la taxe d’accise afin de mettre en œuvre un congé temporaire de TPS/TVH du 14 décembre 2024 au 15 février 2025 pour certaines fournitures taxables.

Il est important de noter que lorsque ce congé fiscal a été annoncé pour la première fois, le 21 novembre, il devait être accompagné d’une nouvelle « Remise pour les travailleurs canadiens » de 250 $ qui aurait été distribuée à 18,7 millions de Canadiens au printemps prochain. Cette mesure n’est pas incluse dans le projet de loi C-78.

Premièrement, je tiens à exprimer ma gratitude aux membres du comité pour le travail exceptionnel que nous avons accompli la semaine dernière. Je vous remercie.

Malgré des délais serrés, notre comité a tenu trois réunions et a reçu 18 témoins, dont des intervenants de l’industrie tels que des détaillants, des épiciers et des restaurateurs.

Nous avons entendu des représentants du Centre canadien de politiques alternatives, un ancien gouverneur de la Banque du Canada, le directeur parlementaire du budget et des universitaires. Nous avons également eu le plaisir d’accueillir la ministre Freeland et des représentants du ministère des Finances et de l’Agence du revenu du Canada mercredi.

Deuxièmement, je vais vous expliquer pourquoi j’appuie le projet de loi.

Pour mon troisième et dernier point, mais non le moindre, j’aimerais prendre quelques minutes pour revenir sur certains des témoignages entendus la semaine dernière par le Comité des finances nationales, notamment de la part de gens d’affaires. Je trouve important que les honorables sénateurs entendent ce que ces gens avaient à dire, même si je dois admettre que j’ai abrégé leurs propos parce que je sais que la sonnerie va retentir bientôt et que les votes suivront.

Chers collègues, permettez-moi de vous expliquer pourquoi j’appuie ce projet de loi. Pour commencer, il accordera un répit financier immédiat aux Canadiens en exonérant certains biens et services essentiels de la TPS et de la TVH. Tous les Canadiens pourront vraisemblablement faire rapidement des économies s’ils achètent les articles visés.

Ce projet de loi favorise également l’abordabilité pendant une période cruciale. Ce congé de taxe temporaire coïncide avec la période des Fêtes, pendant laquelle les dépenses des ménages sont généralement en hausse, et il vise à alléger la pression financière qui pèse sur leurs épaules en faisant baisser le coût d’un grand nombre d’articles essentiels ou populaires pendant cette période de l’année.

Le projet de loi stimulera également les dépenses de consommation et l’économie en général en faisant baisser le coût de certains types de marchandises. Cette mesure devrait favoriser les dépenses de consommation et offrir un bon coup de pouce au secteur de la vente au détail et à celui de la restauration. Le regain de vitalité espéré a d’ailleurs poussé les analystes de la BMO à ajuster leurs prévisions de croissance du PIB à la hausse.

Ce projet de loi vient aussi en aide aux familles avec enfants. L’inclusion des vêtements, des chaussures et des sièges d’auto pour enfants, des couches et des jouets dans la liste des articles exonérés de taxe offrira un répit ciblé aux familles, qui pourront plus facilement assumer ce qu’il en coûte pour élever une famille et prendre soin d’enfants.

Enfin, le projet de loi favorise la littératie et l’éducation en exonérant de la taxe les livres et les imprimés. Le projet de loi encourage la lecture et les activités éducatives, ce qui pourrait entraîner des avantages sociaux à long terme.

En résumé, le projet de loi C-78 est conçu pour offrir une aide financière immédiate aux Canadiens, stimuler l’activité économique et soutenir tous les Canadiens et toutes les familles pendant une période où les dépenses sont élevées. Pour ces raisons, je voterai en faveur du projet de loi C-78.

Ce projet de loi vise à aider les familles, les enfants et de nombreux Canadiens en atténuant les pressions financières qu’ils peuvent subir. Donnons-leur l’aide dont ils ont besoin. Les entreprises devraient également profiter d’une hausse des ventes.

Les Canadiens s’attendent désormais à cette aide. Les entreprises ont déjà engagé des dépenses pour se préparer à ce projet de loi que tout le monde s’attend à voir entrer en vigueur samedi. Nous avons entendu des arguments selon lesquels cela coûte cher aux entreprises. Ces dépenses sont déjà engagées. Pouvez-vous imaginer l’impression que nous donnerions si nous ne votions pas en faveur de ce projet de loi alors que les entreprises ont déjà engagé les dépenses? Elles n’engrangeraient pas les recettes qui en découleront. C’est un point important.

Bien sûr, la plupart des Canadiens accueilleront favorablement ce congé de taxe. Qui ne voudrait pas avoir en poche une plus grande partie de l’argent qu’il a durement gagné?

Permettez-moi de vous faire part de ce que nous avons entendu dans le cadre des travaux du comité.

Pour d’aucuns, cette mesure est trop générale et ne cible pas les Canadiens qui en ont le plus besoin. Le directeur parlementaire du budget nous rappelle d’ailleurs que le congé de TPS et de TVH est de portée générale. Ce congé ne se voulait pas une mesure ciblant certaines tranches de la population. Sinon, le gouvernement s’y serait sans doute pris autrement.

Le gouvernement a manifestement choisi d’instaurer un congé de taxe universel, ce qui m’amène à parler d’autres grandes questions, dont certaines ont été abordées au comité.

Premièrement, à propos du choix des articles admissibles au congé de taxe, la ministre Freeland a expliqué que le gouvernement a commencé par les denrées alimentaires, qui sont essentielles, mais coûtent de plus en plus cher, et qu’il a ensuite élargi la liste aux vêtements, aux couches et aux articles dont les enfants ont besoin.

Deuxièmement, il a été beaucoup question en comité du fardeau que cette mesure impose aux entreprises. Je suis conscient des coûts associés à l’application de ces modifications, mais il faut se rappeler que les ventes augmenteront. Ce projet de loi entraînera une augmentation des revenus. Les dépenses associées à l’application de cette mesure ont déjà été faites.

En effet, pour bien des entreprises, ces dépenses, ou la plupart d’entre elles, ont déjà été faites parce qu’elles s’attendent à ce que le projet de loi soit en vigueur d’ici samedi. Si nous rejetons le projet de loi, il n’y aura pas de revenus supplémentaires, mais les coûts additionnels auront déjà été engagés.

Le Conseil canadien du commerce de détail a déclaré ceci :

[...] nous appuyons cette politique visant à accorder un congé de TPS et nous croyons qu’elle aura des avantages concrets et importants tant pour les consommateurs que pour les détaillants.

Le conseil a dit qu’il y avait des défis à relever, mais qu’il soutenait ce projet de loi.

Chers collègues, depuis l’annonce de cette mesure il y a trois semaines, mon téléphone ne cesse de sonner — comme toujours, mais un peu plus. Certains membres du milieu des affaires sont inquiets, et avec raison, mais beaucoup m’ont également dit qu’il y avait un effet positif déjà perceptible. En effet, les revenus et les profits nets seront plus élevés.

J’ai bon espoir que les coûts associés à la mise en œuvre de ce changement seront compensés par la hausse des ventes et des profits. Pour tout vous dire, les économistes de la BMO estiment que le congé de TPS et de TVH incitera les gens à dépenser et ils prévoient que la croissance du produit intérieur brut au premier trimestre de 2025 va passer de 1,7 à 2,5 %.

Voyez un peu : Maximilien Roy, de Restaurants Canada — qui appuie le projet de loi C-78 — a déclaré que le congé de TPS et de TVH ne pouvait pas mieux tomber pour le secteur hôtelier et celui de la restauration. Selon l’économiste en chef de l’association, les ventes additionnelles que connaîtra son secteur d’activité pendant cette période pourraient atteindre 1,5 milliard de dollars — et c’est seulement pour le secteur de la restauration. Voilà pourquoi je disais tout à l’heure que l’on constate déjà les retombées de cette annonce dans l’augmentation du nombre de réservations pour le temps des Fêtes, par exemple.

Je crois qu’on peut espérer que le phénomène se répétera dans les autres secteurs d’activité, et, qui sait, peut-être une partie des économies réalisées réintégreront-elle l’économie par d’autres chemins.

Le troisième point que je souhaite aborder est l’approche de l’Agence du revenu du Canada en matière de conformité. Les entreprises devront se conformer à cette nouvelle mesure fiscale, mais certains se demandent ce qui arrivera à celles qui y dérogeront sans le vouloir. Cette mesure a été annoncée à très court préavis, sa mise en œuvre nécessitera beaucoup de travail et la liste des articles admissibles est passablement complexe, alors des erreurs de bonne foi sont très certainement possibles.

Le directeur général de la Direction de la TPS/TVH et de l’observation numérique a déclaré au comité que le gouvernement est bien conscient des difficultés des entreprises. La direction a mis de nombreuses ressources à la disposition des entreprises pour répondre à leurs questions et communiquer avec elles. Il nous a dit que l’Agence du revenu du Canada allait adopter une approche pragmatique concernant l’observation des règles et qu’elle allait se concentrer sur les cas où les entreprises refusent carrément de les appliquer. Il a insisté sur le fait que les entreprises qui cherchent de façon raisonnable à s’y conformer n’ont rien à craindre. L’agence ne veut pas pénaliser les personnes qui cherchent à respecter les règles.

Je presse d’ailleurs l’agence de se concentrer sur les entreprises qui refusent carrément de se conformer aux changements fiscaux. Nous suivrons ce dossier de près.

Je répète que cette mesure vise à aider l’ensemble des Canadiens dans le contexte actuel de la crise du coût de la vie. Elle ne se veut pas une mesure ciblant les personnes à faible revenu. Comme la ministre Freeland nous l’a rappelé, le gouvernement a déjà fait beaucoup depuis 2015 pour aider les personnes les plus vulnérables et les plus démunies.

En ce qui concerne la capacité fiscale du Canada de se priver de ces recettes, ce qui est d’ailleurs extrêmement important, j’ai posé la question au directeur parlementaire du budget lorsqu’il a comparu devant le comité. En parlant de son dernier rapport sur la viabilité financière, il a confirmé ceci :

[...] selon la politique actuelle, ses paramètres et les hypothèses démographiques, la situation financière est viable au Canada. Le gouvernement fédéral pourrait dépenser plus ou réduire ses recettes fiscales, ou une combinaison des deux, et demeurer viable sur un horizon de 75 ans. Par conséquent, y a-t-il des capacités financières permettant de faire plus d’investissements? La réponse est oui.

Au comité, nous nous sommes penchés sur la politique budgétaire et monétaire. Pendant ma carrière de 40 ans dans le secteur financier, j’ai participé à de nombreuses discussions. Je dis 40 ans en comptant mes 5 années au Sénat. Je peux vous dire que je suis très impressionné par le Comité sénatorial des finances — tout comme l’est le Globe and Mail. Je remercie encore une fois mes collègues du travail qu’ils font.

Les questions soulevées au comité ont aussi porté sur la politique monétaire. Nous avons notamment discuté des médias qui avaient rapporté qu’au moins un expert était d’avis que le projet de loi C-78 ruinerait toute chance d’une réduction marquée du taux directeur par la Banque du Canada. Le sentiment était qu’il fallait maintenant oublier une telle réduction et que, même si nous en avions besoin, le projet de loi détruirait cette possibilité. Vous savez quoi? Hier, la Banque du Canada a réduit le taux directeur de 50 points de base, ce qui a démenti cette critique.

Je pourrais parler longtemps des excellentes questions qui ont été soulevées, mais, parce que je suis conscient de la sonnerie et du vote qui vont suivre, je conclurai en disant que le Comité sénatorial des finances, qui est exceptionnel, recommande aux sénateurs, après avoir fait un travail diligent et approfondi, d’appuyer le projet de loi. Offrons à de nombreux Canadiens l’aide dont ils ont besoin pendant les Fêtes.

Merci, meegwetch.

L’honorable Percy E. Downe [ - ]

Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Loffreda [ - ]

Oui.

Le sénateur Downe [ - ]

Monsieur le sénateur, les entreprises canadiennes croiraient davantage les paroles rassurantes de l’Agence du revenu du Canada si cet organisme était connu pour joindre le geste à la parole. Malheureusement, au cours des dernières années, l’agence a — et je resterai poli — induit les Canadiens en erreur. Par exemple, elle a prétendu que 90 % des appelants réussissaient à joindre un agent de leur centre d’appels. C’est extrêmement important. Les entreprises ont besoin de savoir comment mettre en œuvre le congé de taxe, et elles vont communiquer avec le centre d’appels de l’Agence du revenu du Canada.

C’est ce qu’a prétendu l’Agence du revenu du Canada. Toutefois, quand la vérificatrice générale a mené son enquête, elle a découvert que l’agence avait raccroché au nez de 28 millions d’appelants et que le taux réel d’appelants ayant réussi à joindre un agent du centre d’appels était de 36 %.

Il y a toute une série de problèmes avec ce que l’Agence du revenu du Canada a dit et ce qu’elle a fait ces dernières années.

Pourquoi êtes-vous si confiant à l’égard de ce que nous avons entendu lors de cette réunion du Comité des finances?

Le sénateur Loffreda [ - ]

Je vous remercie.

J’ai beaucoup d’expérience avec l’Agence du revenu du Canada. Vous avez entendu la question que j’ai posée à ses représentants lorsqu’ils étaient devant le comité. Je l’ai déjà dit : quand l’ARC frappe, elle frappe fort. Avons-nous l’assurance que ce ne sera pas le cas ici et que l’agence se montrera clémente envers les erreurs non intentionnelles? Vous avez entendu la réponse, sénateur Downe.

Je ne peux pas commenter ce qui est arrivé par le passé, je peux seulement regarder en avant. On dit qu’il n’y a rien de plus important que l’espoir, alors espérons. L’agence a les ressources qu’il faut. Nous avons entendu ses représentants — leur témoignage est public — et j’entends leur demander des comptes.

Le sénateur Downe [ - ]

Il y a d’autres exemples, évidemment. L’ARC est loin d’en être à ses premières frasques. Il y a quelques années, certains contribuables qui touchaient le crédit d’impôt pour personnes handicapées ont soudainement cessé d’y être admissibles. L’Agence du revenu du Canada a alors dit publiquement que les critères n’avaient pas changé. Diabète Canada a mis la main sur un courriel fuité qui prouvait exactement le contraire. La chose a été ébruitée et l’ARC a dû se dédire.

Que dire des 300 employés de l’agence qui ont été renvoyés parce qu’ils ont réclamé des prestations auxquelles ils n’avaient pas droit pendant la pandémie? Dernièrement, l’agence a refusé de révéler au Parlement combien de dossiers fiscaux de Canadiens avaient été compromis. Elle versait de l’argent à des pirates informatiques. L’agence a fini par transmettre une partie de l’information au Parlement, mais à personne d’autre.

Dans les circonstances, pourquoi le Comité des finances n’invite-t-il par l’ARC et ne soumet-il pas sa culture organisationnelle à une étude détaillée?

Sénateur Loffreda, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous plus de temps pour répondre à la question?

Le sénateur Loffreda [ - ]

Je demande seulement du temps pour répondre à cette question. Cela vous va?

Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Le sénateur Loffreda [ - ]

Sénateur Downe, vous faites valoir d’excellents arguments. J’ai le plus grand respect pour votre expérience, pour tout ce que vous avez fait et pour les services que vous avez rendus.

Malheureusement, je ne suis ni président ni même membre du comité directeur du Comité des finances. Je vous rappelle toutefois qu’il y a quand même une étude en cours et que les recommandations seront transmises au comité directeur et à son président. Le président actuel sait où il s’en va. Tout le monde louangeait le sénateur Mockler pour son excellent travail, mais le sénateur Carignan fait un travail exceptionnel. Nous avons un Comité des finances extraordinaire. Espérons que le comité directeur saura en profiter.

J’ai presque terminé.

Les gens disent souvent qu’ils n’ont aucun pouvoir. Or, le pouvoir le plus sous-estimé du monde est celui de l’influence. Espérons que j’aurai assez d’influence pour convaincre le comité de se lancer dans cette étude.

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : À mon avis, les oui l’emportent.

Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie? Pardon, mais j’ai entendu un « non ». La sonnerie retentira pendant une heure, et le vote aura lieu à 17 heures.

Convoquez les sénateurs.

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