PÉRIODE DES QUESTIONS — Les affaires étrangères
L'intégrité des élections
9 mars 2023
Monsieur le leader du gouvernement, pourquoi le premier ministre est-il totalement incapable de dire la vérité aux Canadiens? Qu’il s’agisse des journalistes ou des parlementaires, personne n’obtient de lui une réponse franche. Global News rapporte que la direction chargée de l’évaluation du renseignement étranger au sein du ministère du premier ministre, le Bureau du Conseil privé, a préparé un rapport spécial en janvier 2022 à l’intention du premier ministre et des cadres supérieurs du Cabinet du premier ministre. On peut y lire ce qui suit :
Un montant important destiné aux élections fédérales a d’abord été envoyé clandestinement au consulat de Toronto par la République populaire de Chine, puis a été transféré à un député provincial par l’intermédiaire d’un membre du personnel d’un candidat aux élections fédérales de 2019.
Hier, à l’autre endroit, le premier ministre a été interrogé à plusieurs reprises à ce sujet. Il a tout fait sauf répondre aux questions. Pourquoi pas, monsieur le leader? Pourquoi ne peut-il pas nous dire la vérité?
Je vous remercie de votre question. Je pense toutefois que l’hypothèse qui sous-tend votre question est trompeuse. Je ne vais pas répéter tout ce que j’ai dit hier.
Le premier ministre et le gouvernement ont mis en place plusieurs mesures pour tenter de déterminer non seulement ce qui s’est passé, mais aussi de quelle manière nous pouvons nous protéger à l’avenir. Cela inclut le renvoi de l’affaire au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, qui a accepté de l’étudier, je crois, et à l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, qui définira son propre mandat et son champ d’étude; la nomination d’un rapporteur spécial; le lancement de consultations publiques pour guider la création d’un registre de transparence sur l’influence étrangère; et l’établissement, au sein de Sécurité publique Canada, d’un bureau chargé de la coordination de nos efforts de lutte contre l’ingérence étrangère.
Ces processus sont appropriés, compte tenu de la sensibilité et de la nature classifiée des informations relatives à ces questions. La fuite d’informations à laquelle il a été fait référence hier, et qui est omniprésente dans les médias, n’est pas la manière dont un Parlement responsable doit traiter ces questions.
Eh bien, ma question portait sur les raisons pour lesquelles il ne répond pas aux questions, et non sur ses activités connexes, mais puisque vous mentionnez le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, parlons d’un autre document fourni par Global News, un exemplaire non caviardé d’un rapport datant d’août 2019, préparé par le comité.
Ce comité relève directement du premier ministre. Le premier ministre et son personnel approuvent les caviardages ou les modifications aux rapports du comité préalablement à leur publication. Monsieur le leader, je souligne au passage que paradoxalement, le premier ministre, qui se vante du fait que tous les partis reconnus sont représentés au comité, a omis d’y nommer un sénateur de l’opposition officielle. Il a nommé des sénateurs supposément indépendants, mais pas de sénateurs du Parti conservateur du Canada.
Monsieur le leader, je suis curieux de savoir pourquoi.
Voici ma question — je vais continuer sur ma lancée. Global News affirme que le rapport :
[...] renferme plusieurs exemples d’ingérence électorale présumée de la part de la Chine entre 2015 et 2018, impliquant le ciblage et le financement de candidats.
Le premier ministre a sans doute vu le rapport, monsieur le leader. Il l’a vu et n’y a pas donné suite. Il y a lieu de se demander s’il veut que les fuites de ce rapport et du rapport du Bureau du Conseil privé fassent l’objet d’une enquête de la même manière qu’il veut que les dénonciateurs du Service canadien du renseignement de sécurité soient pourchassés.
Monsieur le leader, vous avez affirmé que le comité ferait toute la lumière sur cette question d’une manière responsable et prudente. Le comité devrait peut-être compter un représentant conservateur du Sénat. Cela pourrait nous aider.
Comment un comité secret pourra-t-il faire le nécessaire alors que le premier ministre ne tient pas compte de ses rapports?
La position du gouvernement est claire. Il fait confiance au comité de parlementaires et il accueille le travail que celui-ci a accompli. Comme je l’ai déjà dit, je recommande à tous les sénateurs de prendre connaissance du rapport sur l’ingérence étrangère. Le gouvernement continue de faire confiance aux membres du comité, qui représentent tous les partis.
Il nous reviendra...
Certains...
... à titre de parlementaires d’évaluer la qualité du travail accompli grâce aux processus que j’ai mentionnés.
Je tiens aussi à rappeler que les articles des médias reposent en grande partie sur des fuites provenant de sources anonymes, ce qui semble malheureusement être une réalité de ce débat. À titre de Canadiens et de parlementaires, nous devrions éviter d’applaudir et d’approuver les fuites de renseignements classifiés faites par des gens qui se sont engagés, sous serment, à les protéger.
Chers collègues, le leader du gouvernement se défend en alléguant que le Globe and Mail verse dans les fausses nouvelles et que nous ne pouvons pas faire confiance aux organes de presse légitimes. Intéressant.
Sénateur Gold, à plusieurs occasions dans vos réponses à nos questions hier, vous avez déclaré que nous devons prendre au sérieux les allégations d’ingérence étrangère dans notre système électoral. Je peux vous garantir, sénateur Gold, qu’il y a longtemps que le Sénat pose, continuellement, de très sérieuses questions à ce sujet. Le temps est venu pour votre gouvernement d’accorder tout le sérieux nécessaire pour combattre l’ingérence étrangère non seulement dans notre système électoral, mais à l’échelle de notre pays. Au cours des derniers jours, nous avons vu le premier ministre faire la girouette dans ses réponses à toutes ces allégations. Il ne fait preuve d’aucune fermeté et ne prend aucune mesure, si ce n’est que des tactiques dilatoires visant à cacher la vérité aux Canadiens.
Voici que, soudainement, un rapporteur spécial va résoudre le problème. Eh bien, sénateur Gold, en ce moment, le commissaire à l’éthique conseille à vos ministres de suivre une formation spéciale en matière d’éthique, car son bureau est trop occupé par l’autre endroit. Le gouvernement a accordé un nombre record de contrats à des consultants externes, et ce même si l’appareil fédéral ne cesse de grossir et qu’il est incapable d’offrir des services de base. C’est évident qu’il a maintenant besoin de quelqu’un pour lui prodiguer des conseils sur la façon de gérer les allégations d’ingérence étrangère pendant une campagne électorale, car selon ces allégations, son parti et lui auraient participé à cette ingérence.
Ma question concerne le premier ministre, qui répète ad nauseam depuis quelques jours que le gouvernement va tenir des consultations publiques afin de créer un registre des agents étrangers. Il est grand temps qu’on fasse ce qu’il faut. Une loi en ce sens existe déjà au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Australie, monsieur le leader.
Votre gouvernement a annoncé une consultation publique à cet effet il y a plus d’un an déjà. Est-ce qu’une date a été établie? Non. Est-ce que la méthodologie a été établie? Non. Quelles mesures ont été prises pour lancer cette consultation publique? Aucune.
Ma question est simple : quelles mesures concrètes ont été prises, outre ces annonces sans suite?
Eh bien, vous avez certainement inclus bien des mesures dans votre question. La consultation fait partie d’un train de mesures que j’ai déjà annoncé, et le gouvernement est d’avis que cette combinaison de mesures va permettre de traiter le problème de la façon la plus appropriée.
Ces annonces ont été faites il y a un an. Le problème qui se pose aujourd’hui en raison du courage des fonctionnaires du Service canadien du renseignement de sécurité qui, de toute évidence, étaient exaspérés par le premier ministre — et qui ont dû s’adresser aux médias pour faire connaître cette affaire au public — est qu’ils ne font pas confiance au gouvernement. Le Sénat est saisi d’un projet de loi qui prévoit la mise en œuvre d’un registre des agents étrangers. Il est semblable à un projet de loi qui avait été déposé à l’autre endroit au cours de la législature précédente et que le gouvernement avait également ignoré.
Les deux projets de loi ont été rédigés après une large consultation de la diaspora et des communautés qui sont intimidées. Cela fait un an que ce projet de loi traîne ici, et M. Trudeau, honorables sénateurs, n’a pas pris la peine de s’exprimer une seule fois sur cette question. Il y a eu un discours, mais aucun suivi, que de la procrastination. Il incombe aux parlementaires d’étudier ces questions. C’est ce que le public attend de nous. C’est notre rôle et notre obligation.
Pourquoi ne faisons-nous pas notre travail? Pourquoi votre gouvernement n’appuie-t-il pas le projet de loi S-237, ne le renvoie‑t-il pas à un comité aux fins d’étude et ne fait-il pas en sorte que le Sénat l’adopte rapidement, comme nous l’avons fait pour d’autres projets de loi que nous jugeons d’intérêt public? Nous avons vu comment nous nous rassemblons rapidement sur des questions d’intérêt public et comment nous renvoyons rapidement ces projets de loi à l’autre endroit. Nous pouvons faire la même chose avec le projet de loi S-237 en lançant dès maintenant le processus plutôt que de perdre une autre année en consultations et risquer qu’il y ait peut-être d’autres élections avant que nous ayons accompli quoi que ce soit.
Je vous remercie de votre question. À l’instar du gouvernement, je reconnais l’importance des projets de loi d’intérêt public présentés au Sénat.
Comme vous le savez — étant donné que c’est la position que votre leader a prise à mon égard et que je l’accepte et la respecte —, les négociations concernant l’adoption de projets de loi qui n’émanent pas du gouvernement ne relèvent pas du bureau du représentant du gouvernement et sont laissées au soin des leaders des divers groupes parlementaires.